CDD : les conséquences d’une requalification en CDI
CDD requalifié en CDI : les hypothèses
Des règles strictes. Le CDD est un contrat dit « dérogatoire au droit commun », par rapport au CDI. Voilà pourquoi les hypothèses qui vous permettent de recourir à un CDD sont strictement réglementées et que leur mise en place est soumise à un formalisme contraignant. Et si vous ne respectez pas la règlementation spéciale applicable aux CDD, vous risquez une requalification du contrat en CDI. Dans quels cas ?
Requalification en CDI ? Les hypothèses pour lesquelles l’entreprise peut risquer une requalification du CDD en CDI peuvent intervenir à différents moments, que ce soit au moment où vous décidez de recourir au CDD, lors de la rédaction du contrat, ou lors de son renouvellement ou de son terme. D’où l’extrême vigilance que vous devez observer lorsque vous embauchez des salariés en CDD.
Non-respect des cas de recours au CDD. Vous risquez une requalification du CDD en CDI si, par exemple :
- vous concluez un CDD en dehors des cas de recours strictement admis par la loi ;
- vous concluez un CDD avec un salarié qui sera affecté au remplacement de plusieurs salariés absents ;
- vous concluez un CDD pour remplacer un salarié gréviste ;
- vous concluez un CDD pour pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise, et ce, quel que soit le motif du contrat.
Non-respect du formalisme des CDD. Vous risquez une requalification du CDD en CDI si, par exemple :
- vous ne concluez pas le contrat par écrit ;
- vous ne faites pas signer le contrat par le salarié ;
- vous n’avez pas remis un exemplaire du contrat au salarié dans les 2 jours ouvrables suivant l’embauche antérieure au 24 septembre 2017 ; à compter de cette date, le défaut de transmission est uniquement sanctionnée par le versement d’une indemnité égale à 1 mois de salaire, au maximum ;
- vous ne prévoyez pas de terme précis au contrat (ou une durée minimale pour les contrats à terme imprécis) ;
- le contrat ne comporte pas les mentions obligatoires : motif du recours au CDD, identification et qualification de la personne remplacée si le contrat est conclu pour ce motif, etc. ;
- vous dépassez la durée maximale admise.
Le saviez-vous ?
Les juges admettent toutefois que l’absence d’une mention à caractère purement informatif n’entraînera pas la requalification du contrat. Ce sera par exemple le cas si le contrat ne mentionne pas la convention collective applicable ou le nom de la caisse de retraite ou de prévoyance dont relève le salarié.
A noter. Le fait de recourir régulièrement, voire de manière permanente, au CDD de remplacement ne suffit pas à caractériser que ce recours systématique au CDD répond à un besoin structurel de main d’œuvre et permet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale de l’entreprise. Rappelons à cet effet que ce recours permet à l’employeur de garantir à ses salariés le bénéfice des droits à congé maladie ou maternité, à congé payés ou repos que leur accorde la loi.
Exemple. Pourvoit durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise la clinique qui :
- utilise le CDD comme mode habituel de gestion du personnel ;
- emploie un même salarié en tant qu’infirmier et, occasionnellement, en tant qu’aide-soignant, moyennant une rémunération identique, même si les contrats sont interrompus par de courtes périodes ;
- lui propose d’effectuer des remplacements au dernier moment, l’obligeant à se tenir à la disposition de l’employeur.
A la fin du contrat. Vous risquez une requalification du CDD en CDI si, par exemple :
- dans l’hypothèse d’un renouvellement du CDD, et à défaut de clause de renouvellement dans le contrat, vous ne concluez pas un avenant avec le salarié avant le terme du contrat initial ;
- vous dépassez le terme du contrat, de sorte que la relation de travail se poursuit avec le salarié après l’échéance du terme du CDD ;
- vous renouvelez le CDD plus d’une fois dans la période des 18 mois ;
- vous renouvelez le CDD ce qui a pour effet de porter la durée du contrat au-delà de la durée maximale admise ;
- vous ne respectez pas les délais de carence en cas de CDD successifs conclus avec le même salarié ou pour un même poste.
En cours de contrat. Si un salarié agit en requalification du CDD en CDI avant le terme de son CDD, il peut obtenir, en référé, la poursuite provisoire du contrat, jusqu’à ce que le juge se prononce définitivement sur la requalification. Cela signifie que le salarié reste dans les effectifs de l’entreprise, y compris après la décision de justice si elle lui accorde la requalification. Dans ce cas, l'entreprise n'aurait pas à verser d'indemnités de licenciement. Notez que la rupture du contrat prononcée pendant cette période serait nulle, donnant droit au salarié de réintégrer l’entreprise.
Le saviez-vous ?
Seul le salarié pourra demander la requalification d’un CDD en CDI : vous ne pourrez pas, en qualité d’employeur, invoquer une telle requalification, de même que le juge ne peut pas prononcer d’office une requalification du contrat en CDI.
Une requalification limitée ? Lorsqu’un salarié obtient la requalification de son CDD en CDI, la requalification ne porte que sur le terme du contrat, les autres clauses restent inchangées. Aussi, un CDD à temps partiel peut être requalifié en CDI à temps partiel, et non pas en CDI à temps complet.
CDD requalifié en CDI : le délai de prescription
Attention aux délais ! Le salarié qui souhaite obtenir la requalification de son CDD en CDI doit saisir le juge dans un délai limité, appelé « délai de prescription ». Son point de départ dépendra vraisemblablement de la cause de cette requalification. Par exemple, les juges ont admis que le délai d’action en requalification du CDD en CDI, justifiée par l’absence d’une mention obligatoire dans le contrat, commence à courir à compter de la conclusion du contrat. Mais le même point de départ ne serait peut-être pas systématiquement retenu (dans le cas d’une poursuite du CDD après son terme, par exemple).
Rappel général. En matière sociale, il existe 3 principaux délais de prescription :
- 1 an pour les actions portant sur la rupture d’un contrat de travail;
- 2 ans pour les actions portant sur l’exécution d’un contrat de travail ;
- 3 ans pour les actions portant sur le paiement du salaire.
Et pour la requalification ? Le délai de prescription à l'action en requalification d'un CDD en CDI applicable est celui de 2 ans prévu pour les actions portant sur l'exécution du contrat de travail.
Des précisions. Il convient de distinguer en fonction de la situation dans laquelle se trouve le salarié :
- lorsque l'action est fondée sur l'absence d'établissement d'un écrit : le délai de prescription court à compter de l'expiration du délai de 2 jours ouvrables imparti à l'employeur pour transmettre au salarié le contrat de travail ;
- lorsqu'elle est fondée sur l'absence d'une mention au contrat susceptible d'entraîner sa requalification : le délai de prescription court à compter de la conclusion de ce contrat ;
- lorsqu'elle est fondée sur le motif du recours au CDD énoncé au contrat : le délai de prescription court à compter du terme du contrat ou, en cas de succession de CDD, à compter du terme du dernier contrat.
Quelques hypothèses. Les questions tenant au délai de prescription de l’action en requalification du CDD en CDI n’ont pas toutes été fermement tranchées à ce jour. N’hésitez donc pas à vous enquérir de l’avis de votre conseil, le cas échéant. Voici quelques hypothèses d'application de la prescription :
- si le salarié souhaite obtenir, à la suite de la requalification du CDD en CDI, des indemnités de licenciement sans cause réelle et sérieuse, le délai de prescription à respecter « pourrait » éventuellement être d’1 an ;
- si le salarié souhaite obtenir, à la suite à la requalification du CDD en CDI, un rappel de salaire pour les périodes situées entre 2 contrats, par exemple, le délai de prescription de 3 ans applicable aux salaires empêche le salarié de réclamer des salaires antérieurs aux 3 dernières années.
Prescription et ancienneté. Dans une affaire récente, un salarié contestait le motif de recours au CDD. Et parce qu’il avait signé plusieurs CDD successifs avec le même employeur pendant 9 ans, il revendiquait une ancienneté de 9 ans. Le juge a alors confirmé qu’en cas de succession de CDD, la prescription (ici, de 2 ans car l’action reposait sur l’exécution du contrat) ne court qu’à compter du terme du dernier contrat. Dès lors que le salarié obtient effectivement la requalification de ses CDD en CDI, celle-ci produit ses effets à compter du 1er contrat irrégulier. Il peut donc prétendre à l’ancienneté à partir du 1er CDD irrégulier.
Information tardive du non-renouvellement du CDD ! Ne faites pas comme cet employeur qui a informé le salarié du non-renouvellement de son CDD 2 jours après son échéance, alors que le salarié avait continué à travailler. L’employeur n’a pas pu se retrancher derrière sa méconnaissance de la poursuite d’activité par le salarié, son contrat a été requalifié en CDI.
CDD requalifié en CDI : les conséquences
Qui dit requalification en CDI… La requalification d’un CDD en CDI entraînera l’application d’une sanction qui prendra la forme d’une condamnation de l’entreprise au versement d’une indemnité.
… dit « indemnisation ». Cette indemnité de requalification d’un CDD en CDI, due au salarié et à la charge de l’employeur, ne peut pas être inférieure à 1 mois de salaire. Il faut toutefois apporter les précisions suivantes :
- si la relation de travail se poursuit après le terme du CDD, de sorte qu’il est automatiquement requalifié en CDI, le salarié ne pourra pas prétendre à l’indemnité de requalification (sauf en cas d’irrégularité du CDD initial) ;
- dans l’hypothèse où plusieurs CDD sont requalifiés en CDI, le salarié n’aura droit qu’à une seule indemnité de requalification.
Le saviez-vous ?
Une requalification du CDD en CDI peut entraîner pour l’employeur l’obligation de payer au salarié des rappels de salaire. Par exemple, si le salarié a travaillé dans le cadre de CDD successifs interrompus. Les rappels de salaire ne devront pas être diminués du montant de l’allocation chômage que le salarié aura pu percevoir pendant les périodes d’interruption, s’il s’est tenu à votre disposition pour effectuer un travail que vous pouviez lui confier.
Dans cette hypothèse, il appartient cependant au salarié de prouver qu’il s’est tenu à la disposition de l’employeur, sans quoi il ne pourra obtenir de rappel de salaire au titre des périodes séparant les différents contrats (« périodes interstitielles »).
En plus… Même en cas de requalification du CDD en CDI, l’indemnité de précarité versée au salarié lui reste acquise, de sorte que vous ne pouvez pas la récupérer (l’indemnité n’est toutefois pas due si la relation contractuelle se poursuit en CDI après le terme du CDD). Et l’indemnité de requalification est versée, en plus des éventuelles indemnisations qui peuvent s’ajouter, du fait de la rupture du contrat devenu à durée indéterminée. Notez, à cet égard, en présence de plusieurs CDD successifs irréguliers, que les effets de la requalification des CDD en CDI, et notamment le calcul de l’ancienneté, remontent à la date de conclusion du 1er CDD irrégulier.
Sur quelle base ? L’indemnité de requalification est calculée sur la base du dernier salaire mensuel, perçu par le salarié (si le salaire varie chaque mois, prenez en compte la dernière moyenne du salaire mensuel pour calculer le montant de cette indemnité).
Un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Lorsque la relation contractuelle a pris fin à l’échéance du CDD, ultérieurement requalifié en CDI, la rupture s’analyse en licenciement sans cause réelle et sérieuse. Elle s’apprécie à la date d’échéance du dernier CDD, si bien qu’un salarié ne peut pas demander la résiliation judiciaire de son contrat de travail postérieurement.
Indemnité de précarité. Les juges ont précisé que, si l’indemnité de précarité est due au terme du CDD et reste acquise au salarié, elle n’est toutefois pas intégrée au salaire pour le calcul de :
- l’indemnité de requalification ;
- l’indemnité compensatrice de préavis ;
- l’indemnité conventionnelle de licenciement.
Et des dommages-intérêts ! La perte d’emploi résultant d’une rupture abusive cause nécessairement un préjudice au salarié qui doit être indemnisé. Il n’a donc pas à prouver l’existence d’un préjudice.
Cumul de rémunérations ? La requalification du CDD en CDI place le salarié dans la même situation que les travailleurs permanents de l'entreprise, ce qui a pour effet de le placer dans la situation qui aurait été la sienne s’il avait été recruté depuis l'origine dans le cadre d'un CDI. Concrètement, il doit donc recevoir la même rémunération que les salariés permanents. Et au cas où la rémunération versée au titre du CDD serait supérieure, afin de compenser la situation dans laquelle il était placé du fait de son CDD, elle lui reste acquise, peu importe que le contrat ait été requalifié en CDI.
Le saviez-vous ?
Dans une copropriété, si la requalification du CDD en CDI est causée par une faute du syndic, qui n’a pas établi de CDD écrit, le syndic fautif doit indemniser la copropriété de son entier dommage (c’est-à-dire de toutes les conséquences rattachées à cette requalification).
A retenir
En cas de requalification d’un CDD en CDI, l’entreprise sera condamnée au versement d’une indemnité de requalification qui ne peut pas être inférieure à 1 mois de salaire, en plus de l’éventuelle indemnité de précarité qui reste acquise au salarié et des éventuelles indemnités pour rupture du contrat devenu à durée indéterminée.
J'ai entendu dire
Une infraction à la règlementation du CDD peut-elle être sanctionnée pénalement ?Oui, en effet. Sera notamment passible d’une amende de 3 750 € (portée à 7 500 € en cas de récidive) :
- le fait de conclure un CDD qui a pour objet ou pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise ;
- le fait d’embaucher un salarié en CDD pour un motif non autorisé ou interdit par la loi ;
- le fait de ne pas respecter les délais de carence entre deux CDD successifs ;
- le fait de ne pas remettre un exemplaire du contrat au salarié dans les 2 jours suivant son embauche ;
- etc.
- Articles L1241-1 et suivants du Code du travail (conclusion d’un CDD)
- Articles L1245-1 et L 1245-2 du Code du Travail (requalification du contrat)
- Ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 relative à la prévisibilité et la sécurisation des relations de travail (article 4)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 28 février 2001, n° 98-45096 (défaut de mention de la caisse de retraite et de prévoyance)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 11 juillet 2012, n° 11-12243 (un salarié en CDD ne peut pas remplacer plusieurs salariés absents)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 20 février 2013, n° 11-12262 (requalification à l’initiative du salarié)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 20 novembre 2013, n° 12-25459 (salaire mensuel variable)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 18 décembre 2013, n° 12-15454 (calcul de l’indemnité de requalification)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 19 mars 2014, n° 12-28326 (montant indemnité de requalification au minimum égal à un mois de salaire)
- Réponse ministérielle Braillard, Assemblée Nationale, n° 9599 du 5 mars 2013 (indemnité de précarité acquise au salarié en cas de requalification du CDD en CDI)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 7 juillet 2015, n° 13-17195 (indemnité et poursuite de la relation contractuelle après le terme du CDD)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 16 mars 2016, n° 15-11396(les rappels de salaire ne peuvent être diminués du montant des allocations chômage perçues par le salarié)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 16 mars 2016, 14-23589 (nullité du licenciement prononcé pendant la poursuite provisoire du CDD)
- Arrêts de la Cour de cassation, chambre sociale, du 13 avril 2016, n° 14-29897 à 14-29899 (des rappels de salaire doivent être versés au salarié qui s’est tenu à la disposition permanente de l’employeur)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 23 juin 2016, n° 14-29794 (calcul de l’indemnité de requalification, de l’indemnité compensatrice de préavis et de l’indemnité conventionnelle de licenciement)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 5 octobre 2016, n° 15-17458 (conclusion d’un avenant de renouvellement avant le terme initial du CDD)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 19 octobre 2016, n° 15-22790 (la requalification du CDD en CDI laisse inchangées les autres clauses du contrat)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 8 mars 2017, n° 15-18560 (poursuite provisoire du CDD après terme)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 13 septembre 2017, n° 16-13578 (rupture abusive et reconnaissance automatique du préjudice)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 8 novembre 2017, n° 16-17499 (effet de la requalification du CDD en CDI jusqu’au 1er contrat irrégulier)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 31 janvier 2018, n° 16-23602 (délai de prescription de 2 ans applicable pour l'action en requalification d'un CDD en CDI)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 14 février 2018, n° 16-17966 (recours permanent au CDD de remplacement et absence de requalification en CDI)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 28 mars 2018, n° 16-27019 (requalification systématique à défaut de mention de la qualification du salarié remplacé)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 3 mai 2018, n° 16-26437 (point de départ du délai de prescription et requalification pour absence d’une mention obligatoire)
- Arrêts de la Cour d’Appel de Versailles, du 11 janvier 2017, n° 15/01833 et de la Cour de cassation, chambre sociale, du 23 janvier 2019, n° 17-14327 (demande de résiliation judiciaire postérieure à l’échéance du CDD requalifié en CDI)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 23 janvier 2019, n° 17-21796 (exemple d'activité normale et permanente d’une clinique)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 20 février 2019, n° 17-21887 (prescription des salaires et requalification CDD en CDI)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 29 janvier 2020, 18-15359 (point de départ de la prescription en cas de CDD successifs)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 8 juillet 2020, n° 18-21942 (cumul de rémunérations du fait de la requalification du CDD en CDI)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 9 septembre 2020, n° 18-26238 (non-renouvellement du CDD et requalification en CDI)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 25 novembre 2020, n° 19-10506 (requalification CDD copropriété)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 17 février 2021, n° 18-23989 (rappel de salaire et périodes intercontrats)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 5 mai 2021, n° 19-16884 (rémunération périodes interstitielles en cas de CDD successifs)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 2 juin 2021, n° 19-18080 (la requalification d’un CDD en CDI ne vise que le terme du contrat)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 23 novembre 2022, n° 21-13059 (point de départ du délai de prescription de 2 ans)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 15 mars 2023, n° 20-21774 (précisions sur le point de départ du délai de prescription en cas de requalification en fonction du cas dans lequel se trouve le salarié)
Transiger avec un salarié
Conclure une transaction suppose au préalable quelques conditions
C’est un contrat. La transaction entre un employeur et un salarié est un contrat aux termes duquel il est mis fin entre les parties aux conflits relatifs à la rupture du contrat. Comme tout contrat, il est soumis à des conditions de validité. Bien qu’aucun formalisme ne soit prévu, il est fortement conseillé de rédiger le contrat par écrit, pour des raisons évidentes de preuve (le recours aux services d’un conseil professionnel peut ici s’avérer utile).
