TVA : tout savoir sur la base de calcul
1re vérification : l’opération est-elle soumise à la TVA ?
On parle de « champ d’application ». Pour qu’une vente ou une prestation de services soit soumise à la TVA, il faut qu’elle entre dans ce que l’on appelle dans le jargon TVA le « champ d’application » de cette taxe. Par principe, disons qu’entrent dans ce champ d’application les opérations effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel et les opérations désignées par la Loi ainsi que celles pour lesquelles il est possible d’opter.
La 1re catégorie. « L’assujetti agissant en tant que tel » est celui qui réalise une vente de biens ou de marchandises, ou une prestation de services, à titre onéreux, dans le cadre d’une activité économique exercée de manière indépendante. Cela suppose qu’il existe une contrepartie (quelle qu'elle soit) à la livraison de la marchandise ou à la réalisation de la prestation rendue à un bénéficiaire (on parle de « lien direct »). La plupart des entreprises réalisent des opérations économiques (commerciales, industrielles, artisanales), répondant à ces caractéristiques et sont, dès lors, soumises à la TVA.
Exemple 1. Une société exploite une activité de location de longue durée de voitures. A ce titre, elle propose à ses clients soit de souscrire un contrat de location simple, soit de souscrire un contrat de location avec assurance. Lorsqu’un client choisi de prendre une voiture avec assurance, la société ne soumet à TVA que la partie du prix qui concerne la prestation de location. Elle considère en effet que la prestation d’assurance qu’elle propose bénéficie, comme toute prestation d’assurance, d’une exonération de TVA. L’administration conteste, estimant que la vente de contrat d’assurance par la société est accessoire à la mise à disposition de véhicules : un accessoire qui doit, en conséquence, suivre le régime de TVA applicable à la location de voitures.
Mais. Pas pour le juge, qui annule le redressement fiscal : le seul fait que la société de location ne propose pas de contrats d’assurance sans contrats de location de voiture n’en fait pas pour autant l’accessoire de son activité de location. En conséquence de quoi, la société est fondée à réclamer le bénéfice de l’exonération de TVA sur la prestation d’assurance qu’elle propose.
Le cas des constructeurs. Certains contrats de construction peuvent prévoir la faculté, pour le constructeur, de souscrire une assurance dommage-ouvrage obligatoire au nom et pour le compte du futur propriétaire de l’habitation (le maître d’ouvrage). Dans cette hypothèse, une fois l’assurance souscrite, le constructeur refacture les primes d’assurances et les frais de dossier au maître de l’ouvrage à l’euro près.
Une exonération de TVA possible. Puisqu’en règle générale, le maître d’ouvrage a la possibilité de souscrire lui-même une assurance dommage-ouvrage auprès d’un autre assureur, la prestation offerte par le constructeur n’est pas accessoire à son activité de construction. Dans ces conditions, et dès lors que le constructeur refacture à son client les primes d’assurance et les frais de dossier pour un montant inchangé (sans prendre de commission), il peut bénéficier de l’exonération de TVA propre aux opérations d’assurance pour ces refacturations.
Le saviez-vous ?
Ce n’est pas parce qu’une opération est effectuée « à prix coûtant » qu’elle n’est pas soumise à la TVA : un remboursement de frais pourra, par exemple, être soumis à la TVA.
Il en sera autrement s’il s’agit de débours : sont ici visés les remboursements de frais, dans le cadre d’un mandat, qui ont été engagés au nom et pour le compte d’un mandant. Ces débours ne sont pas soumis à la TVA s’ils sont justifiés dans le cadre d’un mandat préalable et explicite, si l’intermédiaire en question rend compte exactement des dépenses concernées (en justifiant de leur montant et de leur nature, au moyen de factures notamment), et si ces dépenses sont inscrites en comptabilité dans un compte de tiers.
