CCMI : un dirigeant responsable pour un contrat qu’il n’a pas signé ?
Garantie de paiement en CCMI : précision sur la responsabilité pénale de l’entrepreneur principal
Plusieurs sociétés intervenant comme sous-traitantes dans le domaine de la construction déposent plainte à l’encontre d’un constructeur ayant fait appel à leurs services.
Elles reprochent à ce constructeur de leur avoir fait signer des contrats de sous-traitance ne permettant pas d’établir une garantie des paiements pour les sous-traitants.
Or, pour les contrats de sous-traitance découlant d’un contrat de construction de maison individuelle (CCMI), cette garantie des paiements est une obligation dont ne saurait s’exonérer le constructeur agissant en tant qu’entrepreneur principal.
Cette garantie doit permettre aux sous-traitants d’être protégés en cas de défaillance de l’entrepreneur principal, par exemple en cas de liquidation judiciaire de ce dernier, et donc d’être assurés de percevoir les sommes qui leur sont dues au titre du chantier.
Elle peut prendre, par exemple, la forme d’une garantie bancaire ou d’une délégation de paiement par laquelle le client s’engage à payer lui-même les sous-traitants en lieu et place de l’entrepreneur principal.
Comme précisé, la mise en place de cette garantie est obligatoire et le constructeur qui ne s’y plie pas met en jeu sa responsabilité pénale et risque une condamnation pouvant aller jusqu’à 2 ans d’emprisonnement et 18 000 € d’amende.
Dans l’affaire évoquée ici, un dirigeant a vu sa responsabilité pénale engagée sur ce principe, mais il conteste cette mise en cause.
Son entreprise a conclu un CCMI sans prévoir cette garantie, mais il se trouve que ce n’est pas lui qui a, personnellement, signé le contrat. Or, pour ce dirigeant, on ne peut être condamnée que pour ses propres actions.
Un argumentaire que ne retient pas le juge, lequel rappelle que le dirigeant d’une société de construction doit être en mesure de veiller au respect des obligations légales qui incombent à son entreprise.
Le fait qu’il signe de sa main ou non les contrats litigieux n’a pas d’importance : sa responsabilité pénale peut être engagée, conclut le juge.
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Abus de biens sociaux : illustration des circonstances aggravantes
Abus de biens sociaux : quid de l’envoi de fonds à une société étrangère ?
L’abus de biens sociaux se définit comme « le fait, pour les gérants, de faire, de mauvaise foi, des biens ou du crédit de la société, un usage qu'ils savent contraire à l'intérêt de celle-ci, à des fins personnelles ou pour favoriser une autre société ou entreprise dans laquelle ils sont intéressés directement ou indirectement », l’exemple le plus parlant étant l’utilisation de fonds monétaires de la société pour le compte personnel du dirigeant.
Les sanctions encourues pour ces faits sont, au maximum, de 5 ans d’emprisonnement et de 375 000 € d’amende.
Cependant, ces peines peuvent être alourdies lorsque certaines circonstances, considérées comme aggravantes, ont accompagné les abus de biens sociaux.
Cela peut être le cas lorsqu’il est fait utilisation d’un compte bancaire ouvert à l’étranger ou en cas « d’interposition d’une personne établie à l’étranger ».
Dans une affaire ayant été récemment portée à l’attention des juges de la Cour de cassation, des éclaircissements concernant cette dernière notion ont pu être apportés.
Le dirigeant d’une société ayant justement été condamné pour des faits d‘abus de biens sociaux, les juges ont retenu une circonstance aggravante liée à « l’interposition d’une personne établie à l’étranger » après avoir constaté que le dirigeant avait opéré un virement bancaire d’un montant de 32 000 € depuis les comptes de sa société vers une autre société basée à l’étranger.
Pour le dirigeant, la reconnaissance de cette circonstance aggravante n’est pas justifiée : l’interposition d’une personne établie à l’étranger suppose que ladite personne a servi d’intermédiaire entre la société et son dirigeant pour faire transiter les fonds litigieux.
Il rappelle que ce n’est ici pas le cas puisque la personne établie à l’étranger, une société luxembourgeoise, était la destinataire finale du virement. Les sommes n’ont pas été par la suite créditées sur les comptes bancaires du dirigeant.
Pour lui, cela ne permet donc pas de caractériser qu’il y ait réellement eu une interposition entre la société lésée et son dirigeant.