Attention au consentement. Le salarié, comme l’employeur, doivent être en capacité de transiger et de conclure un tel contrat (condition qui ne pose pas, en pratique, de difficultés, encore qu’il faille faire attention, par exemple, en présence d’un majeur protégé) : l’employeur pouvant être représenté, veillez à valider les délégations de pouvoirs en ce sens. Par ailleurs, la transaction ne sera valable que si vous comme le salarié y consentez de manière claire : laissez à votre salarié un délai de réflexion suffisant pour vous assurer qu’il donne son consentement en toute connaissance de cause.
Conclure une transaction suppose des concessions réciproques
Un objet... La transaction doit avoir un objet certain (et qui n’est pas illicite) : il s’agit de mettre fin aux conflits qui résultent de la rupture du contrat de travail (qu’il s’agisse de la nature de cette rupture ou des conséquences financières) ou liés à l’exécution du contrat de travail. Tout en rappelant les circonstances qui ont concouru à l’établissement de cette transaction, il s’agira de détailler le conflit entre vous et le salarié : précisez les motifs de contestations du salarié, précisez vos contre-arguments, etc.
...précis. En principe, une transaction conclue pour régler les conséquences de la rupture du contrat n’empêche pas une action liée à l’exécution du contrat de travail elle-même, sauf si elle le prévoit expressément. D’où l’importance d’être précis.
Attention à la formulation ! Une transaction conclue en des termes trop généraux peut aussi entraîner quelques difficultés. Mais les juges admettent qu’une transaction, qui prévoit qu’elle met fin à tout litige relatif à l’exécution et à la rupture du contrat de travail, empêche l’employeur et le salarié d’entamer des poursuites à propos de toutes les conséquences de la rupture du contrat de travail. Dans plusieurs exemples récents, le juge a reconnu qu’une transaction rédigée en termes généraux puisse faire obstacle à toute action du salarié. Ces transactions mentionnaient :
- ou que le salarié déclarait « être rempli de tous ses droits et ne plus avoir aucun chef de grief quelconque à l’encontre de la société du fait de l’exécution ou de la rupture du contrat de travail », ce qui a empêché au salarié de réclamer à son employeur une indemnisation de son préjudice d'anxiété dû à son exposition à l'amiante ;
- ou que le salarié reconnaissait « être rempli de tous ses droits en matière de salaires et accessoires de salaires, primes, bonus et remboursement de frais », ce qui a empêché au salarié d’agir contre son employeur pour obtenir une indemnisation lié à la retraite complémentaire à laquelle il ne pouvait d’ailleurs pas prétendre.
Sort de la clause de non-concurrence. La transaction par laquelle ces parties déclarent être remplies de tous leurs droits, mettre fin à tout différend né ou à naître et renoncer à toute action relatifs à l'exécution ou à la rupture du contrat de travail comprend, dans son objet, les obligations résultant d’une clause de non-concurrence.
Notre conseil. Evitez tout de même les formulations trop générales, sujettes à contentieux, et soyez précis quant à l’objet de la transaction et les litiges qu’elle entend régler. Une clause trop vague ne vous protègera pas toujours nécessairement d’une action en justice de votre ex-salarié sur un différend qui n’est pas expressément visé par la transaction vous liant à lui. Dans ce domaine, il est impératif de s’entourer d’un conseil pour vous assister dans la rédaction de la transaction.
La transaction peut prévoir des exclusions ! Il est possible de prévoir, dans la transaction, que celle-ci ne concernera pas certains domaines expressément listés. Dans pareil cas, la rédaction générale de la transaction interdira au salarié toute action ultérieure, à l’exception des cas qu’elle aura expressément exclus de son champ d’application.
Concessions réciproques. Si la transaction suppose un désaccord, elle suppose aussi des concessions réciproques, réelles et équilibrées. Des concessions dérisoires rendraient la transaction nulle, comme cela a par exemple été jugé à propos d’une transaction conclue avec un salarié ayant 10 ans d’ancienneté et à qui l’entreprise a proposé un montant inférieur à deux mois de salaire : ce montant a été qualifié de dérisoire car il ne constituait pas une véritable concession de la part de l'employeur.
Concrètement. En pratique, du côté salarié, il s’agira de renoncer à poursuivre l’employeur en justice en se prévalant d’une irrégularité ou d’une absence de cause réelle et sérieuse à un licenciement par exemple. En contrepartie, l’employeur lui versera une indemnité transactionnelle, pourra le dispenser d’exécuter son préavis tout en le rémunérant, renoncera à se prévaloir d’une faute grave, etc.
Attention. Il peut arriver qu’une transaction soit conclue avec un salarié dans le cadre d’une rupture conventionnelle. Mais, pour qu’elle soit valable, cette transaction doit impérativement respecter les conditions suivantes :
- elle ne doit pas porter sur un litige lié à la rupture du contrat : conclure une transaction sur point reviendrait à admettre que la rupture conventionnelle ne résulte pas d’un commun accord entre vous et le salarié (la transaction ne peut donc porter que sur un différend lié à l’exécution du contrat, et sur des points qui ne seront pas repris dans la convention de rupture) ;
- elle ne peut intervenir qu’après l’homologation de la rupture conventionnelle par l’autorité administrative (ou la notification de son autorisation par l’inspecteur du travail, pour les salariés protégés).
Le saviez-vous ?
L’indemnité transactionnelle que vous pouvez être amené à verser dans le cadre de la transaction doit être mentionnée sur l’attestation Pôle Emploi, ce qui aura pour conséquence de différer le versement des allocations.
Informez votre salarié de cette obligation.
A toute fin utile… La transaction permet de neutraliser une contestation du salarié, à condition d’en respecter les termes. Par conséquent, si l’inexécution partielle d’une transaction constitue un manquement suffisamment grave aux obligations qui en résulte, elle pourra être annulée par le juge. Le salarié pourra alors contester la rupture de son contrat de travail, que l’employeur pensait avoir sécurisée.
Appréciation des concessions réciproques. Pour vérifier la validité de la transaction, le juge doit effectivement s’assurer de l’existence de concessions réciproques, qui s’apprécient en fonction des prétentions des parties au moment de la signature de la transaction. Toutefois, il n’a pas à d’examiner les preuves de l’existence du litige que la transaction est supposée clore.
Conclure une transaction : pas à n’importe quel moment !
Après la rupture ! Parce que la transaction suppose le règlement d’un litige né ou à naître, la transaction ne peut, en pratique, intervenir qu’après la rupture du contrat, qu’il s’agisse d’une démission, d’une mise à la retraite, d’un licenciement, etc. Toute transaction envisagée avant la rupture serait nulle. Il en serait de même d’une transaction qui aurait pour objet de déterminer les conditions et modalités de la rupture du contrat (il semblerait alors évident que cette transaction a été conclue avant la rupture définitive du contrat de travail).
Exemple. Les juges ont ainsi précisé qu’une transaction conclue en l'absence de notification préalable du licenciement par lettre recommandée avec demande d'avis de réception doit être déclarée nulle. La notification du licenciement par lettre remise en main propre contre signature ne vaut pas notification par lettre recommandée avec AR : la transaction conclue après la notification d’un licenciement par lettre remise en main propre contre signature est nulle.
En pratique. Dans le cadre d’un licenciement, attendez d’avoir reçu l’accusé réception de la lettre de notification du licenciement au salarié. Dans le cadre d’une rupture conventionnelle, attendez l’homologation par la Direction régionale de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités (Dreets). Si la transaction fait suite à une démission, assurez-vous de ne la conclure qu’après la remise de la lettre de démission.
Le cas échéant… Les juges ont admis que l’existence d’une proposition de transaction antérieure à la rupture effective et définitive du contrat (avant la notification du licenciement par exemple) n’entraînait pas nécessairement la nullité de la transaction. Mais attention, les juges ont aussi considéré que la transaction était nulle si :
- vous détaillez avant cette rupture les aspects financiers du projet de transaction ;
- cette transaction est discutée avant cette rupture et n’est pas modifiée par la suite : la prudence reste donc de mise.
Pensez à respecter le formalisme de la notification du licenciement ! La transaction conclue alors que le licenciement n’a pas été régulièrement notifié par lettre recommandée avec avis de réception est nulle, peu importe que le salarié signe et paraphe un protocole transactionnel mentionnant les dates d’envoi et de réception de la lettre de notification du licenciement.
Mention sur l’attestation Pôle Emploi. La mention de l’existence d’une transaction en cours et de l’indemnité transactionnelle y afférant sur l’attestation Pôle Emploi, remplie par l’employeur le jour de la réception, par la salariée, de sa lettre de licenciement, ne prouve pas que la transaction a été conclue avant la rupture du contrat. C’est du moins ce qu’a décidé le juge reconnaissant la validité de la transaction signée 2 jours après réception par la salariée de sa lettre de licenciement alors que l’attestation Pôle emploi, datée du jour de la réception, mentionnait une transaction en cours.
Conseil. Voilà des exemples qui doivent vous conduire à la prudence : ne dévoilez pas avant la rupture du contrat un quelconque projet de transaction, au risque d’encourir la nullité de cette transaction.
Le saviez-vous ?
Dès lors que la transaction a été valablement signée, aucune rétractation n’est possible.
Transiger avec un salarié protégé. Aucune transaction ne peut être conclue avant la notification du licenciement, lequel doit, s’agissant d’un salarié protégé, être préalablement autorisé par l’inspecteur du travail. Faute de respecter cette procédure, la transaction pourrait être annulée et le salarié prétendre aux indemnités liées au licenciement nul, prononcé en violation de son statut protecteur.
Transaction en cours d’instance. Une transaction conclue en cours d’instance prud’homale produit les mêmes effets qu’un jugement. Mais rien n’empêche le salarié d’engager une nouvelle procédure portant sur des prétentions dont le fondement est né ou s’est révélé postérieurement à la transaction.
Conclure une transaction : et après ?
Pour quoi ? La renonciation, incluse dans une transaction, à tous droits, recours ou actions ne s’entend que de ce qui est relatif au différend qui est l’objet même de la transaction. Concrètement, la transaction règlera le litige qu’elle prévoit, ce qui suppose de veiller à sa bonne rédaction, comme nous l’avons signalé précédemment. En tout état de cause, cette transaction a, entre les parties, « autorité de chose jugée » (il est d’ailleurs utile de le rappeler dans le texte même de la transaction) : cela signifie qu’elle éteint toutes les contestations qui en font l’objet. Si le salarié renonce à toute action en justice, il ne pourra pas saisir le conseil des prud’hommes pour contester par la suite la rupture du contrat de travail.
Sachez tout de même… Le salarié pourra saisir le Conseil des Prud’hommes pour faire annuler la transaction si les conditions de sa conclusion ne sont pas respectées.
Pour qui ? La transaction a ce que l’on appelle un effet relatif entre les parties : un tiers à la transaction ne peut pas s’en prévaloir. Elle n’a donc d’effet qu’entre vous (employeur) et le salarié signataire de cette transaction.
Le saviez-vous ?
Une entreprise a licencié un salarié pour absence injustifiée : il n’a pas repris le travail à l’issue de son arrêt maladie, qui a duré plusieurs mois. Ils concluent une transaction que le salarié va contester car il estime que son contrat devait être suspendu jusqu’à une visite médicale de reprise à laquelle il n’a jamais été convié. Mais le juge valide la transaction : les faits étaient bien constitutifs d’une faute grave et la transaction qui a suivi le licenciement prévoyait le versement d’une indemnité correspondant à l’indemnité de licenciement assortie de l’indemnité de préavis.
A retenir
Respectez impérativement la chronologie : une transaction ne peut pas être conclue avant la rupture du contrat de travail. Prévoyez des concessions réciproques équilibrées entre vous et le salarié.
- Articles 2044 à 2058 du Code civil
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 13 octobre 2011, n° 09-71829 (appréciation des concessions réciproques)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 28 novembre 2000, n° 98-43635 (caractère dérisoire du montant de la transaction)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 15 mai 2008, n° 07-40576 (caractère dérisoire du montant de la transaction)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 16 décembre 2009, n° 08-43992 (absence de caractère dérisoire du montant de la transaction
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 24 avril 2013, n° 11-15204 (conséquence d’un défaut de précision dans la transaction)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 26 mars 2014, n° 12-21136 (rupture conventionnelle et validité d’une transaction)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 12 juin 2014, n° 13-15082 (appréciation de la validité des concessions de l’employeur)
- Réponse ministérielle Dubois, Assemblée nationale, du 2 septembre 2014, n° 55914 (transaction et rupture conventionnelle)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 23 septembre 2014, n° 13-16600 (transaction conclue avant la notification d’un licenciement)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 5 novembre 2014, n° 13-18984 (effet de la transaction)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 13 mai 2015, n° 14-10116 (proposition transaction antérieure au licenciement)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 8 juin 2016, n° 15-12862 (validité de la transaction conclue après un licenciement fondé et comprenant une indemnité non dérisoire)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 11 janvier 2017, n° 15-20040 (transaction en termes généraux)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 12 mai 2017, n° 16-13195 (mention de l’existence d’une transaction sur l’attestation Pôle Emploi)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 22 juin 2017, n° 16-13447 (transaction en termes généraux)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 6 octobre 2017, n° 16-23905 et 16-23936 (transaction en termes généraux)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 18 octobre 2017, n° 16-16676 (validité de la transaction discutée avant notification du licenciement)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 31 janvier 2018, n° 16-20508 (exemple de transaction valable)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 12 septembre 2018, n° 16-22503 (transaction inexécutée et conséquences de son annulation)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 10 octobre 2018, n° 17-10066 (nullité de la transaction conclue après notification du licenciement par lettre remise en main propre)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 9 janvier 2019, n° 17-22788 (transaction et rétractation)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 20 février 2019, n° 17-19676 (transaction générale mais exclusion expresse de certaines mesures)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 20 février 2019, n° 17-21626 (transaction en cours d’instance prud’homale)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 2 octobre 2019, n° 18-17429 (transaction conclue avant la rupture du contrat de travail)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 12 février 2020, n° 18-19149 (transaction et notification du licenciement par lettre remise en main propre)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 30 septembre 2020, n° 19-12635 (transaction conclue sans notification par LRAR du licenciement)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 12 novembre 2020, n° 19-12488 (transaction générale)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 6 janvier 2021, n° 18-26109 (appréciation concessions réciproques)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 17 février 2021, n° 19-20635 (sort de la clause de non-concurrence)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 3 mars 2021, n° 19-20265 (transaction et salarié protégé)
Conseil de Prud'hommes : à quoi devez-vous vous attendre ?