La 2nde catégorie. La Loi peut prévoir que certaines opérations seront expressément soumises à la TVA, bien que les critères pour l’application de cette taxe ne soient pas nécessairement remplis. Dans cette catégorie rentrent notamment ce que l’on appelle les « livraisons à soi-même (LASM) » : une livraison à soi-même consiste à se procurer un bien ou un service à partir d’éléments vous appartenant (une entreprise de bâtiment fait fabriquer par ses propres équipes et avec ses propres matériaux un nouveau local ou de nouveaux agencements sur son propre terrain). Pour respecter le principe de neutralité de la TVA (si l’entreprise fait appel à un prestataire extérieur, les travaux seront soumis à la TVA), la LASM est soumise à la TVA, cette TVA étant, elle-même, déductible si les conditions pour opérer cette déduction sont évidemment réunies (sachez que le défaut de déclaration d’une LASM est sanctionné par une amende fiscale de 5 %).
3ème catégorie : une option possible ? Dans certaines hypothèses, il est permis d’opter pour le paiement de la TVA, alors que l’opération concernée n’est pas, par elle-même, soumise à cette taxe. Figurent notamment dans cette catégorie certaines locations, par exemple, les locations de locaux professionnels dépourvus du matériel et du mobilier, pour lesquelles une option à la TVA est possible (l’intérêt de l’exercice d’une telle option reposera dans la possibilité, pour le loueur, de déduire la TVA acquittée à l’occasion de l’investissement et des dépenses réalisées à raison du bien loué).
Attention. N’oubliez pas qu’à partir du moment où vous mentionnez de la TVA sur vos factures, même par erreur, vous en serez redevable !
Exemple Un marchand de biens a vendu un immeuble en faisant mention, sur l’acte authentique de vente, d’un prix « TVA incluse ». Estimant avoir commis une erreur en facturant la vente avec TVA, il n’a pas reversé le montant de la taxe due. A l’occasion d’un contrôle fiscal, l’administration a réclamé le versement de cette TVA facturée, rappelant à cette occasion le principe suivant : « toute TVA facturée, même à tort, est due ». Position partagée par le juge qui confirme le redressement fiscal.
2ème vérification : calculer la « base d’imposition »
Opération importante. Maîtriser la base d’imposition à la TVA est important, que vous vous placiez du côté fournisseur ou que vous agissiez en tant que client. Dans le premier cas, il s’agira d’être sûr du montant de la TVA que vous devez payer, et donc que vous pouvez déduire de la TVA que vous collectez, de votre côté, auprès de vos clients. Dans le second cas, il s’agira de valider le montant de la TVA effectivement collectée et reversée à l’administration. N’oubliez pas que vous agissez en qualité de collecteur de l’impôt pour l’Etat, avec toutes les obligations, contraintes et responsabilités que cela induit.
Base d’imposition = prix de vente. Le principe général est le suivant : la base d'imposition à la TVA est constituée de toutes les sommes, valeurs, biens ou services reçus (ou à recevoir) par le fournisseur ou le prestataire, en contrepartie de l'opération facturée, qu'il s'agisse d'une livraison ou d'une prestation de services. Peu importe l'échelonnement dans le temps du paiement du prix, qui n'entraîne aucune conséquence sur la détermination de la base d'imposition.
Mais pas seulement… Non seulement il faut tenir compte du prix, mais aussi des frais accessoires facturés aux clients (même directement) et qui peuvent alors être considérés comme des compléments de prix. Pour mémoire, on peut citer, par exemple, les commissions éventuelles, les intérêts, les frais de transport, les frais de déplacement, les frais d'emballage, les frais d'assurance, etc.
Ce dont vous ne devez pas tenir compte. Cette base d'imposition ne comprend pas la TVA elle-même : on parle alors de prix hors taxes. Elle ne comprend pas, non plus, les réductions de prix (qu'il s'agisse d'escomptes, de rabais, de remises, de ristournes, etc.), sous réserve du respect des conditions suivantes :
- la réduction de prix doit bénéficier intégralement et directement au client ;
- la réduction de prix ne doit pas constituer la contrepartie d'une prestation ou la rémunération d'un service réalisé par l'acheteur.
Attention. Lorsque la réduction de prix est accordée après la délivrance de la facture (ce qui peut être le cas de ristournes de fin d'année par exemple), et pour pouvoir exclure ces réductions de prix de la base d'imposition à la TVA, vous devez adresser une facture rectificative modifiant le prix et le montant de la taxe de la facture primitive.