Un argument peu convaincant pour les juges qui rappellent que, même s’il n’a pas reçu les sommes personnellement, il est également le dirigeant de la société luxembourgeoise. Cela suffit à établir l’interposition d’une personne étrangère dans le processus d’abus de biens sociaux.
L’application de la circonstance aggravante est donc ici bien justifiée, selon les juges.
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Santé et sécurité des travailleurs : nouvel engagement international de la France
Prévention des risques professionnels : un engagement confirmé !
Après un vote unanime du Sénat en février, l’Assemblée nationale a adopté le 15 octobre dernier le projet de loi autorisant la ratification de la convention nᵒ 155 de l’Organisation Internationale du Travail (OIT) relative à la santé et à la sécurité des travailleurs.
Cette nouvelle étape et la publication de la loi au Journal Officiel ouvre la voie à la ratification formelle par le président de la République.
Adoptée en 1981 et érigée en convention fondamentale en 2022, la convention no 155 fixe les principes essentiels d’une politique nationale de prévention des risques professionnels, applicables à toutes les branches d’activité.
Elle précise également les responsabilités respectives des employeurs, des travailleurs et des autorités publiques.
En autorisant cette ratification, la France :
- réaffirme son engagement pour un environnement de travail sûr et salubre ;
- renforce la participation des partenaires sociaux aux politiques de prévention ;
- complète l’ensemble des conventions fondamentales de l’OIT désormais intégrées à son corpus juridique.
Cette ratification prochaine s’inscrit dans la continuité du 4ᵉ Plan santé au travail, lancé en 2021 par le ministère du Travail et qui vise à développer une véritable culture de la prévention au travail et à réduire les accidents de travail et les maladies professionnelles.
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Évaluation du salarié : sur quels critères ?
Évaluation de « l’honnêteté » et du « bon sens » des salariés : licite ?
Dans le cadre du contrat de travail, l’employeur a la possibilité de donner des directives, d’en contrôler l’application et de sanctionner les éventuels manquements du salarié.
Ce pouvoir de contrôle se traduit par la possibilité pour l’employeur d’évaluer, tout au long de la relation de travail, l’aptitude professionnelle du salarié.
Mais ce pouvoir d’évaluation n’est pas absolu : il doit reposer sur des critères précis, objectifs et pertinents au regard de la finalité professionnelle.
Dans ce cadre, une entreprise a recours à un « entretien de développement individuel » destiné à évaluer les compétences techniques et comportementales des salariés.
Dans la partie consacrée aux comportements professionnels figurent notamment les critères d'« optimisme », d'« honnêteté » et de « bon sens » des salariés.
Estimant ces critères trop subjectifs et moralisateurs, plusieurs salariés saisissent le juge. Pour eux, ces notions portent atteinte à la vie personnelle des salariés et ne présentent aucun lien direct avec leurs aptitudes professionnelles.
Ce dont se défend l’employeur, qui rappelle que la capacité professionnelle d’un salarié ne s’arrête pas à ses seules aptitudes professionnelles et techniques, mais aussi à ses facultés d’adaptation et à ses compétences d’intégration à une équipe.
Par ailleurs, les notions critiquées par les salariés ne se trouvent que dans la partie relative à l’évaluation comportementale des salariés, laquelle n’est pas la partie principale relative à l’évaluation du travail et des objectifs.
Ce qui ne suffit pas à convaincre le juge, qui donne raison aux salariés : la méthode d’évaluation des salariés doit reposer sur des critères précis, objectifs et pertinents au regard des compétences professionnelles du salarié.
Si l’utilisation de critères comportementaux dans la méthode d’évaluation n’est pas interdite, elle n’est admise qu’à la condition d’être justifiée par la nature de l’emploi occupé et doit rester strictement liée à l’activité professionnelle. Ce qui n’est pas le cas ici…
En outre, le grand nombre de critères comportementaux retenus ne permet ni d’en connaître la pondération exacte dans l’évaluation, ni de vérifier l’existence d’un équilibre réel avec les critères techniques.
Une telle opacité dans les critères retenus ne permet pas de répondre aux critères d’objectivité et d’impartialité qui s’imposent à tout dispositif d’évaluation.
Dès lors, « l'entretien de développement individuel » mis en place dans l’entreprise est bel et bien illicite : l’employeur n’est plus autorisé à y recourir en l’état.
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Chèque énergie : ouverture du guichet
Chèque énergie : une demande possible jusqu’en février 2026
Pour rappel, le chèque énergie est une aide d’État forfaitaire pour le paiement des dépenses énergétiques du logement des ménages modestes.