Un « Prud’hommes », ça s’anticipe…
Quelques statistiques. D’une manière générale, les conseils de prud’hommes sont principalement saisis par les salariés. Une étude datant de 2009 précise que 98 % des recours sont engagés par les salariés (environ 65 % des décisions rendues leur étant favorables). Pour information, en 2009, les 210 conseils des prud’hommes ont rendu quelques 228 901 jugements…
Un paradoxe… Le conseil de prud’hommes constitue une véritable Epée de Damoclès pour les employeurs, spécialement lorsqu’un litige aboutissant à une rupture de la relation de travail intervient entre le salarié et l’entreprise. D’où l’importance de sécuriser vos dossiers, spécialement en cas de licenciement, de démission, de rupture conventionnelle…
La mission du conseil de prud’hommes. Le conseil de prud’hommes a vocation à connaître des litiges qui opposent un salarié à son employeur, quelle que soit la nature du contrat de travail qui les lie entre eux, et que la source du litige porte sur l’existence ou la validité de ce contrat, la rémunération, la durée du travail, la rupture du contrat, etc. De manière générale, le conseil de prud’hommes sera compétent lorsque les critères suivants sont réunis : le litige est d’ordre individuel, ne relève pas expressément d’une autre juridiction et a pour cause le contrat de travail (ce qui nous donne ici l’occasion de préciser que le conseil de prud’hommes a vocation à ne connaître que des litiges concernant les salariés des entreprises privées, ou les personnels de services publics employés dans les conditions du privé).
Le saviez-vous ?
Le conseil de prud’hommes connaît également des litiges entre salariés à l’occasion du travail.
Préparez-vous ! Toute séparation, source potentielle de litige, doit être scrupuleusement documentée, étayée et justifiée. Ayez toujours comme réflexe qu’un salarié pourra toujours saisir le conseil de prud’hommes ; il faut donc agir en conséquence et se ménager tous les éléments de preuve, tout en respectant scrupuleusement la procédure propre au régime ou dispositif qui a gouverné votre décision de vous séparer de votre salarié.
Mais la fin ne justifie pas « tous » les moyens ! Vous ne pouvez pas utiliser des preuves déloyales, telles que, par exemple, le profil Facebook du salarié s’il est en accès restreint, même si ledit profil est consultable sur le téléphone professionnel d’un autre salarié. Le juge retiendrait une atteinte disproportionnée et déloyale à la vie privée du salarié et vous pourriez être condamné à des dommages-intérêts pour atteinte à sa vie privée.
Le saviez-vous ?
Une organisation syndicale (ou patronale) peut se joindre à un procès entre un employeur et un salarié afin de demander à l’employeur une indemnisation si elle constate une « atteinte à l’intérêt collectif de la profession ».
Est donc recevable l’action d’un syndicat (ou d’une union de syndicats, si ses statuts ne l’en empêchent pas) qui souhaite être indemnisé du fait d’une clause illicite dans le règlement intérieur de l’entreprise, quand bien même l’action initiale ne concernait qu’un salarié et l’employeur : le règlement intérieur concerne, en effet, tous les salariés qui y sont soumis.
Vous recevez une convocation : que faire ?
Vous recevez une convocation. Si un ancien salarié saisit le Conseil des Prud’hommes (obligatoirement par voie de requête depuis le 1er janvier 2020), vous serez convoqué par le tribunal par lettre recommandée avec accusé réception. Vous êtes alors convoqué à comparaître devant l’une des 5 sections du conseil (industrie, commerce, agriculture, encadrement, activités diverses).
Appelez votre conseil. Bien que l’assistance d’un avocat ne soit pas obligatoire devant le conseil de prud’hommes, il est conseillé d’assurer sa défense en recourant aux services d’un professionnel rompu à la complexité croissante des textes et des litiges prud’homaux. Outre l’apport de son expérience, la présence d’un avocat aura également le mérite de dépassionner le débat avec votre salarié, qui sera, bien souvent, lui aussi accompagné.
A noter. L’employeur (comme le salarié) peut se faire assister ou représenter gratuitement par un défenseur syndical.
Ne vous dérobez pas ! En tous les cas, ne vous dérobez pas suite à cette convocation, comme cela peut arriver parfois. Il n’y a pas mieux pour indisposer un conseiller prud’homal que d’ignorer une convocation.
Le saviez-vous ?
Les conseils de prud’hommes sont composés d’élus choisis, pour 4 ans, en nombre égal, parmi les salariés et les employeurs. Les conseillers de chaque section du conseil de prud’hommes (ou, le cas échéant, chaque chambre) sont amenés à siéger en bureau de conciliation et d'orientation ou en bureau de jugement. Le conseil de prud’hommes comprend également une formation en référé (procédure qui permet d’obtenir une décision rapide en fonction des circonstances particulières de l’affaire).
A vérifier impérativement. Saisir le conseil des prud’hommes suppose d’agir avant l’écoulement d’un certain délai, appelé « délai de prescription ». D’une manière générale, les délais de prescriptions, décomptés à partir du jour où celui qui exerce l’action en justice a connu (ou aurait dû connaître) les faits qui lui permette de justifier cette action, sont les suivants :
- 2 ans pour les demandes portant sur l’exécution ou la rupture du contrat de travail travail (si la rupture du contrat est intervenue avant le 24 septembre 2017) ;
- 3 ans pour les actions en paiement du salaire ;
- 2 ans pour les actions en paiement de frais professionnels ;
- 5 ans pour les actions fondées sur une discrimination ou sur des faits de harcèlement sexuel ou moral ;
- 10 ans pour les actions liées à la réparation d’un dommage corporel causé à l’occasion de l’exécution du travail ;
- 12 mois en cas de contestation portant sur la rupture du contrat de travail ou son motif dans le cadre du dispositif propre au contrat de sécurisation professionnelle (à compter de l'adhésion au contrat de sécurisation professionnelle) ou sur toute rupture de contrat intervenue depuis le 24 septembre 2017 (en cas de prise d’acte de la rupture du contrat, à compter de la date de la prise d’acte par le salarié) ;
- 6 mois en cas de dénonciation par le salarié du reçu pour son solde de tout compte (à compter de sa signature) ;
- 12 mois en cas de contestation de la régularité ou la validité de la procédure de licenciement pour motif économique (à compter de la dernière réunion du comité d'entreprise ou, dans le cadre de l'exercice par le salarié de son droit individuel à contester la régularité ou la validité du licenciement, à compter de la notification de celui-ci) ;
- 12 mois en cas de contestation d’une rupture conventionnelle (à compter de la date d'homologation de la convention) ou en cas de contestation liée au paiement de l’indemnité de rupture conventionnelle.
Des délais aménagés. Ce délai de prescription peut être aménagé par un contrat de travail. Mais il ne doit toutefois pas être inférieur à 1 an, ni être supérieur à 10 ans.
Une conciliation… avant le jugement
Au préalable, sauf cas particulier, l’affaire est portée devant le bureau de conciliation et d'orientation : il s’agit d’un préalable obligatoire qui aura pour objectif de vous entendre, vous et le salarié, éventuellement assistés de vos conseils respectifs (ce qui est somme toute souhaitable), en audience privée (les débats ne sont, ici, pas publics) pour tenter de trouver une solution amiable au litige vous opposant. Cette étape n’est pas à négliger : un bon accord vaut parfois mieux qu’un mauvais procès…
Le saviez-vous ?
2 procédures sont mises en place afin de favoriser le règlement amiable des litiges avant de saisir le juge :
- la médiation conventionnelle qui a pour objet de favoriser la conclusion d’un accord amiable en vue de la résolution d’un différend né à l’occasion de l’exécution du contrat de travail ;
- la procédure participative qui permet la mise en place d’une convention aux termes de laquelle l’employeur et le salarié s'engagent, sur une durée déterminée, à chercher une solution amiable au litige portant sur le contrat de travail, avant toute saisine du juge.
Exception. L’affaire est directement renvoyée devant le bureau de jugement dans certains cas limitativement définis : demande de régularisation d’un contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée et lorsqu’une procédure collective touche l’employeur.
Attention. Sous réserve de justifier d’un motif légitime (maladie par exemple), vous pouvez vous faire représenter par un avocat, d’une manière générale, mais aussi par un défenseur syndical, par un employeur de la même branche d’activité, par un délégué d’une organisation d’employeurs, par un membre de l'entreprise ou de l'établissement fondé de pouvoir ou habilité à cet effet, ou encore par votre conjoint, concubin ou partenaire de Pacs. Si vous vous faites représenter, préparez un pouvoir en ce sens.
Le saviez-vous ?
Afin de faciliter le règlement des litiges suite à la contestation d’un licenciement (pour motif personnel ou économique), il sera possible, dès la phase de conciliation, de mettre en place un accord prévoyant, en contrepartie de l’abandon par le salarié de ses réclamations, le versement d’une indemnité forfaitaire de conciliation. Le procès-verbal constatant cet accord vaudra renonciation du salarié à toutes réclamations et indemnités relatives à la rupture du contrat de travail, et notamment à toute demande d’indemnité pour licenciement irrégulier ou abusif.
Pour information, sachez que l’indemnité due au salarié pour un licenciement pourvu d’une cause réelle et sérieuse, mais pour lequel la procédure n’a pas été respectée est égale à 1 mois de salaire. Quant au licenciement sans cause réelle et sérieuse, il est sanctionné par une indemnité dépend de l’ancienneté du salarié et de l’effectif de l’entreprise, sans préjudice, le cas échéant, de l'indemnité de licenciement (à défaut de réintégration du salarié dans l’entreprise).
Indemnité forfaitaire de conciliation : quel montant ? Le montant de cette indemnité est fixé, selon un barème établi en fonction de l’ancienneté du salarié chez l'employeur. Cette indemnité forfaitaire viendra s’ajouter aux indemnités légales, conventionnelles ou contractuelles dues au salarié, ainsi qu’aux indemnités de congés payés, de préavis, de clause de non-concurrence, etc. Ce barème est le suivant :
- 2 mois de salaire pour une ancienneté inférieure à 1 an ;
- 3 mois de salaire pour une ancienneté d’un an ;
- 4 mois de salaire pour une ancienneté de 2 ans ;
- 5 mois de salaire pour une ancienneté de 3 ans ;
- 6 mois de salaire pour une ancienneté de 4 ans ;
- 7 mois de salaire pour une ancienneté de 5 ans ;
- 8 mois de salaire pour une ancienneté de 6 ans ;
- 9 mois de salaire pour une ancienneté de 7 ans ;
- 10 mois de salaire pour une ancienneté comprise entre 8 ans et 12 ans ;
- 12 mois de salaire pour une ancienneté comprise entre 12 ans et 15 ans ;
- 14 mois de salaire pour une ancienneté comprise entre 15 ans et 19 ans ;
- 16 mois de salaire pour une ancienneté comprise entre 19 ans et 23 ans ;
- 18 mois de salaire pour une ancienneté comprise entre 23 ans et 26 ans ;
- 20 mois de salaire pour une ancienneté comprise entre 26 ans et 30 ans ;
- 24 mois de salaire pour une ancienneté supérieure à 30 ans.
Par la suite… Si la tentative de conciliation n’aboutit pas, l’affaire est renvoyée devant le bureau de jugement et une convocation à une audience de jugement vous est remise. Cette audience est publique cette fois (vous pouvez vous faire assister ou représenter à l’audience – pensez au pouvoir) et, après avoir entendu les parties, rend son jugement, immédiatement ou après un délai de délibéré. Bien entendu, si la décision rendue ne vous satisfait pas, vous pouvez faire appel en saisissant la Cour d’Appel (si le litige porte sur une somme supérieure à 4 000 €) dans le mois de la réception du jugement, ou directement la Cour de Cassation (dans le cas inverse), le délai de recours étant alors porté à 2 mois. Pour votre information, environ 60 % des jugements font l’objet d’un appel.
Une médiation ? A n’importe quelle étape de la procédure, devant le bureau de conciliation ou le bureau de jugement, les conseillers prud’homaux peuvent vous proposer, ou vous enjoindre, à vous et à votre salarié, de rencontrer un médiateur pour tenter de vous mettre d’accord sur l’issue de votre différend.
A noter. Pour les litiges portant sur un licenciement ou une demande de résiliation judiciaire du contrat de travail, l’affaire est renvoyée devant un bureau de jugement en formation restreinte (composé d’un conseiller employeur et d’un conseiller salarié) qui sera chargé de statuer dans un délai de 3 mois (cela suppose toutefois que l’employeur et le salarié soient d’accord).
Le saviez-vous ?
Si, sauf motif légitime, l’employeur ou le salarié ne comparaît pas ou ne se fait pas représenter, le bureau de conciliation et d’orientation peut juger l’affaire : il intervient alors en tant que bureau de jugement.
Une urgence ? Lorsque les circonstances l’exigent, et dans certaines conditions, le référé prud’homal permet d’obtenir une décision d’urgence. Cette procédure, qui ne comporte pas de phase de conciliation, permet d’obtenir une décision immédiatement exécutoire à titre provisoire.
Le saviez-vous ?
En cas de licenciement économique, le conseil de prud’hommes statue en urgence : la tentative de conciliation doit avoir lieu dans le mois qui suit la saisine du conseil et, le cas échéant, la date d’audience du bureau de jugement doit intervenir dans un délai maximum de 6 mois.
Une procédure dématérialisée…
L’objectif. Une plateforme web, https://www.justice.fr/, a été créée pour dématérialiser les procédures civiles et ainsi faciliter l’accès à la justice. Elle permet :
- d’obtenir des informations sur les différentes démarches ;
- de trouver la juridiction compétente pour le litige concerné ;
- de faciliter les échanges de documents entre les avocats et les juridictions ;
- de consulter l’état d’avancement d’une procédure ;
- etc.
Et pour le conseil des Prud’hommes ? Parmi les procédures accessibles par le biais de cette plateforme, il est possible d’effectuer les démarches auprès des conseils de Prud'hommes.
Quid des données personnelles ? Pour les besoins du fonctionnement de la plateforme, elle effectue une collecte de données à caractère personnel dans le cadre de :
- l’enregistrement d'informations concernant les procédures judiciaires au sein des conseils de Prud'hommes, pour faciliter la gestion et le suivi des dossiers de procédure ;
- l’enregistrement des actes déposés auprès des conseils de Prud’hommes ;
- la réalisation de statistiques.
Quelles données ? Les données collectées concernent :
- les parties au procès (employeur(s) et salarié(s)) : identification, coordonnées, profession, nature du litige, etc. ;
- leurs représentants (avocats par exemple) : identification, coordonnées, numéro d'immatriculation à la Caisse nationale des barreaux français (CNBF), etc. ;
- les tiers et les autres acteurs de la procédure : identification, profession et spécialités, etc.
Qui peut les consulter ? Ces données peuvent être consultées par différentes personnes pour le bon déroulement de la procédure (magistrats, auditeurs de justice, greffiers, etc.) et une partie d’entre elles peuvent également être transmises aux parties au procès et à leurs avocats.
Durée de conservation. Par principe, les données collectées peuvent être conservées pendant 1 an à compter de la clôture du dossier de procédure et du dépôt de l’acte. A l’issue de cette période, seuls les directeurs de greffe peuvent en conserver un accès, pendant :
- 4 ans pour certaines données relatives aux procédures judiciaires ;
- 29 ans pour les données contenues dans le répertoire général des affaires ;
- 9 ans pour les données contenues dans le registre de dépôt des actes.
A retenir
Dans la majorité des cas, si vous êtes convoqué devant le conseil de prud’hommes, une conciliation sera, au préalable, tentée et ce n’est que si elle n’aboutit pas que le bureau de jugement sera saisi du litige.
Ne sous-estimez pas cette tentative de conciliation : il ne faut pas perdre de vue qu’un procès peut être long et coûteux (tout en ayant à l’esprit qu’il en sera de même pour l’ex-salarié qui vous attaque…).
J'ai entendu dire
Vous dites que le conseil de prud’hommes est compétent, dès lors que le litige ne relève pas expressément d’une autre juridiction. Avez-vous des exemples ?Oui. Par exemple, les litiges relatifs aux élections professionnelles relèvent du Tribunal d’Instance, comme les litiges relatifs aux saisies sur salaires. Autre exemple : les litiges portant sur les modalités de calcul de la participation des salariés peuvent relever des juridictions administratives ou des tribunaux judiciaires.
Au sujet de l’indemnité forfaitaire de conciliation, pouvez-vous nous préciser si elle est soumise aux cotisations sociales ou si elle bénéficie d’une exonération particulière ?
Cette indemnité bénéficie d’une exonération de cotisations sociales et de prélèvements sociaux, dans la limite d'un montant fixé à 2 fois la valeur annuelle du plafond de la sécurité sociale. Sachez, toutefois, le cas échéant, que le total des indemnités d'un montant supérieur à 10 fois ce plafond annuel sont intégralement soumises aux cotisations sociales.