Le saviez-vous ?
Il existe un certain nombre d'opérations qui se voient imposer des règles particulières en matière de détermination de la base d'imposition à la TVA. Ce sera notamment le cas d'opérations pour lesquelles la TVA est calculée sur la marge réalisée par le prestataire, et non sur le prix global facturé au client : sont ici concernées les opérations réalisées par les agents de voyages, les vendeurs de biens d'occasion, certaines ventes immobilières, etc.
A retenir
Dès lors que vous êtes effectivement assujetti à la TVA, retenez que la base de calcul de la TVA correspond à votre chiffre d’affaires dit « imposable » (la contrepartie de vos ventes ou de vos prestations), diminué des réductions de prix accordées.
J'ai entendu dire
Je loue un local commercial, avec assujettissement des loyers à la TVA. Il est convenu que le locataire me rembourse le montant de la taxe foncière : le montant de cette taxe doit-il être inclus dans la base de calcul de la TVA collectée ?La taxe foncière ne constitue pas une charge dite 'locative' : elle incombe effectivement au propriétaire, lequel peut, par convention, la refacturer au locataire. A ce titre, cette refacturation doit être soumise à la TVA et donc être incluse dans la base d'imposition à cette taxe, la jurisprudence précisant, à cet égard, que la taxe remboursée par le locataire constitue une contrepartie de la location consentie par le propriétaire.
- Articles 256 et suivants du Code Général des Impôts
- Articles 266 et 267 du Code Général des Impôts
- Article 1788 A 4° du Code Général des Impôts (sanction en cas de défaut de déclaration d’une livraison à soi-même)
- Arrêt de la Cour de Cassation du 4 décembre 2007, chambre commerciale, n° 06-21149
- Arrêt de la Cour Administrative d’Appel de Nantes du 29 juin 2017, n°15NT03325 (TVA facturée = TVA due)
- Arrêt de la Cour Administrative d’Appel de Versailles du 18 mai 2017, n°16VE02479 (frais facturés par une banque à l’un de ses clients suite à la réception d’un ATD (dénommée aujourd'hui SATD))
- Arrêt du Conseil d’Etat du 24 avril 2019, n° 412570 (TVA et avis à tiers détenteur (dénommée aujourd'hui SATD))
- Arrêt de la Cour Administrative d’Appel de Nantes du 19 octobre 2017, n°16NT01751 (loyer anormalement bas et notion d’activité économique).
- Arrêt du Conseil d’Etat du 11 octobre 2017, n°397902 et arrêt du Conseil d’Etat du 15 décembre 2017, n°397913 (la fourniture de repas gratuit à ses salariés n’est pas une prestation de service à titre onéreux)
- Arrêt de la Cour Administrative d’Appel de Lyon du 11 janvier 2018, n°16LY02645 (location de voitures avec assurance facultative)
- Arrêt de la Cour Administrative d’Appel de Paris du 24 janvier 2018, n°17PA00559 (TVA facturée par un marchand de biens, même à tort, = TVA due)
- Rescrit du 27 novembre 2019, BOFiP-Impôts, BOI-RES-000057 (constructeur, assurance dommage-ouvrage, refacturation de primes et exonération de TVA)
- Rescrit BOFiP-Impôts BOI-RES-000058 du 11 décembre 2019 (groupe de société, refacturation de primes d’assurance par la société mère et exonération de TVA)
- Arrêt de la Cour administrative d’appel de Lyon du 17 juin 2021, n°19LY02303 (commissions encaissées dans le cadre de prestations de conciergerie et notion de « débours »)
- Arrêt du Conseil d'État du 16 décembre 2022, n° 452853 (sous-location de locaux commerciaux et assujettissement à la TVA)
- Arrêt de la cour administrative d’appel de Paris du 20 janvier 2023, no 21PA05850 (soumission des arrhes versées pour la réservation, finalement non honorée, d’une chambre d’hôtel, à la TVA)
- Arrêt du Conseil d’État du 7 décembre 2023, no 467358 (TVA sur marge et voitures d’occasion)
Impôts à payer : anticiper le coût ?
