
Bail commercial : la résiliation anticipée et ses enjeux juridiques

Ce que dit la loi sur la résiliation anticipée
Le bail commercial est généralement conclu pour une durée de 9 ans, avec la possibilité pour le locataire de donner congé tous les 3 ans. En dehors de ces échéances, il s’agit d’une résiliation anticipée, qui ne peut intervenir que dans certaines conditions.
Le congé triennal en pratique
L’article L.145-4 du Code de commerce prévoit que le locataire peut donner congé à l’expiration de chaque période triennale. Cette faculté constitue la forme la plus courante de rupture anticipée du bail, mais elle doit être exercée dans le respect du formalisme légal :
● Notification par acte d’huissier ou lettre recommandée avec accusé de réception
● Préavis de 6 mois minimum
● Respect des dates triennales (3e, 6e ou 9e anniversaire)
Certaines conventions excluent cette possibilité. C’est notamment le cas des baux conclus pour une durée ferme de 9 ans sans clause de résiliation triennale, fréquents dans certains secteurs (restauration, franchise, etc.).
Résilier à l’amiable, une option souple mais encadrée
En dehors du cadre légal, les parties peuvent convenir d’un commun accord de mettre fin au bail avant son échéance. Cette résiliation amiable nécessite l’accord exprès du bailleur et du preneur, idéalement formalisé par un écrit signé précisant les modalités de libération des lieux.
Bon à savoir : Pour sécuriser ce type de rupture, il est fortement recommandé de signer toutes les pages PDF du protocole d’accord ou de l’avenant de résiliation, afin d’éviter toute contestation ultérieure de l’une des parties.
En cas de manquement contractuel
Lorsqu’une des parties ne respecte pas ses obligations contractuelles, l’autre peut demander la résiliation judiciaire du bail.
Les causes les plus fréquentes de contentieux sont les suivantes :
● Retards répétés ou non-paiement des loyers
● Sous-location non autorisée
● Utilisation non conforme du local (exercice d’une activité différente de celle prévue)
● Absence d’assurance du preneur
Le bailleur peut alors saisir le tribunal judiciaire pour demander la résiliation aux torts exclusifs du locataire.
La clause résolutoire, une arme contractuelle
De nombreux baux commerciaux comportent une clause résolutoire. Celle-ci prévoit la résiliation automatique du contrat en cas de manquement grave du locataire (souvent le non-paiement des loyers).
Mais pour être appliquée, cette clause doit suivre une procédure stricte :
1. Envoi d’un commandement de payer visant la clause résolutoire
2. Délai d’un mois laissé au locataire pour s’exécuter
3. Saisine du juge si le locataire ne régularise pas
Le juge peut, dans certains cas, accorder des délais de paiement au locataire (article L.145-41 du Code de commerce).
Résiliation par le bailleur : quelles sont les options ?
Si le locataire dispose de la liberté triennale, le bailleur, lui, est davantage limité dans ses possibilités de rupture anticipée.
Congé avec offre de renouvellement refusée
Le bailleur peut donner congé à l’expiration du bail commercial (au bout de 9 ans) avec refus de renouvellement, à condition de verser une indemnité d’éviction, sauf motif grave et légitime.
Mais en cours de bail, la résiliation par le bailleur ne peut se faire que dans les cas suivants :
● Manquement du locataire (via clause résolutoire ou action judiciaire)
● Expropriation ou démolition pour cause d’insalubrité
● Clause de résiliation convenue pour certains événements (p. ex. vente du local)
Dans certains baux, une clause de résiliation unilatérale en cas de vente du local est insérée. Elle permet au bailleur de rompre le bail moyennant préavis, souvent de 6 mois. Attention, cette clause peut être jugée abusive si elle déséquilibre excessivement le contrat au détriment du locataire.
Un départ non encadré peut coûter cher
En l’absence de congé donné dans les règles (notamment hors échéance triennale ou sans respect du préavis), le bail reste juridiquement en vigueur. Le bailleur est alors en droit d’exiger le paiement des loyers et charges jusqu’à la fin du contrat ou, à défaut, jusqu’à la relocation effective du local à un nouveau preneur.
À cela peut s’ajouter la responsabilité du locataire, en particulier si l’état des lieux de sortie révèle des détériorations ou un défaut d’entretien. Dans de telles situations, le bailleur peut également décider de conserver tout ou partie du dépôt de garantie, voire d'engager une action en justice pour réclamer l’indemnisation de son préjudice.
Le risque est encore plus élevé si une caution s’est engagée solidairement. Cette dernière pourra être poursuivie dans les mêmes conditions.
Cession de bail ou de fonds de commerce, une alternative à la rupture
Plutôt que de résilier un bail en cours, un locataire peut envisager sa cession à un tiers, notamment dans le cadre de la vente du fonds de commerce.
Cette solution permet de se désengager sans pénalités, tout en valorisant le droit au bail. Elle reste toutefois encadrée, car le bail peut prévoir l’interdiction de céder sans l’accord du bailleur ou en dehors d’une cession de fonds. Ce dernier peut imposer des conditions (agrément, garanties, ajustement du loyer).
Si les clauses le permettent, la cession constitue une alternative efficace à la résiliation anticipée, à condition de respecter les formalités prévues et d’en informer clairement le bailleur.
Étapes clés de l’état des lieux de sortie et de la restitution des locaux
Quel que soit le motif de résiliation, la fin du bail implique plusieurs obligations du locataire :
1. État des lieux de sortie (obligatoire depuis 2014)
2. Remise des clés contre récépissé
3. Exécution des réparations locatives
4. Restitution du local dans l’état prévu au bail
L’omission de ces étapes peut générer un litige, notamment sur la restitution du dépôt de garantie.
Quelques recommandations pratiques pour éviter les litiges
Pour les bailleurs comme pour les locataires, voici quelques bonnes pratiques pour anticiper une rupture en toute sécurité :
● Lire attentivement les clauses de résiliation du bail dès la signature
● Anticiper les échéances triennales
● Préparer les échanges écrits (courrier recommandé, e-mails)
● Faire appel à un professionnel du droit en cas de doute
En cas de désaccord entre les parties, il est conseillé d’envisager une tentative de résolution amiable (conciliation, médiation) avant tout recours au juge.
Publi-rédactionnel
C’est l’histoire d’une société qui fait l’objet d’un contrôle fiscal… un peu trop long selon elle…
Les lecteurs ont également consulté…
Crédit d’impôt recherche : exclusion officielle de certaines dépenses