- Articles L 1411-1 et suivants du Code du travail
- Articles L 1422-1 et suivants du Code du travail
- Articles L 1454-1 et suivants, L 1456-1 et L 1457-1 du Code du travail
- Articles L 1235-1 et suivants du Code du travail (indemnité forfaitaire de conciliation et sanctions des irrégularités du licenciement)
- Articles L 1471-1 et L 3245-1 du Code du travail (délais de prescription)
- Article L 242-1 du Code de la Sécurité sociale (exonération sociale de l’indemnité forfaitaire de conciliation)
- Loi n° 2013-504 du 14 juin 2013, relative à la sécurisation de l’emploi, article 21
- Ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 relative à la prévisibilité et la sécurisation des relations de travail, article 2
- Décret n° 2013-721 du 2 août 2013 portant fixation du montant du barème de l'indemnité forfaitaire prévue à l'article L 1235-1 du code du travail
- Loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques (articles 258 et 259)
- Décret n° 2016-660 du 20 mai 2016 relatif à la justice prud’homale et au traitement judiciaire du contentieux du travail, articles 31 et suivants
- Décret n° 2016-1582 du 23 novembre 2016 modifiant le barème de l’indemnité forfaitaire de conciliation fixé à l’article D 1235-21 du Code du travail
- Décret n° 2017-1698 du 15 décembre 2017 portant diverses mesures relatives à la procédure suivie devant le conseil des prud’hommes
- Décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019 réformant la procédure civile
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 22 novembre 2017, n° 16-16561 (aménagement de la prescription)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 20 décembre 2017, n° 16-19609 (consultation profil Facebook restreint et atteinte à la vie privée)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 20 juin 2018, n° 16-20799 (action d’un syndicat pour atteinte à l’intérêt collectif de la profession)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 20 novembre 2019, n° 18-20208 (frais professionnels)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 20 novembre 2019, n° 18-10499 (paiement de l’indemnité de rupture conventionnelle)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 27 novembre 2019, n° 17-31258 (prise d’acte de la rupture du contrat par le salarié)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 13 janvier 2021, n° 19-15120 (intérêt à agir d’une union de syndicats)
- Arrêté du 25 juin 2021 autorisant la mise en œuvre d'un traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé « Portalis contentieux prud'homal »
- Avis de la Cour de cassation, du 14 juin 2022, n° 22-70004
Difficultés économiques et licenciement : quelles alternatives proposer à vos salariés ?
Accorder des formations et des congés
Des mesures simples. En cas de difficultés passagères, sachez qu’il existe des solutions simples qui peuvent ponctuellement aider à y faire face.
Rappel de vos obligations. En matière de formation continue, vous devez respecter plusieurs obligations, sous peine de sanctions. Vous devez notamment participer au financement de la formation professionnelle (en acquittant une taxe annuelle), assurer l’adaptation de vos salariés à l’évolution de leur poste, organiser des entretiens professionnels individuels tous les 2 ans (et au retour de certains congés spécifiques), etc.
Une occasion d’assurer vos obligations… Une baisse temporaire d’activité de l’entreprise peut parfois être le « bon moment » pour mobiliser du temps de formation pour le personnel. Il pourra s’agir de formations prises sur le Compte Personnel de Formation (CPF) ou sur le plan de formation (selon l’organisme paritaire collecteur agréé de l’entreprise).
… ou d’accorder du repos aux salariés. Une période de ralentissement de l’activité peut également permettre aux salariés de prendre des congés / RTT. Il ne sera pas toujours possible d’imposer la prise de ces jours de congés mais avant de prendre d’autres mesures plus lourdes, cela peut pallier une période d’inactivité.
Mettre vos salariés à disposition d’autres entreprises
Une possibilité. Lorsque votre activité connaît une baisse significative, vous pourrez envisager de mettre tout ou partie de votre personnel à la disposition d’une autre entreprise (partenaire, du même bassin d’emplois…). L’idée de ce dispositif reste donc de prêter temporairement du personnel à une autre entreprise qui doit faire face à une hausse d’activité ou à un besoin spécifique en recrutement, afin de préserver les emplois dans l’entreprise en difficultés.
Sous conditions… Cette mise à disposition appelée « prêt de main d’œuvre » est possible à condition qu’elle soit à but non lucratif. La société « prêteuse » ne doit tirer aucun profit de cette mise à disposition. A défaut, elle pourra faire l’objet de sanctions pénales sévères liées au travail illégal et notamment du délit de marchandage. Notez que seules les entreprises de travail temporaire peuvent recourir au prêt de main d’œuvre à but lucratif.
Concrètement. Si vous souhaitez mettre du personnel à disposition d’une autre entreprise, vous devrez tout d’abord obtenir l’accord des salariés concernés. Il est en effet interdit d’imposer ce mode de travail. Au niveau du formalisme, une convention sera conclue entre les deux sociétés et un avenant au contrat de travail du salarié fixera les modalités d’organisation de la mise à disposition (durée de la mise à disposition, désignation de la société utilisatrice, poste occupé et limites de la mission…).
Conséquence. L’employeur d’origine reste l’employeur du salarié (le lien de subordination reste inchangé) qui lui versera sa rémunération comme d’ordinaire. Cependant, il refacturera à l’entreprise utilisatrice le coût des salaires afférents à la période de mise à disposition (salaires, charges et taxes).
=> Pour en savoir plus, consultez notre fiche : Recourir au prêt de main-d’œuvre : les aspects pratiques
Modifier les contrats de travail pour motif économique
Pourquoi ? Pour préserver les emplois, il est également possible de proposer des modifications des contrats de travail en raison de la situation économique de l’entreprise : ces modifications pourront, par exemple, conduire à proposer une réduction du temps de travail (passage de 39h à 35h par semaine) voire même un passage à temps partiel, afin d’adapter le temps de travail à une activité qui ralentit et de réduire les dépenses.
Comment ? Ces propositions devront toutefois respecter des règles de procédure : elles devront être faites individuellement et par lettre recommandée avec avis de réception. A réception, le salarié disposera d’un délai d’un mois pour faire part de son refus. En l’absence de réponse, le salarié est réputé avoir accepté la modification. Les modifications acceptées seront alors formalisées par un avenant au contrat de travail.
Attention ! Lorsque le salarié refuse la modification proposée, l’employeur sera généralement contraint d’entamer une procédure de licenciement pour motif économique.
=> Pour en savoir plus, consultez notre fiche : Modifier un contrat de travail : comment faire ?Le saviez-vous ?
En principe, tout projet de licenciement pour motif économique suppose de déterminer le ou les salarié(s) menacé(s) par la mesure. Pour cela, l’employeur doit mettre en place des critères d’ordre (définis par la convention collective ou à défaut, par la loi). Toutefois, dans l’hypothèse où un licenciement est consécutif à un refus de modification du contrat pour motif économique, les juges admettent généralement que l’employeur n’ait pas à mettre en place ces critères d’ordre.
Une modification prévue par un accord de performance collective. Les entreprises peuvent conclure des accords destinés à répondre aux nécessités liées au fonctionnement de l'entreprise ou en vue de préserver, ou de développer l'emploi. Cet accord, négocié avec les organisations syndicales représentatives, peut prévoir :
- un aménagement de la durée du travail, ses modalités d'organisation et de répartition ;
- un aménagement de la rémunération, sans pouvoir la porter en deçà du Smic ou des minima conventionnels ;
- les conditions de la mobilité professionnelle ou géographique interne à l'entreprise.
Conséquence. Lorsque vous concluez un tel accord, vous devez le porter à la connaissance de vos salariés. Ils disposent ensuite d’un délai d’un mois pour refuser (par écrit) qu’il se substitue à leur contrat de travail. Dans ce cas, leur refus constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement (il s’agit d’un licenciement pour motif personnel). Vous devrez alors abonder le compte personnel de formation du salarié concerné d’un montant minimal de 3 000 €.
A retenir
Le licenciement pour motif économique doit constituer l’ultime mesure à mettre en œuvre lorsque l’entreprise connaît des difficultés financières ou relatives à son activité. Avant d’envisager de telles mesures, il sera indispensable d’avoir épuisé tous les moyens alternatifs exposés.
J'ai entendu dire
Question : J’ai été contraint de licencier un salarié pour motif économique. Désormais mon activité repart à la hausse. Puis-je réembaucher ?Réponse : Oui. Un licenciement pour motif économique ne vous empêche pas d’embaucher un nouveau salarié. La loi interdit tout de même d’embaucher un salarié en CDD pour accroissement temporaire d’activité dans les 6 mois qui suivent la notification du licenciement. Attention néanmoins : tout d’abord, si vous réembauchez du personnel sur le même poste que le salarié licencié, cela pourrait permettre à ce dernier de démontrer que son licenciement n’était pas réellement fondé et que des alternatives auraient pu être mises en œuvre. Ensuite, si votre ancien salarié vous a expressément fait part de son souhait de bénéficier de sa priorité de réembauche, vous serez tenu de lui proposer le poste, en priorité.
- Article L.1222–6 du Code du travail (modification du contrat de travail pour motif économique)
- Article L.6315-1 du Code du travail (entretien professionnel)
- Article L.6321-1 du Code du travail (obligations de l’employeur et plan de formation)
- Articles L.6321-6 à L.6321-12 du Code du travail (régimes applicables aux heures de formation)
- Article R.6323-3-2 du Code du travail (abondement du CPF du salarié licencié)
- Articles L.8241-1 et L.8241-2 du Code du travail (interdiction prêt de main-d’œuvre)
- Articles L.8224-1 à L.8224-6 du Code du travail (sanctions travail dissimulé)
- Décret n° 2017-1880 du 29 décembre 2017 relatif à l'abondement du compte personnel de formation des salariés licenciés suite au refus d'une modification du contrat de travail résultant de la négociation d'un accord d'entreprise
- Circulaire du 28 novembre 2012 relative aux sanctions administratives du travail illégal
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 7 décembre 2022, n° 21-10781 (priorité de réembauche et poste de clerc de notaire)
Proposer un contrat de sécurisation professionnelle : une obligation ?
Le contrat de sécurisation professionnelle, qu'est-ce que c'est ?
Un parcours de retour à l'emploi. Le contrat de sécurisation professionnelle (CSP) est un dispositif applicable jusqu’au 31 décembre 2023 qui permet d’organiser un parcours de retour à l'emploi, éventuellement par le biais d'une reconversion ou d'une création ou reprise d'entreprise. Il est proposé par l’employeur aux salariés visés par un licenciement économique.
Toutes les entreprises sont-elles concernées ? Les entreprises concernées par l’obligation de proposer à leurs salariés visés par un licenciement économique sont celles qui ont au moins 1 et moins de 1 000 salariés et celles qui sont placées en redressement ou liquidation judiciaire (quel que soit leur effectif). Les entreprises de 1 000 salariés ou plus ou les groupes réunissant au moins 1 000 salariés doivent, quant à eux, proposer un congé de reclassement.
Tous les salariés sont-ils concernés ? Pour bénéficier du CSP, le salarié doit être lié à vous par un contrat de travail à durée indéterminée (CDI). Donc, les personnes titulaires d’un mandat social, à l’exclusion de tout contrat de travail, ne peuvent pas en bénéficier.
Quelles sont les conditions ? Pour bénéficier du CSP, le salarié doit :
- être directement visé par une procédure de licenciement pour motif économique ;
- justifier d’une durée d’affiliation à l’assurance chômage de 88 jours travaillés ou 610 heures travaillées (4 mois) au cours des 24 derniers mois ou, pour les salariés âgés d’au moins 53 ans, des 36 derniers mois ;
- ne pas avoir atteint l’âge permettant de bénéficier d’une retraite à taux plein ;
- résider en France (métropole, DOM, et collectivités d’outre-mer de Saint-Pierre et Miquelon, Saint-Barthélemy et Saint-Martin), à l'exception de Mayotte pour laquelle des dispositions spécifiques sont prévues ;
- être physiquement apte à l’exercice d’un emploi.
Le saviez-vous ?
L’arrêt maladie, le congé de maternité ou encore l’invalidité de 2ème ou 3ème catégorie ne font pas obstacle à l’adhésion au CSP. Il faut donc penser à proposer le CSP aux salariés en arrêt de travail, dès lors que vous envisagez leur licenciement pour motif économique.
Informer le salarié
Comment procéder ? Vous devez informer individuellement et par écrit le salarié visé par un licenciement économique sur le contenu du CSP. Le dossier CSP est téléchargeable sur le site de Pôle Emploi, dans votre espace personnel dans la rubrique : « vos fins de contrat de travail ». Concrètement, le moment de la remise et ses modalités dépendront de la présence ou non de représentants du personnel dans l’entreprise.
En l’absence de représentants du personnel. Vous devez proposer le CSP au(x) salarié(s) concerné(s) au plus tard lors de l’entretien préalable au licenciement. A cette occasion, remettez-lui (leur), contre récépissé :
- le document d’information précisant le motif économique ;
- le bulletin d’acceptation du CSP ;
- la demande d’allocation de sécurisation professionnelle (qui sera versée par Pôle Emploi).
En présence de représentants du personnel. Le licenciement est soumis à l’avis des représentants du personnel et il n’y a alors pas à convoquer les salariés concernés à un entretien préalable au licenciement. Dans pareil cas, vous devez remettre l’information sur le CSP au(x) salarié(s) concerné(s), contre récépissé :
- à l’issue de la dernière réunion du comité d’entreprise ou des délégués du personnel ;
- le lendemain de la validation ou de l’homologation, par la Direccte, de votre plan de sauvegarde de l’emploi, le cas échéant.
À noter. La transmission, par e-mail, du compte rendu de la réunion avec les représentants du personnel les informant de la mise en œuvre d’une procédure de licenciement économique vaut information des salariés du motif économique des ruptures de contrat.
Cas du congé de maternité. Pour les salariées en congé maternité, les documents d’information peuvent être remis, au plus tard, le lendemain de la fin de la période de protection liée à ce congé.
Cas de l’arrêt de travail pour accident du travail ou maladie professionnelle. Pour les salariés dont le contrat de travail est suspendu à la suite d’un arrêt pour accident du travail ou maladie professionnelle, l’employeur ne peut prononcer le licenciement économique qu’en cas d’impossibilité de maintenir le contrat de travail du salarié concerné. C’est une mention supplémentaire à apporter, ou dans la notice relative au CSP, ou dans la lettre de licenciement, sous peine de nullité.
Des sanctions. Si vous licenciez pour motif économique un salarié sans lui avoir proposé le CSP, c’est, en principe, Pôle Emploi qui lui en fera la proposition. Dans ce cas, vous devrez verser à Pôle Emploi une contribution égale à 2 mois de salaire brut. Et si votre ancien salarié accepte le CSP, cette contribution est portée à 3 mois de salaire (incluant alors l’ensemble des charges patronales et salariales). Cette sanction financière est à acquitter au plus tard le 25 du mois M+2 suivant le début du contrat de sécurisation professionnelle. Tout retard sera sanctionné par des majorations.
Moment de la proposition. La cause économique de la rupture du contrat doit être mentionnée dans un écrit remis ou adressé au salarié « au cours » de la procédure de licenciement » et « au plus tard au moment de l'acceptation du contrat de sécurisation professionnelle » par le salarié, afin qu'il soit informé des raisons de la rupture lors de son acceptation. Une information donnée trop tôt (avant la procédure de licenciement), ou trop tard (après l’acceptation du CSP par le salarié), ne répond pas à ces critères, ce qui pourrait entraîner la privation de cause réelle et sérieuse du licenciement.
Le saviez-vous ?
Les modalités de mise en œuvre du CSP résultent de conventions du 26 janvier 2015 (pour la métropole, les DOM sauf Mayotte et les COM) et du 17 juillet 2018 (pour Mayotte) applicables jusqu'au 31 mars 2023 au plus tard.
Attention ! Lorsque le licenciement économique est finalement jugé sans cause réelle et sérieuse, le CSP est privé de cause. L'employeur doit donc rembourser les indemnités de chômage éventuellement versées au salarié, sous déduction de la contribution au CSP (égale à l’indemnité de préavis majorée des cotisations y afférant préavis, dans la limite de 3 mois).
Des mesures d’accompagnement pour la filière automobile ? En juin 2021, l’Etat, avec l’aide de deux constructeurs automobiles, a mis en place un fond d’accompagnement et de reconversion des salariés de la filière automobile ayant accepté un contrat de sécurisation professionnelles, afin d’accompagner ces salariés jusqu’en juin 2023.
Précisions (1). Les mesures d’accompagnement sont notamment les suivantes :
- création de cellules d'appui à la sécurisation professionnelle ;
- mise en place de formations qualifiantes et de formations de reconversion ;
- aides :
- à la création ou la reprise d'entreprise ;
- à la mobilité géographique ;
- à la garde d'enfants et aux familles ;
- versement d’une prime exceptionnelle de reclassement, en cas de retour durable à l'emploi.