Provision pour impôts : une possibilité strictement encadrée
Une charge. Par principe, vous ne pouvez prendre en compte, au titre d’un exercice comptable donné, que les impôts mis en recouvrement et devenus exigibles au cours de cet exercice. Ces impôts correspondent à une charge définitive de cet exercice : ils seront à ce titre déductibles, pour autant que leur déduction est admise sur le plan fiscal (ce n’est, par exemple, pas le cas de l’impôt sur les bénéfices). Dans certains cas, il sera aussi possible d’anticiper cette charge d’impôt en constituant une provision.
Une provision… L’administration fiscale admet effectivement la déduction des provisions pour impôts. Mais cela suppose que cette provision soit destinée à faire face à un impôt qui deviendra exigible au cours de l'un des exercices suivants à condition que cet impôt présente un caractère permanent et soit dû à raison de faits survenus au cours dudit exercice.
… déductible ? Pour savoir si une telle provision est déductible, il faut que vous vous posiez les questions suivantes qui sont autant de conditions à respecter :
- l’impôt, objet de la provision, doit être lui-même déductible : un impôt non déductible, comme pour toute autre charge non déductible ne peut pas donner lieu à la constitution d’une provision en franchise d’impôt ;
- l’impôt doit présenter un caractère permanent ;
- l’impôt doit trouver son origine dans l’exercice : concrètement, cela signifie que, même s’il doit être payé ultérieurement, il doit être dû à raison de faits survenus au cours de l’exercice.
Conclusion. Compte tenu de ces conditions strictes de déduction, le nombre des impôts et taxes concernés est relativement limité.
Exemple de la taxe d’apprentissage. Cette taxe est calculée à partir des rémunérations versées au cours de l’année (il s’agit donc d’une dette certaine au 31 décembre de l’année au cours de laquelle les rémunérations servant de base de calcul ont été payées). Mais cette taxe ne devient véritablement exigible qu’une fois les imputations susceptibles d’être faites sont définitivement connues, étant précisé que certaines subventions peuvent être déduites de la taxe si elles sont engagées dans les 2 premiers mois de l’année suivante. Cette circonstance peut donc justifier la constitution d’une provision déductible au titre de la taxe d’apprentissage à payer.
Le saviez-vous ?
Parce que les amendes, pénalités et majorations ne sont jamais déductibles du résultat imposable, vous ne pourrez pas constituer de provisions en franchise d’impôt à propos de ces sanctions, même si elles se rapportent à des impôts ou des taxes déductibles par nature.
Provision pour rappel d’impôts et de cotisations sociales : possible ?
En ce qui concerne les rappels d’impôt. Il faut ici distinguer selon que la procédure de contrôle est ou non achevée et selon que vous contestez ou non les rappels d’impôts mis à la charge de l’entreprise.
Si le contrôle est achevé. Dans ce cas, une distinction s’impose :
- vous acceptez les redressements : les rappels d’impôts mis à la charge de l’entreprise constituent des charges à payer au titre de l’exercice au cours duquel vous acceptez la rectification fiscale (ces rappels sont déductibles si l’impôt est lui-même déductible) ;
- vous contestez les rappels d’impôts : vous êtes en droit de constituer une provision (déductible si l’impôt est lui-même déductible).
Si le contrôle n’est pas achevé. Si vous avez connaissance, avant la clôture de l’exercice, d’une probabilité de rappels d’impôts, voici ce que préconise l’administration fiscale :
- vous pouvez déterminer avec précision les rappels d’impôt que vous accepterez : vous constatez alors une charge à payer ;
- si ce n’est pas le cas, vous pouvez constituer une provision (déductible si l’impôt est lui-même déductible).
En ce qui concerne les rappels de cotisations sociales. Par principe, les rappels de cotisations sociales sont compris dans les charges de l’exercice en cours duquel l’entreprise se reconnait débitrice des cotisations rappelées suite à un redressement fiscal. La décision de l’entreprise est matérialisée soit par l'inscription en compte de charges à payer, soit par le paiement. Le cas échéant, le montant réclamé doit être compris dans les charges de l’exercice au cours duquel la décision de rappel a été rendue exécutoire.