CIR : officialisation des dépenses de recherche non retenues
Pour rappel, la loi de finances pour 2025 a aménagé le calcul du crédit d’impôt recherche. Les entreprises industrielles et commerciales ou agricoles imposées d'après leur bénéfice réel (ou exonérées en application de dispositifs spécifiques liés à l’aménagement du territoire) peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt au titre des dépenses de recherche qu'elles exposent au cours de l'année.
Le taux du crédit d'impôt est de 30 % pour la fraction des dépenses de recherche inférieure ou égale à 100 millions d'euros (50 % pour les dépenses de recherche exposées dans des exploitations situées dans un département d'outre-mer) et de 5 % pour la fraction des dépenses de recherche supérieure à ce montant.
Pour apprécier le seuil de 100 millions d'euros de dépenses, la loi de finances pour 2025 précise qu’il n’est désormais plus tenu compte des dépenses de veille technologique exposées lors de la réalisation d'opérations de recherche (auparavant retenues dans la limite de 60 000 € par an).
Ne sont, en outre, plus pris en compte :
- les frais de prise et de maintenance de brevets et de certificats d'obtention végétale ;
- les frais de défense de brevets et de certificats d'obtention végétale, ainsi que, dans la limite de 60 000 € par an, les primes et cotisations ou la part des primes et cotisations afférentes à des contrats d'assurance de protection juridique prévoyant la prise en charge des dépenses exposées, à l'exclusion de celles procédant d'une condamnation éventuelle, dans le cadre de litiges portant sur un brevet ou un certificat d'obtention végétale dont l'entreprise est titulaire ;
- les dotations aux amortissements des brevets et des certificats d'obtention végétale acquis en vue de réaliser des opérations de recherche et de développement expérimental ;
- les dépenses de veille technologique exposées lors de la réalisation d'opérations de recherche, dans la limite de 60 000 € par an.
Un récent décret vient d’acter ces suppressions.
Les lecteurs ont également consulté…
C’est l’histoire d’une société qui fait l’objet d’un contrôle fiscal… un peu trop long selon elle…

Suite à un contrôle fiscal, une société se voit réclamer le paiement d’un supplément d’impôt qu’elle refuse de payer. « Procédure irrégulière ! », estime la société, qui constate que le contrôle a trainé en longueur. Alors qu’en principe, il ne doit pas durer plus de 3 mois, il a duré 6 mois ici…
Seulement si le contrôle fiscal ne révèle pas de graves irrégularités dans la comptabilité, rappelle l’administration fiscale… Ce qui n’est pas le cas ici, se défend la société. Ce qui est pourtant contredit par sa comptabilité, maintient l'administration, qui constate, en outre, l'absence de numérotation continue dans la facturation, de relevés de factures détaillés, d'inventaires des stocks, de justifications de certaines charges, etc.
Tout prouve ici que la comptabilité de la société présente de graves irrégularités, tranche le juge. Partant de là, la durée du contrôle fiscal peut être prolongée au-delà du délai de droit commun de 3 mois, soit jusqu'à 6 mois : la procédure est régulière ici !
Les lecteurs ont également consulté…
C’est l’histoire d’une banque qui n’aime pas avoir plusieurs fois la même discussion…