Précisions (2). Ces mesures concernent les salariés licenciés pour motif économique ou ayant adhéré à un contrat de sécurisation professionnelle entre le 26 avril 2021 et le 30 juin 2023.
Respecter un délai de réflexion
21 jours calendaires. À compter du lendemain de votre proposition, le salarié dispose d’un délai de réflexion de 21 jours calendaires pour accepter le bénéfice du CSP. En cas d’expiration de ce délai un samedi, un dimanche, un jour férié ou chômé, le délai de réflexion est prorogé jusqu’au 1er jour ouvrable suivant.
Le jour même ? Il a récemment été jugé que rien n’interdisait aux salariés d’accepter un contrat de sécurisation professionnelle le jour même de sa proposition. L’employeur doit alors anticiper et informer assez tôt ses salariés de la cause économique de la rupture du contrat de travail, sous peine de voir cette rupture de contrats de travail requalifiée en licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Licencier avant l’expiration du délai de réflexion ? Il est possible de notifier au salarié son licenciement économique, par lettre recommandée avec AR, avant l’expiration du délai de réflexion de 21 jours. Néanmoins, dans ce cas, vous devez lui rappeler, dans le courrier, la date d’expiration du délai de réflexion et lui préciser que, s’il refuse le bénéfice du CSP, cette lettre recommandée constitue la notification de son licenciement.
Cas des salariés protégés. Le licenciement d’un salarié protégé implique que vous ayez obtenu l’autorisation de l’inspecteur du travail. Aussi, le délai de réflexion de ce salarié est prolongé jusqu’au lendemain de la date de notification de cette décision administrative.
Le saviez-vous ?
Le temps de ce délai de réflexion, le salarié peut bénéficier d’un entretien d’information avec un conseiller Pôle Emploi pour le guider dans son choix : le conseiller vérifiera notamment que le salarié remplit toutes les conditions pour bénéficier du CSP.
Acceptation du contrat de sécurisation professionnelle
Comment ? Si votre salarié accepte le CSP au cours des 21 jours de réflexion, il doit vous remettre (dans ce délai) le bulletin d'acceptation dûment signé, ainsi qu’une copie de sa pièce d’identité. Une fois le délai de 21 jours passé, il est trop tard.
Effet de l’acceptation. Lorsque le salarié a accepté le CSP dans le délai imparti, son contrat est rompu sans préavis « d’un commun accord » à l’expiration d'un délai de réflexion. En cas d'acceptation du salarié, le contrat de travail est réputé rompu du commun accord des parties, à la date d'expiration du délai de réflexion de 21 jours. Il dispose alors du statut de stagiaire de la formation professionnelle et ce, pendant toute la durée du CSP. Par ailleurs, le salarié peut, dès la rupture de son contrat de travail, mobiliser son compte personnel de formation (CPF).
Pas de rétractation possible. L’employeur ne peut renoncer à la rupture du contrat de travail si le salarié a accepté le CSP dans le délai imparti, sauf commun accord des parties.
Le saviez-vous ?
Le salarié qui adhère au CSP dispose d’un délai de 12 mois pour contester la rupture de son contrat de travail. Ce délai court à compter de son adhésion au CSP et non à compter de l’expiration du délai de 21 jours.
Renonciation aux propositions de reclassement. L’adhésion au CSP emporte non seulement la rupture du contrat de travail, mais également la renonciation aux propositions de reclassement que l’employeur a pu formuler.
Des indemnités. Si le salarié accepte le bénéfice du CSP, vous devrez lui verser des indemnités de licenciement pour motif économique et de congés payés. Néanmoins, c’est à Pôle Emploi que vous devrez verser le montant correspondant à l’indemnité de préavis, dans la limite de 3 mois, majoré de l’ensemble des cotisations sociales s’y rapportant. Dans le cas où le salarié aurait dû percevoir une indemnité de préavis supérieure à 3 mois, vous paierez l’excédent directement au salarié.
Le saviez-vous ?
Si le licenciement est jugé sans cause réelle et sérieuse, vous devrez payer des indemnités de préavis au salarié sans pouvoir déduire les sommes que vous aurez versées à Pôle Emploi.
En revanche, vous pourrez être condamné à rembourser Pôle Emploi des indemnités de chômage, dans la limite de 6 mois, déduction faite des sommes que vous lui aurez déjà versées.
Si le salarié a moins d’un an d’ancienneté. L’indemnité de préavis est versée dès la rupture du contrat de travail au salarié qui a moins d’un an d’ancienneté et qui accepte le CSP. C’est donc uniquement Pôle Emploi qui prend en charge seul le dispositif de sécurisation professionnelle.
Prévenir Pôle Emploi ! Dès que le salarié vous remet son bulletin d’acceptation, vous devez le communiquer dûment compléter au Pôle Emploi du domicile du salarié concerné, accompagné de la copie de sa pièce d’identité. Ensuite, et au plus tard lors de la rupture du contrat de travail, vous transmettrez au même Pôle Emploi l'ensemble des documents nécessaires à l’examen des droits du salarié et au paiement de ses différentes indemnités, notamment :
- l'attestation d'employeur dûment complétée et signée ;
- la demande d'allocation de sécurisation professionnelle dûment complétée et signée par le salarié ;
- la copie de la carte Vitale du salarié ;
- le relevé d'identité bancaire du salarié.
Du côté du salarié. A la rupture de son contrat de travail, le salarié qui a accepté le CSP reçoit une allocation de sécurisation professionnelle (ASP) représentant 75 % de son salaire, allocation qui ne peut pas excéder le montant de l’allocation chômage.
Le saviez-vous ?
Si le salarié est en arrêt maladie ou en congé de maternité, l'indemnisation est décalée au terme de l’arrêt de travail.
Si le bénéficiaire du CSP perçoit une pension d’invalidité, le montant de cette pension peut influer sur le montant de l’allocation de sécurisation professionnelle.
Mise en place du CSP. Le contrat de sécurisation professionnelle est en principe conclu avec le salarié pour une durée de 12 mois (délai décompté dès le lendemain de la fin du contrat de travail). Cette durée peut être prolongée :
- des périodes de travail du salarié (après la fin du 6ème mois du CSP et dans la limite de 3 mois supplémentaires);
- des périodes d’arrêt de travail (dans la limite de 4 mois supplémentaires);
- des périodes de congés maternité (dans la limite de la durée légale du congé);
- des périodes de congés de paternité et d’accueil de l’enfant ;
- des périodes de congés d’adoption ;
- des périodes de congé de proche aidant.
À noter. La prolongation n’est valable que si les périodes en question ont donné lieu à la suspension du CSP.
Un entretien ? Le salarié qui accepte le contrat de sécurisation professionnelle bénéficie, dans les 8 jours de son adhésion, d'un entretien individuel de pré-bilan pour l'examen de ses capacités professionnelles et, au cours des 2 derniers mois, d’un entretien final avec son conseiller référent chez Pôle Emploi.
Aide financière. En plus de son allocation de sécurisation professionnelle, le salarié peut recevoir une indemnité référentielle de reclassement (si, avant le terme du CSP, il reprend un emploi salarié bénéficiant d’une rémunération inférieure à celle de son emploi précédent) ou une prime au reclassement (si, avant le 10ème mois de la fin de son CSP, il retrouve un emploi durable). Ces 2 indemnités ne se cumulent pas, le cas échéant, avec l’allocation chômage. Si le salarié s’inscrit à Pôle Emploi à la fin du CSP, il a effectivement droit à ces allocations chômage, sans délai, pour une durée réduite du nombre de jours indemnisés au titre du CSP.
À retenir
Toute entreprise de moins de 1 000 salariés doit proposer à tous ses salariés menacés d’un licenciement économique un contrat de sécurisation professionnelle. Néanmoins, tous les salariés ne peuvent pas y prétendre. L’acceptation de ce dispositif par le salarié entraîne la rupture du contrat de travail et l’obligation, pour l’employeur, de verser différentes sommes, tant au salarié qu’à Pôle Emploi, le cas échéant.
- Articles L1233-65 et suivants du Code du travail (le contrat de sécurisation professionnelle)
- Article L1233-68 du Code du travail (rôle de l’ANI dans la mise en œuvre du CSP)
- Article 642 du Code de procédure civile (computation des délais)
- Convention Unédic du 26 janvier 2015 relative au contrat de sécurisation professionnelle (CSP)
- Avenant n° 3 du 31 mai 2018 à la convention du 26 janvier 2015 relative au contrat de sécurisation professionnelle
- Convention Unédic du 17 juillet 2018 relative à la mise en œuvre du contrat de sécurisation professionnelle (CSP) à Mayotte
- Arrêté du 7 novembre 2019 portant agrément de l'avenant n° 4 à la convention du 26 janvier 2015 relative au contrat de sécurisation professionnelle et de l'avenant n° 1 à la convention du 17 juillet 2018 relative à la mise en œuvre du contrat de sécurisation professionnelle à Mayotte
- Décret n° 2021-844 du 29 juin 2021 relatif au fonds exceptionnel d'accompagnement et de reconversion des salariés licenciés de la filière automobile
- Arrêté du 24 septembre 2021 portant agrément de l'avenant n° 5 à la convention du 26 janvier 2015 relative au contrat de sécurisation professionnelle et de l'avenant n° 2 à la convention du 17 juillet 2018 relative à la mise en œuvre du contrat de sécurisation professionnelle à Mayotte
- Circulaire Unédic n° 2022-04 du 28 février 2022
- Arrêté du 24 janvier 2023 portant agrément de l'avenant n° 6 à la convention du 26 janvier 2015 relative au contrat de sécurisation professionnelle et de l'avenant n° 3 à la convention du 17 juillet 2018 relative à la mise en œuvre du contrat de sécurisation professionnelle à Mayotte
- Arrêté du 9 juin 2023 portant agrément de l'avenant n° 7 du 15 mars 2023 à la convention du 26 janvier 2015 relative au contrat de sécurisation professionnelle et de l'avenant n° 4 du 15 mars 2023 à la convention du 17 juillet 2018 relative au contrat de sécurisation professionnelle à Mayotte
- Communiqué de presse du Ministère du travail, du 18 juin 2021 : Signature de la convention instituant le fonds d’accompagnement et de reconversion des salariés de la filière automobile par la ministre du Travail, de l’Emploi et de l’Insertion, les constructeurs et la Plateforme automobile (PFA)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 30 novembre 2017, n° 16-24227 (licenciement sans cause réelle et sérieuse et versement de l’indemnité de préavis)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 13 juin 2018, n° 16-17865 (compte rendu de réunion avec les représentants du personnel transmis par mail et obligation d’information)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 5 décembre 2018, n° 17-28034 (adhésion au CSP et renonciation aux propositions de reclassement)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 16 janvier 2019, n° 17-27446 (adhésion au CSP et renonciation aux propositions de reclassement)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 22 janvier 2020, n° 18-25040 (CSP devenu sans cause)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 27 mai 2020, n° 18-20142 (maladie professionnelle et impossibilité de maintenir le contrat)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 27 mai 2020, n° 18-24531 (moment de l’information sur les causes économiques)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 9 septembre 2020, n° 18-19550 (remise en cause du CSP en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 13 janvier 2021, n° 19-16564 (point de départ de la prescription en cas de contestation de la rupture)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 12 mai 2021, n° 19-24245 (point de départ de la prescription en cas de contestation de la rupture)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale du 9 juin 2021, n° 19-14904 (acceptation du CSP par les salariés le jour même de sa proposition)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 9 juin 2021, n° 19-25106 (absence de cause économique et remboursement à Pôle emploi des sommes versées au salarié)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 9 juin 2021, n° 19-23962 (absence de cause économique et remboursement à Pôle emploi des sommes versées au salarié)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 15 février 2023, n° 21-17784 (rétractation impossible de l’employeur)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 4 octobre 2023, n° 21-21059 (CSP et grossesse de la salariée)
Etablir un plan de sauvegarde de l’emploi : une obligation ?
Un PSE, pour qui, pour quoi ?
Le principe. L’établissement d’un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) est impératif pour les entreprises d’au moins 50 salariés qui envisagent de procéder au licenciement économique d’au moins 10 salariés sur une période de 30 jours.
Appréciation du seuil d’effectif. Le seuil d’effectif de 50 salariés et le nombre de licenciements envisagés doivent s’apprécier au niveau de l’entreprise (une entreprise dirigée par un employeur). Néanmoins, lorsque l’entreprise fait partie d’une unité économique et sociale (UES) et que la décision a été prise au niveau de cette UES, les conditions d'effectifs et de nombre de licenciements s'apprécient au niveau de cette UES.
Le saviez-vous ?
Une unité économique et sociale (UES) est composée de plusieurs sociétés distinctes :
- dont les activités sont similaires ou complémentaires ;
- dont les salariés forment une communauté de travailleurs en raison de leur statut social et de leurs conditions de travail similaires, pouvant ainsi (éventuellement) les rendre permutables.
Dans le cas d’une UES reconnue, les seuils d’effectifs pour la représentation du personnel doivent s’apprécier au sein de l’UES et non au sein de chacune des entreprises qui la composent.
Le rôle du PSE. Le PSE a pour rôle d’éviter les licenciements ou d’en limiter le nombre en favorisant le reclassement des salariés sur le territoire national, et particulièrement celui des salariés dont la réinsertion professionnelle peut se révéler particulièrement difficile. De ce fait, si, au moment de l’élaboration du PSE, vous disposez de postes disponibles, ceux-ci devront être proposés aux salariés dont l’emploi est menacé, à titre de reclassement.
Le saviez-vous ?
En cas de successions de PSE, les salariés bénéficiant des mesures du 1er PSE ne peuvent pas prétendre aux avantages prévus par le 2nd PSE pris postérieurement. Ils ne sont, en effet, pas considérés comme étant dans une situation identique à celles des salariés visés par la seconde procédure.
Un PSE, comment ?
Rôle des représentants du personnel. L’établissement d’un PSE est soumis à la consultation des représentants du personnel (ce PSE devant être transmis par voie dématérialisée sur le système d'information dénommé SI-PSE-RCC, sur www.portail-pse-rcc.emploi.gouv.fr).
Le saviez-vous ?
Ce n’est pas nécessairement parce que les départs de l’entreprise (licenciements pour motif personnel, démissions, départs en retraite, etc.) ne sont pas compensés par des entrées que l’entreprise mène un projet de compression des effectifs imposant l’élaboration d’un PSE et donc la consultation des représentants du personnel.
Un accord… Le contenu du PSE, ainsi que les modalités de mise en œuvre du licenciement économique pourront être précisés par accord collectif majoritaire (signé par une ou plusieurs organisations syndicales représentatives ayant recueilli au moins 50 % des suffrages exprimés en faveur des organisations syndicales représentatives au 1er tour des dernières élections des représentant du personnel).
… ou un document unilatéral. A défaut d’accord collectif majoritaire, le contenu du PSE et les modalités de mise en œuvre du licenciement économique devront être fixés par un document établi par vos soins, après la dernière consultation du CSE sur le projet de licenciement économique (ce qui s’appelle « document unilatéral »).
A noter. Dans le cadre de la négociation d’un accord de mise en place d’un PSE, pensez à vérifier la qualité des signataires : seuls les délégués syndicaux ont le pouvoir de représenter leur organisation syndicale lors de la signature d’un accord collectif. Si l’organisation syndicale n’est pas représentative, elle ne peut pas désigner de délégué syndical. Elle ne peut donc pas être partie à la négociation.
Un délai pour négocier ? Dans l’objectif d’établir un PSE par voie d’accord collectif, la loi n’impose pas de délai pour proposer d’ouvrir des négociations. Aussi, 3 situations se présentent :
- l’employeur engage les discussions avant même l’ouverture de la procédure de consultation du CSE ; par ailleurs, le fait que ce dernier ne soit pas informé le 1er dans cette hypothèse ne constitue pas un délit d’entrave ;
- l’employeur peut aussi annoncer son intention d’ouvrir des négociations lors de la première réunion de consultation du comité d’entreprise ;
- la négociation peut s’engager à tout moment, parfois même à la demande d’un syndicat.
Le saviez-vous ?
Le CSE a la possibilité de se faire assister par un expert-comptable (payé par l’entreprise). Le rapport pourra servir aux organisations syndicales à l’occasion de la négociation du PSE.
Conseil. La proposition d’engager des négociations avant même l’information du CSE ne vous enferme dans aucun délai de consultation du CSE : cela vous laisse donc le temps de négocier l’accord.