Cependant… Vous pouvez constituer à la clôture d’un exercice une provision pour cotisations à payer ou à établir au titre d'exercices antérieurs. Pour cela, la charge doit être nettement précisée et avoir un caractère probable (comme l’existence d’un différend lors d’un contrôle de l’URSSAF)
Attention. Pour qu’une provision soit déductible, il faut, parmi toutes les conditions requises, qu’elle vise une charge probable et non pas simplement éventuelle. C’est notamment pour cette raison qu’une entreprise a été sanctionnée. Celle-ci avait fait l’objet d’un contrôle URSSAF qui s’est soldé par un redressement portant sur la soumission aux cotisations sociales des remboursements de frais accordés à certains de ses salariés. Malgré ce redressement, elle n’a pas changé sa position à propos de ces remboursements de frais. Mais, anticipant un redressement possible, elle a calculé le risque et provisionné le montant correspondant. Provision qu’elle déduit de son résultat imposable, ce que lui refuse toutefois l’administration fiscale. Pour cette dernière, le risque d’un rappel URSSAF sur ce point n’est que purement éventuel : même si l’entreprise a précédemment fait l’objet de rappels de cotisations sociales sur ce point, aucun contrôle n’est engagé, ni même envisagé au moment où elle provisionne ce risque potentiel. Et le juge lui donne raison : la déduction fiscale d’une provision liée à un risque, qui n’est ici que purement éventuel, n’est pas admise.
A retenir
Retenez que vous pourrez passer une provision pour un impôt ou une taxe à payer sous réserve que cet impôt présente un caractère permanent et soit dû à raison de faits survenus au cours de l’exercice.
- Article 39-1-5° du Code Général des Impôts
- BOFiP-Impôts-BOI-BIC-PROV-30-20-20
- Arrêt de la cour administrative d’appel de Versailles du 6 mai 2010, n° 09VE01017 (pas de déduction fiscale pour un simple risque éventuel de redressement URSSAF)
Litige en vue : provisionner le risque et anticiper le coût ?
Provisionnez le risque !
Un litige… Au cours de la vie sociale, vous pourrez rencontrer diverses situations sources de litiges : que ce soit avec un fournisseur, un client, un salarié, il n’est pas à exclure que la responsabilité de l’entreprise soit, un jour, mise en cause. La règle de prudence qui prévaut en matière comptable devra vous inciter à anticiper l’éventuel risque que pourrait engendrer, pour l’entreprise, une issue défavorable d’un litige. Comment ?
Une provision… Parce qu’un litige pourra être source de charge pour l’entreprise, vous allez pouvoir « provisionner » le risque correspondant : cette provision vous permettra, en quelque sorte, d’anticiper cette charge probable que l’entreprise pourrait être amenée à supporter dans l’hypothèse où elle n’obtiendrait pas gain de cause.
Des conditions… Anticiper cette charge probable revient également à anticiper la déduction fiscale de cette charge : vous pourrez donc diminuer, à due concurrence, le montant de votre résultat soumis à l’impôt sur les bénéfices du montant de cette provision. Mais pour cela, vous devez respecter toutes les conditions imposées par la règlementation fiscale…
Maîtrisez les conditions de déduction !
Déduire la provision ? Parce que la déduction de cette provision revient à anticiper la déduction fiscale d’une charge simplement probable, de nombreuses conditions doivent être respectées : non seulement, il faut respecter les conditions générales de déduction des provisions, mais des critères précis doivent aussi être pris en compte pour la déduction des provisions pour litiges.
Oui, si… Tout d’abord, une provision ne sera déductible que si elle est régulièrement comptabilisée et reportée sur le tableau des provisions, à joindre à votre déclaration de résultats. Qui dit provision régulièrement comptabilisée, dit aussi respect des conditions de comptabilisation d’une provision pour risque et charge : l’entreprise doit faire face à une obligation à l’égard d’un tiers dont il est probable qu’elle provoquera une sortie de ressources au bénéfice de ce tiers, sans contrepartie au moins équivalente attendue de celui-ci. En pratique, un litige mettant en cause la responsabilité de l’entreprise à l’égard d’un client, d’un fournisseur, d’un salarié dans le cadre de ses obligations contractuelles pourra donner lieu à une provision respectant ces critères comptables.