Cette année, la campagne d’envoi débutera le 3 novembre 2025 et devrait suivre, en fonction des départements, le calendrier disponible ici.
Pour les ménages éligibles qui n’ont pas été automatiquement identifiés, il leur est possible de demander le chèque énergie jusqu’au 28 février 2026 par courrier ou sur le guichet en ligne disponible ici. Le site comporte également un simulateur d’éligibilité à l’aide.
La campagne d’envoi se fera en 2 temps :
- pour les demandes effectuées jusqu’à début novembre, les chèques énergie seront envoyés à partir du 19 novembre 2025 ;
- pour les demandes postérieures, les chèques énergie seront envoyés au fur et à mesure.
Notez qu’à partir de 2026, les chèques énergie seront envoyés au printemps et pourront être demandés toute l’année.
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Passeport prévention : disponible pour les employeurs ?
Un accès des employeurs à l’espace numérique à partir du 16 mars 2026
Le « Passeport de prévention » est un dispositif numérique nominatif permettant de garantir, fiabiliser et regrouper en un seul lieu sécurisé toutes les données concernant les formations et qualifications en (SST) d’un salarié ou d’un demandeur d’emploi.
Pour ce faire, ce Passeport doit être renseigné selon les cas :
- par l’organisme de formation en charge de la formation ;
- par l’employeur ;
- ou par le salarié directement.
Depuis le 1er septembre 2025, les organismes de formations, qui ont d’ores et déjà accès à l’espace numérique du passeport de prévention, doivent obligatoirement déclarer certaines formations délivrées en santé et sécurité au travail, pour le compte d’un employeur, d’un stagiaire ou d’un demandeur d’emploi.
À compter du 16 mars 2026, les employeurs auront également accès à leur espace personnel pour y renseigner les formations santé et sécurité au travail dispensées en interne dans l’entreprise. Ils disposeront également d’un droit de vérification et de correction des données renseignées par les organismes de formation au titre des formations dispensées aux salariés.
Dans le but de simplifier les démarches de l’employeur et de faciliter la prise en main, le ministère rappelle que l’obligation déclarative débutera de manière progressive.
Il est ainsi prévu que l’employeur ne déclare, dans un 1er temps, que :
- les formations SST obligatoires encadrées par la réglementation ;
- les formations obligatoires requises pour les postes nécessitant une autorisation ou une habilitation de travail.
Côté délais, ils peuvent varier selon l’auteur de la saisie :
- si la formation est déclarée par l’organisme de formation qui la met en œuvre, cette déclaration devra être effectuée avant l’échéance d’un délai de 3 mois suivant la fin du trimestre au cours duquel la formation s’est terminée, dans le cas où elle donne lieu à une attestation de formation ;
- si la formation est déclarée par l’employeur et qu’elle donne lieu à une attestation de formation, il devra déclarer la formation dispensée en interne dans un délai de 6 mois maximum suivant la fin du trimestre au cours duquel elle s’est achevée.
Attention : dans l’hypothèse où la formation donne lieu à un justificatif de réussite, ce n’est pas la date de fin de formation qui est prise en compte pour apprécier ces délais de 3 ou 6 mois, mais la date du début de validité du justificatif de réussite.
Pour l’heure, un délai supplémentaire de 3 mois est appliqué à ces délais impartis pour la déclaration et la vérification des données jusqu’à la mise à disposition d’un outil d’import en masse des formations, qui devrait être fonctionnel dès le 9 juillet 2026.
Ainsi, dès le 9 juillet 2026, les organismes de formation comme les employeurs pourront importer des données en masse et déclarer plus facilement les formations dispensées.
Pour mieux appréhender cet espace, un accompagnement pédagogique sera proposé dès janvier 2026, comprenant :
- des documents techniques ;
- des supports d’accompagnement ;
- des webinaires techniques mensuels.
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Permis moto : du nouveau !
Conduite en circulation : une épreuve plus courte !
Pour rappel, le permis A1 permet de conduire une motocyclette dont :
- la cylindrée n’excède pas 125 cm3 ;
- la puissance n’excède pas 11 kW ;
- le rapport puissance / poids est inférieur à 0,1 kW par kg.
Le permis A2 permet, quant à lui, de conduire une moto :
- dont la puissance n’excède pas 35 kW ;
- dont le rapport puissance / poids est inférieur à 0,2 kW/kg
- et qui n'est pas issue d'un modèle développant plus de 70 kW.