Contenu du PSE. Le rôle du PSE étant d’éviter les licenciements, ou d’en limiter le nombre, le document doit donc prévoir les mesures qui permettront d’atteindre cet objectif. Il doit favoriser le reclassement des salariés sur le territoire national, et particulièrement celui des salariés dont la réinsertion professionnelle peut se révéler particulièrement difficile. Il peut prévoir des actions favorisant la reprise de tout ou partie des activités en vue d'éviter la fermeture d'un ou de plusieurs établissements, mais aussi un aménagement du temps de travail, des actions de formation, un plan de départs volontaires…
Plan de départs volontaires. La rupture du contrat en application du plan de départs volontaires est formalisée par un accord de rupture amiable. Notez que l’indemnité de rupture allouée dans une telle situation relève de la liberté contractuelle, aussi, même si le calcul de l’indemnité prévu au PSE est moins favorable que l’indemnité mentionnée dans l’accord de rupture, le surplus ne constituera pas un indu. L’employeur ne pourra donc pas prétendre à son remboursement.
Cas du plan de départs volontaires annulé. Les ruptures de contrats consécutives à un plan de départs volontaires qui sera finalement annulé par le juge sont, elles aussi, « nulles », même celles des salariés qui n’auraient pas agi en justice. Il en résulte que tous les salariés concernés doivent donc être indemnisés, même ceux qui n’ont pas agi en justice.
Le saviez-vous ?
L’établissement d’un PSE précisant les postes disponibles en vue des reclassements des salariés visés par une éventuelle mesure de licenciement ne vous dispense pas de proposer effectivement des reclassements aux salariés candidats à un plan de départ volontaire.
Un contenu suffisant ? Le caractère suffisant ou non du PSE, dans ses mesures visant le reclassement interne ou externe des salariés et notamment des salariés fragiles (âgés, handicapés…), s’apprécie au regard des moyens engagés. De même lorsque l’entreprise qui met en place un PSE appartient à un groupe, le caractère suffisant des mesures comprises dans le PSE s’apprécie au regard des moyens du groupe auquel elle appartient.
Un contrôle de l’administration. La procédure de mise en place du PSE et de consultation des représentants du personnel est contrôlée par la DREETS, à qui vous aurez soin de notifier la mise en œuvre d’une procédure de licenciement économique ; cette autorité administrative aura pour mission de valider l’accord collectif (dans un délai de 15 jours à compter de la réception de l’accord) ou d’homologuer votre document établissant le PSE (dans un délai de 21 jours), son silence valant acceptation tacite.
Attention ! Vous ne pourrez pas notifier de licenciement avant la décision de validation ou d’homologation, ou, en tout état de cause, avant l’expiration des délais impartis pour que l’administration prenne position.
Contentieux. Il faut noter que les contestations relatives au PSE et aux procédures de licenciement économique d’au moins 10 salariés sur une même période de 30 jours dans les entreprises d’au moins 50 salariés seront de la compétence du juge administratif.
Annulation de la validation du PSE. L’annulation de la décision de validation (ou d’homologation) du PSE ne prive pas les licenciements économiques, intervenus à la suite de la décision finalement annulée, de cause réelle et sérieuse.
Attention au transfert des contrats ! Lorsqu’un plan de sauvegarde de l’emploi est établi en violation des règles de transferts des contrats de travail au repreneur, les salariés licenciés peuvent réclamer des dommages-intérêts à l’employeur devant le Conseil de Prud’hommes.
A retenir
Le PSE est un document, négocié avec des organisations syndicales ou établi unilatéralement par l’employeur, qui contient des mesures visant à éviter, ou du moins à limiter autant que possible, les licenciements économiques. Sa validité est ensuite contrôlée par la Direction régionale de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités (DREETS).
- Articles L 1233-21 et suivants du Code du travail (accord majoritaire)
- Articles L 1233-25 à L 1233-27 et L 1233-61 du Code du travail (entreprises concernées par l’élaboration d’un PSE)
- Articles L1235-10 et suivants du Code du travail (sanction des irrégularités du licenciement économique)
- Article L 1233-34 du Code du Travail (le CE peut se faire assister d’un expert-comptable afin d’aider les organisations syndicales dans la négociation de l’accord)
- Loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels (article 94)
- Ordonnance n° 2017-1718 du 20 décembre 2017 visant à compléter et mettre en cohérence les dispositions prises en application de la loi n° 2017-1340 du 15 septembre 2017 d'habilitation à prendre par ordonnances les mesures pour le renforcement du dialogue social
- Arrêté du 29 décembre 2017 modifiant l'arrêté du 27 juin 2014 fixant la date d'entrée en vigueur des dispositions de l'article 5 du décret n° 2013-554 du 27 juin 2013 relatif à la procédure de licenciement collectif pour motif économique (dématérialisation des PSE)
- Arrêts de la Cour de cassation, chambre sociale, du 16 novembre 2010, n° 09-69485 à 09-69489 (appréciation du seuil d’effectif et du nombre de licenciements au niveau d’une UES)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 19 mai 2016, n° 15-11047 (reclassement salariés et départs volontaires)
- Arrêt du Conseil d’État, 4ème et 5ème chambres réunies, du 30 mai 2016, n° 385730 (vérification de la qualité des signataires du PSE)
- Arrêts de la Cour de cassation, chambre sociale, du 29 septembre 2016, n° 14-26460 et n° 14-26461 (caractère suffisant du PSE apprécié au regard des moyens engagés)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 29 septembre 2016, n° 14-24662 (pertinence du PSE appréciée au regard des moyens du groupe auquel appartient l’entreprise)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 4 mai 2017, n° 16-14779 (le reclassement du salarié doit être tenté dès que son licenciement est envisagé)
- Arrêts de la Cour de cassation, chambre sociale, du 29 juin 2017, n° 15-21008 et 16-12007 (PSE successifs)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 25 octobre 2017, n° 16-13872 (absence de projet de compression des effectifs)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 17 octobre 2018, n° 17-16869 (nullité des ruptures de contrat faisant suite à l’annulation d’un plan de départs volontaires)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 26 juin 2019, n° 18-17120 (licenciement économique nul et calcul de l’indemnité)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 25 mars 2020, n° 18-23692 (annulation validation du PSE et salariés en CSP)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 10 juin 2020, n° 18-26200 (fraude au transfert des contrats)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 3 février 2021, n° 19-23237 (indemnité de rupture amiable – plan de départs volontaires)
Licenciement économique : un seul salarié concerné
Apprécier le nombre de licenciement envisagés
Combien de licenciements envisagez-vous ? La question qui se pose ici est de savoir si la procédure va (ou non) viser un licenciement collectif, et dans l’affirmative, s’il va concerner moins de 10 salariés ou plus de 10 salariés, étant précisé que vous devez, pour apprécier la procédure à mettre en œuvre, prendre en compte le nombre de licenciements « envisagés » initialement (même si le nombre effectif de salariés licenciés s’avère finalement inférieur).
Sur quelle période ? Si le licenciement envisagé concerne plusieurs salariés, il vous faudra également tenir compte de la période sur laquelle va s’échelonner le licenciement collectif : l’appréciation de nombre de salariés licenciés s’apprécie sur une période de 30 jours (appréciée à compter de la date de la 1ère réunion de consultation du CSE ou, en l’absence de représentants du personnel, de la date du 1er entretien préalable).
Une appréciation à faire au niveau de l’entreprise… En pratique, l’appréciation du nombre de salariés licenciés s’appréciera au niveau de l’entreprise (et ce, même si l’entreprise comporte plusieurs établissements dès lors que le projet de licenciement concerne simultanément les salariés de ces établissements). Sachez tout de même que si l’entreprise fait partie d’une union économique et sociale (UES) et que la décision de mise en œuvre du licenciement a été prise à ce niveau, le nombre de salariés licenciés doit s’apprécier au niveau de l’UES.
Licenciement économique individuel : des règles spécifiques
Un licenciement « individuel ». Une fois que le salarié concerné a été ciblé, vous devez respecter la procédure de licenciement selon ses règles habituelles, mais avec toutefois quelques spécificités…
Vous devez le convoquer à un entretien préalable. Avant de prendre une décision, vous devez convoquer le salarié concerné par le licenciement économique à un entretien préalable, en précisant dans votre courrier de convocation (envoyé en recommandé avec accusé réception).
- l’objet de l’entretien (en pratique, le projet de licenciement économique) ;
- la date, le lieu et l’heure de l’entretien qui ne peut pas avoir lieu moins de 5 jours après la présentation du courrier ;
- la possibilité pour le salarié de se faire assister lors de cet entretien par un membre du personnel de son choix (ou, en l'absence d'institutions représentatives dans l'entreprise, par un conseiller choisi sur une liste dressée par le représentant de l’Etat dans le département ; votre lettre de convocation doit, dans ce cas, préciser l’adresse des services dans lesquels la liste de ces conseillers est tenue à sa disposition, à savoir l’adresse de l’Inspection du Travail et de la mairie du domicile du salarié ou du siège social de l’entreprise).
Attention. L’absence de mention sur votre courrier de la possibilité pour le salarié de se faire assister par un conseiller, de même que l’absence des mentions complètes relatives au conseiller du salarié, constitue une irrégularité de procédure sanctionnée par le versement d’une indemnité égale au plus à 1 mois de salaire.
Au cours de cet entretien. Il est conseillé de remettre une note économique au salarié : cette note comprend notamment un énoncé des motifs économiques, les critères d’ordre retenus et les mesures d’accompagnement au reclassement du salarié. Vous devez, par ailleurs, l’informer qu’il peut bénéficier d’un contrat de sécurisation professionnelle (ou, dans les entreprises de plus de 1 000 salariés, d’un congé de reclassement). Il s’agit d’un dossier d’information que vous pouvez obtenir auprès des services de Pôle Emploi et que vous devez remettre au salarié (pensez à faire signer un récépissé de remise). Le salarié dispose d’un délai de 21 jours pour donner sa réponse quant à cette proposition de CSP ; s’il l’accepte, il n’y a pas lieu de procéder à un licenciement : la rupture du contrat prendra alors fin d’un commun accord qu’il conviendra de confirmer par écrit (vous n’avez alors pas à notifier de licenciement à proprement parler).
Après un délai de réflexion, vous notifiez le licenciement. Vous devez respecter un délai de réflexion, pendant lequel il ne vous est pas possible de procéder au licenciement : ce délai est de 7 jours ouvrables pour les salariés non-cadres et de 15 jours pour les salariés cadres. Une fois ce délai passé, et si la décision de licencier est prise, vous devez le notifier par écrit (en recommandé avec accusé réception).
Attendre 21 jours ? N’oubliez pas que le salarié dispose d’un délai de 21 jours pour vous faire connaître sa réponse suite à la proposition du CSP. Par conséquent, si vous notifiez le licenciement avant l’expiration de ce délai, précisez dans votre courrier que ce délai n’est pas expiré et qu’en cas de refus de sa part suite à cette proposition, ce courrier vaudra notification de licenciement. Une autre solution consiste à attendre l’expiration du délai de 21 jours : soit il refuse la proposition, et vous lui notifiez son licenciement ; soit il l’accepte, et vous confirmez alors par écrit la rupture du contrat d’un commun accord.
Attention au contenu de vos courriers. Pour plus de sécurité et leur donner date certaine, adressez vos courriers en recommandé avec accusé réception. Quant au contenu, il faut veiller à ce que les mentions suivantes soient clairement reprises :
- le motif économique du licenciement, indiqué clairement sous peine de voir ce licenciement dénué de cause réelle et sérieuse (la simple mention du caractère économique du licenciement est insuffisante) ;
- l’impossibilité de reclasser le salarié ;
- le cas échéant, la proposition du congé de reclassement (pour les entreprises de 1 000 salariés ou plus) ;
- le bénéfice pour le salarié d’une priorité de réembauche ainsi que ses modalités de mise en œuvre (cette priorité étant acquise pendant une année à à compter de la date de la rupture du contrat de travail si le salarié en fait la demande) ;
- la date d’expiration du préavis ;
- le crédit d’heures dont dispose le salarié au titre de son droit individuel à la formation ;
- le délai dont il dispose pour contester le licenciement économique (12 mois s’il conteste la régularité du licenciement, 2 ans dans les autres hypothèses) ;
- la portabilité de la prévoyance.
Des modèles de courrier pour vous aider. Afin de sécuriser vos licenciements, vous pouvez utiliser les modèles de lettres établis par le Gouvernement. Vous devez alors choisir le modèle adapté au motif du licenciement concerné.
=> Consultez le modèle-type de la lettre de licenciement pour motif économique personnel
Le saviez-vous ?
La lettre de notification du licenciement doit mentionner la priorité de réembauche et ses conditions de mise en œuvre (pour permettre au salarié d’en bénéficier s’il en fait la demande dans le délai d’un an à compter de la date de rupture de son contrat de travail). Notez qu’il est possible, pour l’employeur, d’imposer un délai de réponse au salarié à la suite d’une proposition de réembauche.
Si l’omission de cette mention cause un préjudice au salarié (et à condition qu’il en justifie), l’employeur devra le réparer en lui versant une indemnité.
Priorité de réembauche : sur quel poste ? Lorsque le salarié, licencié pour motif économique, demande à bénéficier de la priorité de réembauche, l’'employeur est tenu de lui proposer tous les postes disponibles et compatibles avec sa qualification. Peu importe alors que le salarié ait déjà refusé le même poste au titre de son reclassement.
Informez l’administration. Dans les 8 jours de la notification du licenciement au salarié, vous devez informer de cette situation la Direction régionale de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités (DREETS). N’oubliez pas non plus de compléter le registre du personnel et, pour les entreprises d’au moins 50 salariés, de mentionner ce licenciement sur le relevé mensuel des contrats conclus ou résiliés.
Le saviez-vous ?
Avant de procéder à un licenciement économique, l’entreprise doit s’assurer de respecter ses obligations en matière de représentation du personnel.
Ainsi, il a été jugé qu’une entreprise, ayant licencié un salarié pour motif économique alors même qu’elle n’avait pas procédé aux élections professionnelles (ni établi de procès-verbal de carence), devait verser à ce dernier des dommages et intérêts.
A retenir
Lorsque vous devez procéder à un licenciement économique, vous devez respecter les règles communes du licenciement économique (établir l’ordre des licenciements et rechercher des postes de reclassement) et des règles spécifiques qui dépendent du nombre de salariés visés. Dans le cadre d’un licenciement individuel, la procédure de licenciement reprend les règles du licenciement pour motif personnel en y ajoutant des garanties particulières pour le salarié (proposition de CSP, information de l’administration du travail).
J'ai entendu dire
J’ai entendu dire que le licenciement d’un salarié dit « protégé » (membre du CSE, délégué syndical, etc.) était soumis à des conditions supplémentaires. Qu’en est-il ?Si vous envisagez le licenciement d’un salarié protégé, vous devez effectivement obtenir une autorisation de l’inspection du travail.
- Articles L 1233-1 et suivants du Code du travail
- Décret n° 2017-1820 du 29 décembre 2017 établissant des modèles types de lettres de notification de licenciement
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 22 mars 2017, 15-28782 (priorité de réembauche et absence de manifestation du salarié licencié)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 30 janvier 2019, n° 17-27796 (défaut de mention de la priorité de réembauche dans la lettre de licenciement)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 17 avril 2019, n° 17-21175 (priorité de réembauche et délai de réponse imposé au salarié)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 26 juin 2019, n° 18-11220 (priorité de réembauche sur un poste préalablement refusé par le salarié)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale du 9 juin 2021, n° 20-11796 (versement de dommages et intérêt en cas de licenciement économique en l’absence d’un CSE)
Licenciement économique : 2 à 9 salariés concernés
Apprécier le nombre de salariés concernés
Combien de licenciements envisagez-vous ? La question qui se pose ici est de savoir si la procédure va (ou non) viser un licenciement collectif, et dans l’affirmative, s’il va concerner moins de 10 salariés ou au moins 10 salariés, étant précisé que vous devez, pour apprécier la procédure à mettre en œuvre, prendre en compte le nombre de licenciements « envisagés » initialement (même si le nombre effectif de salariés licenciés s’avère finalement inférieur).
Sur quelle période ? Si le licenciement envisagé concerne plusieurs salariés, il vous faudra également tenir compte de la période sur laquelle va s’échelonner le licenciement collectif : l’appréciation de nombre de salariés licenciés s’apprécie sur une période de 30 jours (appréciée à compter de la date de la 1re réunion de consultation des élus ou, en l’absence de représentants du personnel, de la date du 1er entretien préalable).
Le saviez-vous ?
A titre d’information, pour les entreprises comptant au moins 50 salariés, deux situations prévoient d’apprécier le nombre de licenciements sur une période plus longue :
- lorsqu'une entreprise a procédé au cours d'une année civile à des licenciements pour motif économique de plus de 18 salariés au total, sans avoir été tenue de présenter de plan de sauvegarde de l'emploi, tout nouveau licenciement économique envisagé au cours des 3 premiers mois de l'année civile suivante est soumis aux règles gouvernant le licenciement économique de 10 salariés ou plus ;
- il en est de même pour l’entreprise qui a procédé pendant 3 mois consécutifs à des licenciements économiques de plus de 10 salariés au total, sans atteindre 10 salariés dans une même période de 30 jours : tout nouveau licenciement économique envisagé au cours des 3 mois suivants est soumis aux règles gouvernant le licenciement économique de 10 salariés ou plus.