Ne pouvant faire face aux échéances de son crédit, un emprunteur se trouve aux prises avec sa banque. Alors que cette dernière saisit le juge pour demander à être payée, l’emprunteur demande que les clauses de son contrat de prêt soient reconnues comme abusives…
Ce qui n’a aucun sens pour la banque : une première procédure avait déjà abouti au rejet de cette hypothèse… En effet, la banque avait agi en justice pour saisir un bien immobilier de l’emprunteur et le juge n’avait alors pas estimé nécessaire d’étudier les clauses. De ce fait, « l’autorité de la chose jugée » doit être appliquée et cette question ne peut plus être abordée devant un autre juge… Ce que conteste l’emprunteur : ses demandes n’ayant pas été étudiées, elles ne peuvent pas être considérées comme « jugées »…
Ce que confirme le juge : si un examen strict des clauses n’a pas été effectué pour établir leur caractère abusif ou non, l’autorité de la chose jugée ne joue pas. La demande de l’emprunteur devra ici être étudiée…
Les lecteurs ont également consulté…
Jeunes entreprises innovantes (JEI) : en route pour de nouvelles conditions

Jeunes entreprises innovantes : focus sur les nouvelles conditions du statut
Le dispositif « Jeune entreprise innovante » (JEI) vise à favoriser les dépenses de PME récentes et consacrées à la recherche et au développement afin de soutenir et de développer l’innovation à travers tout le territoire, en accordant des dispositions sociales et fiscales dérogatoires en contrepartie du respect de certaines conditions.
Pour être qualifiée comme telle depuis 2024, une JEI suppose que, à la clôture de son exercice, l’entreprise concernée :
- soit composée de moins de 250 salariés ;
- réalise un CA inférieur à 50 millions d’euros ou enregistre un bilan inférieur à 43 millions d’euros ;
- n’ait pas été créée dans le cadre d’une concentration, d’une restructuration, d’une extension d’activités préexistantes ou d’une reprise de telles activités ;
- ait été créée depuis moins de 8 ans ;
- soit détenue directement ou indirectement à 50% au moins par des personnes physiques ou par des sociétés d’investissement, des associations reconnues d’utilité publique à caractère scientifique, des établissements publics de recherche ou par une autre JEI.
Sous réserve de respecter ces conditions et de réaliser des dépenses affectées à la recherche représentant au moins 15 % des charges, les JEI bénéficient d’avantages sociaux et fiscaux.
La loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 a revu à la hausse ce seuil de dépenses de recherche. Désormais, le statut de JEI est accordé aux seules entreprises qui consacrent au moins 20 % de leurs dépenses à la recherche et au développement, contre 15 % jusqu’alors.
Le relèvement du seuil de dépenses de recherche, qui est entré en vigueur le 1er mars 2025, s’applique :
- à l’impôt sur le revenu dû à compter de 2025 pour les entreprises relevant de l’impôt sur le revenu ;
- à l’impôt sur les sociétés dû au titre des exercices clos à compter du 1er mars 2025 pour les entreprises relevant de l’impôt sur les sociétés.
Ce nouveau seuil s’applique à compter du 1er janvier 2026 pour la cotisation foncière des entreprises (CFE) et la taxe foncière sur les propriétés bâties.
Par ailleurs, concernant les dépenses de fonctionnement, la loi de finances pour 2025 a abaissé le taux forfaitaire de prise en compte des dépenses de personnel pour le calcul du volume de dépenses de recherche conditionnant le statut de JEI, passant de 43 % à 40 %.
De plus, ne sont désormais plus pris en compte :
- les frais de prise et de maintenance de brevets et de certificats d'obtention végétale ;
- les frais de défense de brevets et de certificats d'obtention végétale, ainsi que, dans la limite de 60 000 € par an, les primes et cotisations ou la part des primes et cotisations afférentes à des contrats d'assurance de protection juridique prévoyant la prise en charge des dépenses exposées, à l'exclusion de celles procédant d'une condamnation éventuelle, dans le cadre de litiges portant sur un brevet ou un certificat d'obtention végétale dont l'entreprise est titulaire ;
- les dotations aux amortissements des brevets et des certificats d'obtention végétale acquis en vue de réaliser des opérations de recherche et de développement expérimental ;
- les dépenses de veille technologique exposées lors de la réalisation d'opérations de recherche, dans la limite de 60 000 € par an.
Il est précisé que ces dispositions s’appliquent aux dépenses exposées à compter du 15 février 2025.
Les lecteurs ont également consulté…
Obligation de sécurité de l'employeur : chez le client aussi ?