Le volet pratique de l’examen se compose d’une épreuve hors circulation d'admissibilité et d’une épreuve en circulation.
L’épreuve en circulation est jusqu’à présent de 40 minutes. À partir du 1er novembre 2025, elle durera 32 minutes.
Jusqu’à présent, l’expert doit construire son parcours de manière à permettre au candidat de suivre un itinéraire ou de se rendre vers une destination préalablement établie de manière autonome pendant une durée globale d'environ 10 minutes.
À partir du 1er novembre 2025, cette durée sera réduite à 5 minutes. De même, la phase de conduite effective qui doit actuellement être de 26 minutes sera, à compter du 1er novembre 2025, de 25 minutes.
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On connaît le montant du plafond de la Sécurité sociale au 1er janvier 2026 !
Plafond de la Sécurité sociale : une augmentation de 2 % au 1er janvier 2026
L’administration sociale indique une revalorisation du plafond annuel de la Sécurité sociale (PASS) à hauteur de 2 %, soit 48 060 € au 1er janvier 2026 contre 47 100 € en 2025.
Le plafond mensuel est ainsi fixé à 4 005 € au 1erjanvier 2026.
Pour rappel, le PASS est parfois décliné en plafond mensuel, hebdomadaire, journalier, voire horaire.
- Il constitue un outil utile pour : connaître le montant maximal des rémunérations et / ou des gains à prendre en compte pour le calcul de certaines cotisations ;
- définir la base de calcul de certaines contributions ;
- calculer les droits sociaux des assurés.
Un arrêté fixant ce niveau du plafond sera publié avant la fin de l’année 2025. Notez qu’à Mayotte, le montant du plafond mensuel de la sécurité sociale sera fixé à 3 021 € au 1er janvier 2026.
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Plus-value immobilière : pas d’exonération pour une résidence principale « temporaire » ?
Résidence principale : une notion qui fait encore débat !
Pour rappel, les gains, appelés « plus-values », réalisés à l’occasion de la vente d’un bien immobilier qui constitue la résidence principale du vendeur au jour de la vente, sont en principe exonérés d’impôt.
Par « résidence principale », il faut entendre la résidence habituelle et effective du propriétaire au jour de la vente. Dans ce cadre, une occupation irrégulière/isolée ou une simple domiciliation administrative ne suffit pas à bénéficier de cet avantage fiscal. Illustration avec une affaire récente…
Dans cette affaire, un particulier acquiert, au cours de la même année, une villa qui devient sa résidence principale et un appartement qu’il met en location.
Compte tenu de la dangerosité du site sur lequel se trouve la villa, attestée par des mesures de sûreté prises par le maire de la commune, il décide de déménager dans l’appartement, devenu inoccupé, le temps d’obtenir les garanties nécessaires sur la sécurité des lieux où se situe la villa.
Quelques mois plus tard, le propriétaire réemménage dans sa villa et décide de vendre l’appartement qu’il déclare comme constituant sa résidence principale afin de bénéficier de l’exonération d’impôt sur les plus-values correspondantes.
Une erreur, selon l’administration fiscale qui, à la suite d’un contrôle fiscal, refuse d’accorder au particulier le bénéfice de cette exonération : l’appartement ne constituait pas sa résidence principale au jour de la vente, puisque selon elle, sa résidence principale, c’est la villa.
Elle constate, en effet, que :
- le particulier a acquis la villa en pleine connaissance de sa situation géologique défavorable, comme l’atteste une étude de faisabilité ayant fait état d'éboulements et ayant constaté le caractère continu du phénomène de recul de la falaise ;
- aucun événement particulier ne s'est produit qui aurait justifié un déménagement dans l’appartement ;
- aucun travaux de consolidation de la falaise n’ont été entrepris avant le retour dans la villa ;
- l’appartement était inhabitable au jour présumé de son emménagement, comme l’attestent l'affaissement du sol dans plusieurs pièces, un dégât des eaux dans la cuisine, des désordres dans la salle de bains dus à des infiltrations par la toiture et le mauvais état de l'ensemble des équipements sanitaires et de cuisine.
Pour le particulier, l’appartement constituait pourtant bel et bien sa résidence principale et pour se justifier, il apporte les éléments de preuve suivants :
- la dangerosité du terrain de la villa représentait un événement spécifique justifiant un déménagement ;
- il a signalé son changement d'adresse comme le prouve une attestation du notaire ;
- plusieurs attestations de voisinage attestent que l'appartement était en état d'être habité et que son nom figurait sur la boîte aux lettres ;
- il fournit 4 contraventions pour stationnement irrégulier et son assujettissement à la taxe d'habitation à l’adresse de l’appartement.