Une appréciation à faire au niveau de l’entreprise… En pratique, l’appréciation du nombre de salariés licenciés s’appréciera au niveau de l’entreprise (et ce, même si l’entreprise comporte plusieurs établissements dès lors que le projet de licenciement concerne simultanément les salariés de ces établissements). Sachez tout de même que si l’entreprise fait partie d’une union économique et sociale (UES) et que la décision de mise en œuvre du licenciement a été prise à ce niveau, le nombre de salariés licenciés doit s’apprécier au niveau de l’UES.
Vous avez des obligations. Au préalable, et avant d’envisager un licenciement économique, vous devrez déterminer, le cas échéant, les critères qui permettront de désigner le salarié qui sera effectivement concerné par le licenciement et avoir effectué toutes les démarches requises en matière de reclassement préalable.
Une priorité de réembauche. Tout salarié licencié pour motif économique bénéficie d’une priorité de réembauche. Ce droit est mentionné dans la lettre de licenciement ainsi que ses conditions de mise en œuvre. Il s’impose à l’employeur à compter du jour où le salarié lui a fait part de sa volonté d’en user.
Le saviez-vous ?
La lettre de notification du licenciement doit mentionner la priorité de réembauche et ses conditions de mise en œuvre (pour permettre au salarié d’en bénéficier s’il en fait la demande dans le délai d’un an à compter de la date de rupture de son contrat de travail). Notez qu’il est possible, pour l’employeur, d’imposer un délai de réponse au salarié à la suite d’une proposition de réembauche.
Si l’omission de cette mention cause un préjudice au salarié (et à condition qu’il en justifie), l’employeur devra le réparer en lui versant une indemnité.
Priorité de réembauche : sur quel poste ? Lorsque le salarié, licencié pour motif économique, demande à bénéficier de la priorité de réembauche, l’'employeur est tenu de lui proposer tous les postes disponibles et compatibles avec sa qualification. Peu importe alors que le salarié ait déjà refusé le même poste au titre de son reclassement.
Licenciement économique de moins de 10 salariés : des règles spécifiques
Quels sont les acteurs de ce licenciement ? Dès lors que vous disposez de représentants du personnel, ils doivent intervenir dans la procédure. Mais l’administration du travail est également impliquée.
Consultez les représentants du personnel. Si l’entreprise dispose de représentants du personnel (un comité social et économique, ou un comité d’entreprise, ou des délégués du personnel, etc.), vous devez les informer et les consulter sur le projet de licenciement pour qu’ils émettent un avis (qui sera transmis à la Direccte). Si vous ne le faites pas, vous vous exposez à des sanctions financières. Convoquez les représentants du personnel au moins 3 jours (8 jours s’il existe un comité central d’entreprise ou un comité social et économique central) avant la tenue de la réunion, en précisant dans votre convocation :
- la ou les raisons économiques, financières ou techniques du projet de licenciement,
- le nombre de licenciements envisagés,
- les catégories professionnelles concernées et les critères proposés pour l'ordre des licenciements,
- le nombre de salariés, permanents ou non, employés dans l'établissement,
- le calendrier prévisionnel des licenciements,
- les mesures de nature économique envisagées.
Le saviez-vous ?
Si l’entreprise ne dispose pas d’instances représentatives du personnel, alors que vous êtes légalement tenu de mettre en place ces instances, vous devez être en mesure de produire un procès-verbal de carence : à défaut, vous vous exposez au délit d’entrave. Le licenciement serait déclaré irrégulier ; en plus des indemnités, les salariés pourraient prétendre à une indemnité spécifique égale à 1 mois de salaire
Par la suite… Vous êtes tenu aux mêmes obligations que dans le cadre d’un licenciement économique individuel, tant en ce qui concerne l’obligation préalable de recherche de reclassement, la définition des critères d’ordre des licenciements afin de déterminer les salariés susceptibles d’être licenciés, la convocation de chaque salarié à un entretien préalable, la proposition liée au contrat de sécurisation professionnelle, la notification du licenciement à chaque salarié, l’information de l’administration, etc. Attention, toutefois : notez que le délai de réflexion à respecter entre la tenue de l’entretien et le licenciement est, dans cette hypothèse, commun aux salariés cadres et aux salariés non-cadres et est fixé à 7 jours ouvrables.
Informez l’administration. Vous devez informer la Directte de la procédure de licenciement dans les 8 jours de l’envoi des lettres de licenciement (en précisant les coordonnées de l’entreprise, la nature de l'activité et l'effectif de l'entreprise, les coordonnées, date de naissance, emploi et qualification des salariés licenciés, la date de la notification des licenciements), et ce via le portail RUPCO à compter du 1er janvier 2020 (à l’adresse suivante : https://ruptures-collectives.gouv.emploi.fr). Il faut noter, ici, que la procédure de licenciement économique est soumise au contrôle de l’administration qui s’assurera que les représentants du personnel ont été effectivement réunis et consultés sur les mesures que vous envisagez de mettre en œuvre pour éviter les licenciements ou en limiter le nombre et pour faciliter le reclassement du personnel dont le licenciement ne pourrait être évité.
Des modèles de courrier pour vous aider. Afin de sécuriser vos licenciements, vous pouvez utiliser les modèles de lettres établis par le Gouvernement. Vous devez alors choisir le modèle adapté au motif du licenciement concerné.
=> Consultez le modèle-type de la lettre de licenciement pour motif économique (2 à 9 salariés)
Le saviez-vous ?
En principe, le motif économique n’est pas suffisant pour caractériser l’impossibilité de maintenir le contrat de travail d’une salariée enceinte (ou pendant les 10 semaines qui suivent la fin de son congé maternité). Néanmoins, pour la Cour de Justice européenne, la rupture du contrat d’une salariée enceinte inscrite dans un licenciement collectif pour motif économique pourrait valablement être autorisée par la Loi. Ce qui n’est pas le cas en France, du moins à ce jour.
A retenir
Lorsque vous devez procéder à un licenciement économique, vous devez respecter les règles communes du licenciement économique (établir l’ordre des licenciements et rechercher des postes de reclassement, proposer un CSP) et des règles spécifiques qui dépendent du nombre de salariés visés. Dans le cadre d’un licenciement collectif, les représentants du personnel doivent intervenir, tout comme l’administration du travail.
J'ai entendu dire
J’ai entendu dire que le licenciement d’un salarié dit « protégé » (délégué du personnel, membre du comité d’entreprise, délégué syndical, etc.) était soumis à des conditions supplémentaires. Qu’en est-il ?Si vous envisagez le licenciement d’un salarié protégé, vous devez effectivement obtenir une autorisation de l’inspection du travail.
- Articles L 1233-1 et suivants du Code du travail
- Articles L 2315-30 et L 2316-17 du Code du travail (délais de convocation du CSE)
- Décret n° 2017-1820 du 29 décembre 2017 établissant des modèles types de lettres de notification de licenciement
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 22 mars 2017, 15-28782 (priorité de réembauche et absence de manifestation du salarié licencié
- Arrêt de la CJUE, du 22 février 2018, n° C‑103/16 (licenciement collectif comprenant une salariée enceinte)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 30 janvier 2019, n° 17-27796 (défaut de mention de la priorité de réembauche dans la lettre de licenciement)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 17 avril 2019, n° 17-21175 (priorité de réembauche et délai de réponse imposé au salarié)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 26 juin 2019, n° 18-11220 (priorité de réembauche sur un poste préalablement refusé par le salarié)
- Arrêté du 21 octobre 2019 relatif à la dématérialisation des procédures de licenciement collectif pour motif économique et de rupture conventionnelle collective
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale du 9 juin 2021, n° 20-11796 (versement de dommages et intérêt en cas de licenciement économique en l’absence d’un CSE)
Licenciement économique : au moins 10 salariés concernés
Apprécier le nombre de licenciements envisagés
Combien de licenciements envisagez-vous ? La question qui se pose ici est de savoir si la procédure va (ou non) viser un licenciement collectif, et dans l’affirmative, s’il va concerner moins de 10 salariés ou au moins 10 salariés, étant précisé que vous devez, pour apprécier la procédure à mettre en œuvre, prendre en compte le nombre de licenciements « envisagés » initialement (même si le nombre effectif de salariés licenciés s’avère finalement inférieur).
Sur quelle période ? Si le licenciement envisagé concerne plusieurs salariés, il vous faudra également tenir compte de la période sur laquelle va s’échelonner le licenciement collectif : l’appréciation de nombre de salariés licenciés s’apprécie sur une période de 30 jours (appréciée à compter de la date de la 1ère réunion de consultation des élus ou, en l’absence de représentants du personnel, de la date du 1er entretien préalable).
Le saviez-vous ?
A titre d’information, pour les entreprises comptant au moins 50 salariés, deux situations prévoient d’apprécier le nombre de licenciements sur une période plus longue :
- lorsqu'une entreprise a procédé au cours d'une année civile à des licenciements pour motif économique de plus de 18 salariés au total, sans avoir été tenue de présenter de plan de sauvegarde de l'emploi, tout nouveau licenciement économique envisagé au cours des 3 premiers mois de l'année civile suivante est soumis aux règles gouvernant le licenciement économique de 10 salariés ou plus ;
- il en est de même pour l’entreprise qui a procédé pendant 3 mois consécutifs à des licenciements économiques de plus de 10 salariés au total, sans atteindre 10 salariés dans une même période de 30 jours : tout nouveau licenciement économique envisagé au cours des 3 mois suivants est soumis aux règles gouvernant le licenciement économique de 10 salariés ou plus.
Une appréciation à faire au niveau de l’entreprise… En pratique, l’appréciation du nombre de salariés licenciés s’appréciera au niveau de l’entreprise (et ce, même si l’entreprise comporte plusieurs établissements dès lors que le projet de licenciement concerne simultanément les salariés de ces établissements). Sachez tout de même que si l’entreprise fait partie d’une union économique et sociale (UES) et que la décision de mise en œuvre du licenciement a été prise à ce niveau, le nombre de salariés licenciés doit s’apprécier au niveau de l’UES.
Toutefois, depuis le 24 septembre 2017, lorsqu’une entreprise appartient à un groupe, ses difficultés économiques, lorsqu’elles justifient des licenciements pour ce motif, s’apprécient au niveau du secteur d’activité commun au sien et à celui des entreprises du groupe auquel elle appartient lorsque ces entreprises sont établies sur le territoire national (sauf en cas de fraude). Elles ne s’apprécient donc plus au niveau du groupe.
Une spécificité. Dans l’hypothèse d’un plan de licenciement économique d’au moins 10 salariés, la procédure est plus contraignante, puisqu’elle suppose un processus de consultation des représentants du personnel plus formel (au moins 2 réunions), l’information obligatoire de l’administration sur le projet de licenciement, l’élaboration d’un plan de sauvegarde de l’emploi dans les entreprises de plus de 50 salariés.
A ce titre… Comme cela peut aussi être fortement conseillé en présence d’un licenciement de moins de 10 salariés, la mise en place d’un projet de licenciement économique impliquant plus de 10 salariés nécessite d’être accompagnée pour que la procédure, lourde et longue, soit maîtrisée au niveau de l’entreprise.
Le saviez-vous ?
Avant de procéder à un licenciement économique, l’entreprise doit s’assurer de respecter ses obligations en matière de représentation du personnel.
Ainsi, il a été jugé qu’une entreprise, ayant licencié un salarié pour motif économique alors même qu’elle n’avait pas procédé aux élections professionnelles (ni établi de procès-verbal de carence), devait verser à ce dernier des dommages et intérêts.
Une priorité de réembauche. Tout salarié licencié pour motif économique bénéficie d’une priorité de réembauche. Ce droit est mentionné dans la lettre de licenciement ainsi que ses conditions de mise en œuvre. Il s’impose à l’employeur à compter du jour où le salarié lui a fait part de sa volonté d’en user. Notez qu’il est possible, pour l’employeur, d’imposer un délai de réponse au salarié à la suite d’une proposition de réembauche. L’employeur qui ne respecte pas cette priorité de réembauche pourra être condamné à verser une indemnité au moins égale à :
- 2 mois de salaire si le licenciement a été prononcé avant le 24 septembre 2017 ;
- 1 mois de salaire si le licenciement a été prononcé le 24 septembre 2017 ou après.
Priorité de réembauche : sur quel poste ? Lorsque le salarié, licencié pour motif économique, demande à bénéficier de la priorité de réembauche, l’'employeur est tenu de lui proposer tous les postes disponibles et compatibles avec sa qualification. Peu importe alors que le salarié ait déjà refusé le même poste au titre de son reclassement.
Néanmoins. Pour prétendre à une indemnisation complémentaire (dommages-intérêts), le salarié doit justifier d’un préjudice résultant de l’omission de cette mention, distinct de celui du licenciement.
Une distinction à faire. Pour information, la procédure sera ici différente selon que l’entreprise occupe moins ou plus de 50 salariés, mais disposant toujours de représentants du personnel.
Le saviez-vous ?
En principe, le motif économique n’est pas suffisant pour caractériser l’impossibilité de maintenir le contrat de travail d’une salariée enceinte (ou pendant les 10 semaines qui suivent la fin de son congé maternité). Néanmoins, pour la Justice européenne, la rupture du contrat d’une salariée enceinte inscrit dans un licenciement collectif pour motif économique pourrait valablement être autorisée par la Loi. Ce qui n’est pas, du moins à ce jour, le cas en France.
A noter. Toutes les entreprises de moins de 1 000 salariés, ainsi que celles qui sont placées en redressement ou liquidation judiciaire (quel que soit leur effectif), ont l’obligation de proposer à leurs salariés visés par un licenciement économique un contrat de sécurisation professionnelle (CSP). Ce dispositif a vocation à organiser un parcours de retour à l'emploi, éventuellement par le biais d'une reconversion ou d'une création ou reprise d'entreprise.
Des règles spécifiques aux entreprises de moins de 50 salariés
Si l’entreprise occupe moins de 50 salariés et dispose de représentants du personnel… En plus de la procédure habituelle applicable en matière de licenciement économique (effort de reclassement, proposition de CSP, modalités de notification du licenciement, etc.), vous êtes confronté à une obligation d’information plus contraignante.
Des réunions… Vous devez organiser 2 réunions sur le projet de licenciement, séparées par un délai qui ne peut être supérieur à 14 jours, avec les représentants du personnel, au cours desquelles, après leur avoir remis les informations sur le projet de licenciement (motifs du licenciement économique envisagé, nombre de salariés de l’entreprise et nombre de salariés concernés par le licenciement, catégories professionnelles concernées ; critères d’ordre des licenciements, calendrier prévisionnel, présentation des mesures de reclassement interne, du dispositif de contrats de sécurisation professionnelle, des mesures économiques prises afin d’améliorer la situation de l’entreprise, etc.), vous les consultez sur le projet de licenciement envisagé afin d’obtenir leur avis. Dans ce cas-là, il n’y a pas d’entretien préalable avec les salariés concernés (il n’y aura de convocation à un entretien préalable de chaque salarié qu’en l’absence de représentants du personnel, absence que vous devez justifier par la production d’un PV de carence).
Information de la Dreets. Vous devez communiquer à la Dreets (via le portail RUPCO, à l’adresse suivante : https://ruptures-collectives.emploi.gouv.fr) le projet de licenciement, lui communiquer les procès-verbaux des réunions avec la délégation du personnel au Comité social et économique (CSE), l’informer sur l’identité des personnes concernées par le licenciement ; elle dispose d’un délai de 21 jours pour se prononcer, étant entendu qu’elle peut formuler des observations sur les mesures sociales prises pour éviter les licenciements.
Un délai pour notifier les licenciements. La lettre de notification ne peut être adressée avant l'expiration d'un délai de 30 jours courant à compter de la notification du projet de licenciement à l'autorité administrative.
Des modèles de courrier pour vous aider. Afin de sécuriser vos licenciements, vous pouvez utiliser les modèles de lettres établis par le Gouvernement. Vous devez alors choisir le modèle adapté au motif du licenciement concerné.
=> Consultez le modèle-type de la lettre de licenciement pour motif économique (2 à 9 salariés)
Des règles spécifiques aux entreprises d’au moins 50 salariés
Une procédure exigeante. La procédure est ici encore plus exigeante et nécessite la mise en place d’un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE), soumis à la consultation des représentants du personnel (ce PSE devant être transmis par voie dématérialisée sur le système d'information dénommé Si-homologation, sur www.portail-pse.emploi.gouv.fr).