Après avoir été victime d'un accident du travail, un conducteur routier est autorisé à reprendre le travail par le médecin du travail, sous réserve de ne plus porter aucune charge lourde. Pour ce faire, l'employeur met alors à sa disposition un chariot électrique sur le site de l'entreprise.
Sauf qu'au cours d'une de ses livraisons, alors qu'il doit décharger son camion dans l'entrepôt d'un client, le salarié remarque que cet équipement n'est pas mis en place et le reproche à son employeur.
L'employeur vous consulte : il se pose la question de savoir s'il est responsable de l'absence de mise en place des équipements préconisés par la médecine du travail chez le client.
La bonne réponse est... Oui
L'employeur, tenu à une obligation de sécurité à l'égard du salarié, doit s'assurer de l'effectivité des mesures préconisés par la médecine du travail, y compris sur le site des clients.
Les lecteurs ont également consulté…
C’est l’histoire d’un professeur qui donne des leçons à l’administration fiscale…

Parce qu'il enseigne le théâtre à titre indépendant en milieu scolaire et extrascolaire, un professeur applique à son activité extrascolaire l’exonération de TVA réservée aux enseignements scolaires, artistiques ou sportifs dispensés par des particuliers et rémunérés directement par les élèves…
Seulement si cette activité est exercée à titre personnel, sans le concours d'autres personnes, rappelle l'administration fiscale… Or ici, l’exonération de TVA ne peut pas lui être accordée, maintient l’administration : le professeur a embauché du personnel pour l’assister lors de ses cours… Uniquement pour ceux dispensés en milieu scolaire et non ceux donnés en milieu extrascolaire, se défend le particulier qui estime donc pouvoir être exonéré de TVA pour cette 2ᵉ activité…
Faute pour l'administration d'avoir recherché s'il était possible d'isoler les leçons réellement délivrées à titre personnel dans le cadre d'une 2ᵉ activité, le redressement fiscal ne peut pas être validé ici, tranche le juge.
Les lecteurs ont également consulté…
C’est l’histoire d’un employeur qui réclame un remboursement au salarié…

Un salarié, en arrêt maladie, prend acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de son employeur, ce qui équivaut en pratique à un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Sauf que cette prise d’acte n’est pas justifiée, ce qui équivaut en pratique à une démission du salarié…
Parce que l’entreprise lui a payé une indemnité de préavis, elle en réclame le remboursement. L’employeur rappelle en effet que dans le cas où la prise d’acte produit les effets d’une démission, faute de justification des torts invoqués par le salarié, celui-ci doit rembourser l’indemnité de préavis… Sauf dans l’hypothèse où le salarié s'est trouvé, du fait de sa maladie, dans l'incapacité d'effectuer le préavis. Ce qui est le cas ici puisqu’il était en arrêt maladie, rappelle le salarié…
Ce que confirme le juge : aucun remboursement de l’indemnité de préavis ne peut être réclamé au salarié, même s’il prend acte à tort de la fin de son contrat, s’il est en arrêt maladie au jour de cette prise d’acte.
Les lecteurs ont également consulté…
Louer une chambre d'hôtes : classée ou non classée ?

Un propriétaire loue plusieurs chambres d’hôtes à une clientèle de passage et perçoit en moyenne près de 25 000 € de loyer à l'année. Souhaitant appliquer le régime micro-BIC, plus favorable pour lui, il se demande quel seuil maximum de recettes s'applique dans son hypothèse : celui de 15 000 € applicable en 2025 aux locations de meublés de tourisme non classés, auquel cas il ne peut pas en bénéficier, ou celui de 77 700 € applicable en 2025 aux locations de meublés de tourisme classés, auquel cas il peut en bénéficier ?
D'après vous ?
La bonne réponse est... 77 000 €
Le seuil de 77 700 € à ne pas dépasser pour bénéficier du régime micro-BIC dans le cadre de la location de meublés de tourisme classés s'applique également aux locations de chambres d'hôtes. Le seuil de 15 000 € applicable en 2025 ne s'applique qu'aux locations de meublés de tourisme non classés.