Sauf qu’aucun de ces éléments ne suffit à établir une résidence habituelle et effective au cours de la période considérée à l’adresse de l’appartement, maintient l’administration.
En outre :
- aucun changement d'adresse n’a été signalé aux fournisseurs d'électricité, de gaz et d'eau, ni même à la banque ;
- la consommation à la villa était restée stable durant toute la période en cause, à l’inverse de celle de l'appartement qui ne reflétait pas une occupation par une famille de 4 personnes, dont 3 enfants, comme celle du propriétaire.
Au vu de l’ensemble de ces éléments, l’administration constate que rien ne prouve que l’appartement constituait la résidence habituelle et effective du particulier au jour de la vente.
Ce que constate aussi le juge qui donne raison à l’administration fiscale : l’exonération ne peut pas être accordée ici.
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Pensions alimentaires : en route vers la défiscalisation ?
Fiscalité des pensions alimentaires : une réforme en vue ?
Pour mémoire, une personne tenue de verser une pension alimentaire dans le cadre de l’obligation légale de contribuer à l’entretien et à l’éducation d’un enfant peut déduire les sommes réellement versées de son revenu imposable. En parallèle, la pension reçue, qu’elle soit en argent ou sous forme d’avantage en nature, doit être déclarée et est imposable entre les mains du bénéficiaire.
Cette règle fiscale fait toutefois débat. Selon une députée, elle crée une inégalité, en particulier au détriment des familles monoparentales.
En effet, la pension alimentaire est censée couvrir les dépenses liées à l’enfant (logement, alimentation, scolarité, etc.) et ne devrait donc pas être assimilée à un revenu supplémentaire pour le parent qui la perçoit. Or, le fait d’imposer cette somme réduit d’autant les ressources disponibles pour l’enfant.
De plus, cette imposition peut avoir des conséquences sociales non négligeables, en entraînant la perte ou la diminution de certaines aides, comme la prime d’activité ou les allocations logement.
Face à cette situation, la question a été posée au Gouvernement : envisage-t-il de modifier la fiscalité applicable afin que les pensions alimentaires soient intégralement consacrées à l’entretien et à l’éducation des enfants, sans pénaliser davantage les familles monoparentales ?
Réponse : Non ! Et pour deux raisons. Une réforme en ce sens créerait, selon le Gouvernement, une rupture d’égalité :
- entre les parents élevant seuls un enfant, selon l’origine de leurs revenus : un parent isolé ne percevant pas de pension serait, à revenu équivalent, imposé sur l’ensemble de ses ressources, contrairement à celui bénéficiant d’une exonération ;
- entre le parent bénéficiaire, qui profiterait à la fois de la majoration du quotient familial et de l’exonération de la pension reçue, et le parent débiteur, qui ne pourrait ni déduire la pension versée, ni bénéficier d’une telle majoration : cette asymétrie irait, selon le Gouvernement, à l’encontre du principe d’égalité devant les charges publiques.
Une réponse claire du Gouvernement, certes, mais qui ne semble pas avoir découragé les partisans d’une réforme de cette fiscalité jugée inéquitable. Car, si l’exécutif ferme la porte à toute modification du régime actuel, le débat, lui, reste plus que jamais ouvert.
En effet, dans le cadre des débats relatifs à la loi de finances pour 2026, une proposition a été faite en ce sens. Un amendement relance l’idée d’une défiscalisation des pensions alimentaires, mesure réclamée de longue date par les associations de familles monoparentales.
Il est ainsi proposé une défiscalisation des pensions alimentaires dans la limite de 4 000 € par enfant et par an, plafonnée à 12 000 € par foyer. Corrélativement, le dispositif inclurait une demi-part fiscale pour les parents débiteurs, afin de ne pas les pénaliser.
Si cette disposition venait à être confirmée lors de l’examen du texte à l’Assemblée, il s’agirait d’une avancée majeure après plusieurs tentatives législatives infructueuses.
Reste à savoir si le Sénat suivra cette orientation et si le Gouvernement, jusqu’ici réticent, acceptera de laisser évoluer un système fiscal dont les fondements datent d’une époque où les modèles familiaux étaient bien différents de ceux d’aujourd’hui.