Un accord… Le contenu du PSE, ainsi que les modalités de mise en œuvre du licenciement économique pourront être précisés par accord collectif majoritaire (signé par une ou plusieurs organisations syndicales représentatives ayant recueilli au moins 50 % des suffrages exprimés en faveur des organisations syndicales représentatives au 1er tour des dernières élections des représentants du personnel).
Ou un document unilatéral. A défaut d’accord collectif majoritaire, le contenu du PSE et les modalités de mise en œuvre du licenciement économique devront être fixés par un document établi par vos soins, après la dernière consultation du comité d’entreprise sur le projet de licenciement économique (ce qui s’appelle « document unilatéral »).
En tout état de cause, le PSE doit contenir des mesures destinées à favoriser la reprise de certaines activités afin d’éviter la fermeture d’un ou plusieurs établissements.
A noter. Dans le cadre de la négociation d’un accord de mise en place d’un PSE, pensez à vérifier la qualité des signataires : seuls les délégués syndicaux ont le pouvoir de représenter leur organisation syndicale lors de la signature d’un accord collectif. Si l’organisation syndicale n’est pas représentative, elle ne peut pas désigner de délégué syndical. Elle ne peut donc pas être partie à la négociation.
Des réunions. Vous devrez organiser au minimum 2 réunions avec le CSE, espacées d’au moins 14 jours, qui sera ainsi consulté sur le projet de restructuration et de compression des effectifs et sur le projet de licenciement économique et pour lequel il sera invité à émettre 2 avis (l’un sur l’opération de restructuration et l’autre sur le projet de licenciement), dans un délai qui ne peut pas excéder 2 mois, décompté à partir de la 1ère réunion (3 mois si le nombre de licenciements est supérieur à 100, 4 mois si ce nombre est supérieur à 250).
Recours à un expert-comptable. Le CSE aura la possibilité de se faire assister par un expert-comptable (payé par l’entreprise), dont la mission est encadrée dans le temps puisqu’il sera tenu de rendre son rapport au plus tard 15 jours avant l’expiration du délai imparti au CSE pour rendre ses avis. Dans ce cadre,un accord d’entreprise ou un accord conclu avec la majorité des membres peut prévoir d’autres délais.
Un aménagement possible. Le PSE peut prévoir, uniquement s’il est établi par accord majoritaire, des aménagements de la procédure d’information et de consultation du CSE, en cas de projet de transfert d’une ou plusieurs entités économiques, dans le but de sauvegarder une partie des emplois. Dans ce cas, l’accord doit également prévoir les délais de consultation du CSE pour qu’il se prononce sur l’offre de reprise.
Le saviez-vous ?
Pour les licenciements économiques engagés depuis le 10 août 2016 dans les entreprises d’au moins 1 000 salariés, lorsque des transferts de contrats sont opérés dans le cadre d’une offre de reprise, le nombre de transferts est limité aux emplois qui n’ont pas été supprimés à la date du transfert. Pour les licenciements engagés à partir du 24 septembre 2017, il n’existe plus cette condition d’effectif. Cela implique donc que les licenciements sont désormais possibles avant la cession de l’entreprise.
Rappelons que l’on considère qu’un licenciement économique est engagé à la date d’envoi de la convocation à l’entretien préalable ou à la date d’envoi de la convocation des représentants du personnel.
A noter. L’établissement d’un PSE précisant les postes disponibles en vue des reclassements des salariés visés par une éventuelle mesure de licenciement ne vous dispense pas d’effectivement proposer des reclassements aux salariés candidats à un plan de départ volontaire.
Un contrôle de l’administration. La procédure de mise en place du PSE et de consultation des représentants du personnel est contrôlé par la Dreets, à qui vous aurez soin de notifier la mise en œuvre d’une procédure de licenciement économique (via le portail RUPCO, à l’adresse suivante : https://ruptures-collectives.emploi.gouv.fr) ; cette autorité administrative aura pour mission de valider l’accord collectif (dans un délai de 15 jours à compter de la réception de l’accord) ou d’homologuer votre document établissant le PSE (dans un délai de 21 jours), son silence valant acceptation tacite (il faut ici noter que vous ne pourrez pas notifier de licenciement avant la décision de validation ou d’homologation, ou, en tout état de cause, avant l’expiration des délais impartis pour que l’administration prenne position).
Le saviez-vous ?
En cas de de licenciement économique avec plan de sauvegarde de l’emploi intervenu en l’absence ou refus de validation ou d’homologation de ce plan, l’entreprise sera condamnée au remboursement des indemnités de chômage (dans la limite de 6 mois d’indemnisation).
Contentieux. Il faut noter que les contestations relatives au PSE et aux procédures de licenciement économique d’au moins 10 salariés sur une même période de 30 jours dans les entreprises d'au moins 50 salariés seront de la compétence du juge administratif.
Des modèles de courrier pour vous aider. Afin de sécuriser vos licenciements, vous pouvez utiliser les modèles de lettres établis par le Gouvernement. Vous devez alors choisir le modèle adapté au motif du licenciement concerné.
=> Consultez le modèle-type de la lettre de licenciement pour motif économique (10 salariés et plus)
A retenir
Pensez à solliciter les services de Pôle Emploi pour obtenir le dossier d’information relatif au contrat de sécurisation professionnel que vous devez remettre au(x) salarié(s). En présence d’un licenciement collectif, n’oubliez pas de consulter les représentants du personnel ; s’il n’y a pas de représentants du personnel, soyez en mesure de produire un procès-verbal de carence établi à la suite de l’organisation infructueuse d’élections.
Même si cela peut apparaître comme une lapalissade, la mise en place d’un plan de licenciement économique engage l’entreprise dans une procédure complexe et longue. Voilà pourquoi il est essentiel de s’entourer des compétences de professionnels qui sauront vous guider dans ces démarches.
J'ai entendu dire
J’ai entendu dire que le licenciement d’un salarié dit « protégé » (délégué du personnel, membre du comité d’entreprise, délégué syndical, etc.) était soumis à des conditions supplémentaires. Qu’en est-il ?Si vous envisagez le licenciement d’un salarié protégé, vous devez effectivement obtenir une autorisation de l’inspection du travail.
- Articles L 1233-1 et suivants du Code du travail
- Loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l’emploi (article 18)
- Loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques (article 289)
- Loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels (article 94)
- Ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 relative à la prévisibilité et la sécurisation des relations de travail, articles 15 à 20
- Loi n° 2018-217 du 29 mars 2018 ratifiant diverses ordonnances prises sur le fondement de la loi n° 2017-1340 du 15 septembre 2017 d’habilitation à prendre par ordonnances les mesures pour le renforcement du dialogue social, article 7
- Décret n° 2013-554 du 27 juin 2013 relatif à la procédure de licenciement collectif pour motif économique
- Décret n° 2017-1820 du 29 décembre 2017 établissant des modèles types de lettres de notification de licenciement
- Arrêté du 27 juin 2014 fixant la date d'entrée en vigueur des dispositions de l'article 5 du décret n° 2013-554 du 27 juin 2013 relatif à la procédure de licenciement collectif pour motif économique (dématérialisation des PSE)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 16 novembre 2010, n° de pourvois 09-69485 à 09-69489 (appréciation du seuil d’effectif et du nombre de licenciements au niveau d’une UES)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 19 mai 2016, n° 15-11047 (reclassement salariés et départs volontaires)
- Arrêt du Conseil d’État, 4ème et 5ème chambres réunies, du 30 mai 2016, n° 385730 (vérification de la qualité des signataires du PSE)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 22 mars 2017, 15-28782 (priorité de réembauche et absence de manifestation du salarié licencié)
- Arrêt de la CJUE, du 22 février 2018, n° C‑103/16 (licenciement collectif comprenant une salariée enceinte)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 30 janvier 2019, n° 17-27796 (défaut de mention de la priorité de réembauche dans la lettre de licenciement)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 17 avril 2019, n° 17-21175 (priorité de réembauche et délai de réponse imposé au salarié)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 26 juin 2019, n° 18-11220 (priorité de réembauche sur un poste préalablement refusé par le salarié)
- Arrêté du 21 octobre 2019 relatif à la dématérialisation des procédures de licenciement collectif pour motif économique et de rupture conventionnelle collective
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale du 9 juin 2021, n° 20-11796 (versement de dommages et intérêt en cas de licenciement économique en l’absence d’un CSE
Difficultés économiques : quelles alternatives au licenciement ?
Solliciter le recours à l’activité partielle
Qu’est-ce que c’est ? Lorsque des difficultés surviennent dans l’entreprise, l’activité partielle peut s’avérer être une alternative efficace à une mesure de compression des effectifs. Cela permet donc de mettre les salariés en « chômage technique » le temps que l’activité reprenne. Ce dispositif trouve donc un intérêt lorsque les difficultés sont liées à une baisse de l’activité (baisse du carnet de commandes par exemple) mais peut également être mis en place lorsque l’entreprise fait face à des travaux temporaires dans des conditions différentes.
Comment faire ? L’employeur qui souhaite recourir à ce dispositif doit en faire la demande préalable auprès de la Dreets (Direction régionale de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités). Il doit adresser sa demande dans un délai de 30 jours à compter du placement de ses salariés en activité partielle via le site activitepartielle.emploi.gouv.fr. Il devra préciser le motif, la période concernée (période ne pouvant excéder 6 mois sur l’année), les circonstances détaillées et la situation économique à l'origine de la demande et le nombre de salariés concernés. Dans les entreprises de 50 salariés ou plus, l’employeur devra consulter pour avis le CSE préalablement à sa demande de mise en œuvre de l’activité partielle (motifs de recours, catégories de salariés visées, activités concernées, etc.).
Autorisation de l’administration. L’administration a un délai de réponse de 15 jours calendaires à réception de la demande. Lorsqu'elle autorise l’activité partielle, elle attribue un volume d’heures de « chômage » qui ne peut excéder 1 000 heures par an et par salarié. Pour chaque heure chômée, l’employeur recevra une allocation représentant une fraction de la rémunération du salarié. Cette allocation constituera une aide non négligeable pour l’employeur qui devra en contrepartie maintenir une fraction de la rémunération brute du salarié en activité partielle.
Attention ! En cas de fraude ou de fausse déclaration, l’employeur encourt jusqu’à 2 ans d’emprisonnement et 30 000 € d’amende.
Utilisation du volume d’heures. L’employeur est libre d’utiliser les heures attribuées comme il le souhaite et en fonction des impératifs et nécessités de service : soit il s’agit d’une simple réduction de l’activité et les salariés ne travailleront alors qu’une partie de leur temps de travail, le reste étant en activité partielle, soit l’activité est inexistante et, dans ce cas, les salariés seront placés en activité partielle totale.
A noter. Ce dispositif est totalement dématérialisé et fait l’objet d’une déclaration mensuelle des heures travaillées et chômées générant ensuite le versement des allocations.
Le saviez-vous ?
Lorsqu'il a déjà bénéficié du dispositif au cours des 36 derniers mois, l’employeur qui souhaite faire une nouvelle demande d'activité partielle doit prendre des engagements : préserver les emplois, procéder à toutes les actions de formation nécessaires et ne pas supprimer de postes dans l’entreprise. Lorsque l’employeur a déjà eu recours à l’activité partielle au cours des 3 dernières années, il doit d’ailleurs procéder à un détail des actions réalisées.
Encourager les départs volontaires
Qu’est-ce que c’est ? Lorsqu’une entreprise connaît des difficultés et que des suppressions de poste s’avèrent inévitables, elle peut aussi établir un plan de départs volontaires. Ce plan permet aux salariés qui souhaitent quitter l’entreprise, de le faire dans des conditions généralement favorables. Ces plans de départs sont en principe incitatifs : indemnités de départs plus favorables, aides à la création / reprise d’entreprise, aide à la reconversion professionnelle, à la mobilité géographique…
En pratique. Ces plans de départs volontaires existent la plupart du temps dans les entreprises de plus de 50 salariés, confrontées à un « grand licenciement » (plus de 10 salariés au cours d’une même période de 30 jours) et qui nécessitent la mise en place d’un plan de sauvegarde de l’entreprise (PSE). Ces plans ne sont pas règlementés et c’est l’entreprise qui en fixe les conditions en fonction de sa capacité d’adaptation. Ils peuvent être autonomes et proposés très en amont pour « anticiper » des difficultés économiques.
Un accord de rupture amiable. La rupture du contrat en application du plan de départs volontaires est formalisée par un accord de rupture amiable. Notez que l’indemnité de rupture allouée dans une telle situation relève de la liberté contractuelle, aussi, même si le calcul de l’indemnité prévu au PSE est moins favorable que l’indemnité mentionnée dans l’accord de rupture, le surplus ne constituera pas un indu. L’employeur ne pourra donc pas prétendre à son remboursement.
Le saviez-vous ?
Une rupture conventionnelle collective peut être mise en place par accord collectif validé par la Dreets pour permettre de réduire l’effectif d’une entreprise alors même qu’elle ne subit pas de difficultés économiques particulières.
=> Pour en savoir plus, consultez notre fiche : Mettre en place une rupture conventionnelle collective
En cas d’annulation du plan de départ volontaire. Les ruptures de contrats consécutives à un plan de départ volontaire qui sera finalement annulé par le juge sont, elles aussi, « nulles », même celles des salariés qui n’auraient pas agi en justice. Il en résulte que tous les salariés concernés doivent donc être indemnisés, même ceux qui n’ont pas agi en justice.
Organiser des départs en retraite anticipée
Quel objectif ? Les salariés proches de l’âge de départ à la retraite peuvent, sous certaines conditions, bénéficier d’un départ en préretraite. Cela permet à leur bénéficiaire de cesser leur activité, tout en étant encore rémunéré.
Comment ? Il existe deux dispositifs en vigueur : la préretraite amiante (pour les salariés exposés à l’amiante au cours de leur activité) et la préretraite « maison » généralement intégrée à un PSE ou à un plan de départs volontaires. Ces dispositifs peuvent, à leur échelle et en fonction de la capacité de l’entreprise, permettre de préserver les emplois menacés dans l’entreprise en favorisant un départ en retraite anticipé.
A retenir
Le licenciement pour motif économique doit constituer l’ultime mesure à mettre en œuvre lorsque l’entreprise connaît des difficultés financières ou relatives à son activité. Avant d’envisager de telles mesures, il sera indispensable d’avoir épuisé tous les moyens alternatifs exposés.
J'ai entendu dire
J’ai été contraint de licencier un salarié pour motif économique. Désormais mon activité repart à la hausse. Puis-je réembaucher ?
Oui. Un licenciement pour motif économique ne vous empêche pas d’embaucher un nouveau salarié. La loi interdit tout de même d’embaucher un salarié en CDD pour accroissement temporaire d’activité dans les 6 mois qui suivent la notification du licenciement. Attention néanmoins : tout d’abord, si vous réembauchez du personnel sur le même poste que le salarié licencié, cela pourrait permettre à ce dernier de démontrer que son licenciement n’était pas réellement fondé et que des alternatives auraient pu être mises en œuvre. Ensuite, si votre ancien salarié vous a expressément fait part de son souhait de bénéficier de sa priorité de réembauche, vous serez tenu de lui proposer le poste, en priorité.
J’ai fait une demande d’activité partielle. J’ai reçu l’accord de la Direccte et je dispose de 500 heures chômées par salarié. Je ne vais pas les utiliser en totalité. Est-ce un problème ?
Non. Vous disposez d’une grande liberté dans l’utilisation de ces heures et l’indemnisation est effectuée sur la base de déclaration des heures réelles du mois. L’administration ne vous reprochera rien. Il est d’ailleurs préférable de prévoir « plus » que « pas assez », surtout lorsque votre visibilité est courte (un carnet de commandes vide peut très rapidement se remplir mais parfois cela peut prendre du temps).
- Articles L.5122-1 à L.5122-5 du Code du travail
- Articles R.5122-1 à R.5122-26 du Code du travail
- Article L.5124-1 du Code du travail
- Articles L.1233-61 à L.1233-64 du Code du travail
- Ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 relative à la prévisibilité et la sécurisation des relations de travail, articles10, 11, 12, 13 et 40
- Circulaire DGEFP N°2013-12 du 12 juillet 2013 relative à la mise en œuvre de l'activité partielle
- Arrêté du 26 août 2013 fixant les contingents annuels d'heures indemnisables
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 17 octobre 2018, n° 17-16869 (nullité des ruptures de contrat faisant suite à l’annulation d’un plan de départs volontaires)
- Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 3 février 2021, n° 19-23237 (indemnité de rupture amiable – plan de départs volontaires)