Oui, si… Ensuite, comme toute provision, il sera nécessaire de respecter les conditions suivantes :
- votre provision doit faire face à une charge ou une perte déductible : parce qu’une éventuelle condamnation de l’entreprise entraînera une charge qui sera déductible des résultats imposables, cette condition sera respectée ;
- la provision doit se rapporter à une charge probable : dans la mesure où l’entreprise fait l’objet d’une réclamation, la probabilité d’une charge future est caractérisée (il en serait différemment si vous ne faites que suspecter une difficulté sans qu’un potentiel contradicteur ne se soit effectivement manifesté : ne provisionnez pas de simples risques purement éventuels !) ;
- la probabilité de cette charge doit résulter d’évènements en cours à la clôture de l’exercice : vous devez détenir des moyens de preuve vous permettant d’établir que la responsabilité de l’entreprise a été effectivement mise en cause avant la date de clôture de votre exercice ;
- la perte ou la charge qui fait l’objet de cette provision doit être nettement précisée : il vous appartient donc de définir avec précision la nature du litige et d’évaluer avec une approximation suffisante le montant qui pourrait être réclamé à l’entreprise.
Attention. Il peut arriver que le règlement du litige perdure dans le temps et qu’une réévaluation du montant de la provision soit nécessaire.
Quelques bonnes pratiques. En présence d’un litige, retenez les critères suivants pour éviter toute remise en cause de la déduction fiscale de votre provision :
- il n’est pas nécessaire que vous produisiez une assignation en justice : il suffit que l’existence même du litige soit établie, au moyen d’un courrier de réclamation par exemple ;
- le litige doit être né avant la clôture de l’exercice : si un client vous envoie un courrier de réclamation après la clôture de l’exercice, vous ne pourrez comptabiliser et déduire une provision qu’au titre de l’exercice suivant ;
- l’issue du litige importe peu : concrètement, on ne pourra pas vous reprocher d’avoir déduit une une provision, même s’il était raisonnablement possible de penser que vous aviez de grandes chances de ne pas être condamné ;
- pour apprécier le montant à provisionner, prenez en compte les prétentions de la partie adverse.
Le saviez-vous ?
Le litige ne doit pas être définitivement tranché : concrètement, aucune décision ne doit être intervenue mettant fin définitivement au litige, ou si une décision de justice a été rendue, elle doit être encore susceptible de faire l’objet d’un appel à la clôture de l’exercice. Si une décision est devenue définitive (le délai pour faire appel ou se pourvoir en cassation est expiré, par exemple), la provision devient sans objet et doit donc être annulée.
Et après ? En fonction de l’issue du litige, voici la marche à suivre :
- si l’entreprise gagne, la provision est annulée : la provision fait l’objet d’une reprise, comptabilisée dans un compte de produit (parce que la provision a été déduite, cette reprise est imposable) ;
- si l’entreprise est définitivement condamnée, sa dette devient certaine : là encore, la provision est annulée (elle fait l’objet d’une reprise imposable, comme précédemment) et le montant correspondant est alors comptabilisé dans les charges déductibles de l’exercice.
A retenir
Parce que l’entreprise pourrait avoir à faire face à une charge supplémentaire, suite à une issue défavorable du litige, vous allez pouvoir anticiper, tant sur le plan comptable que sur le plan fiscal, cette charge probable en constituant une provision.
Retenez toutefois que pour cette provision soit déductible, sur le plan fiscal, il faut que le litige soit effectivement né avant la clôture de l’exercice et qu’il ne soit pas définitivement tranché.
- Article 39-1-5° du Code général des impôts
- Article 212-1 et 212-3 du Plan Comptable Général
- Arrêt du Conseil d’État du 20 novembre 2002, n° 230530 (appréciation de l’issue du litige)
- Arrêt de la cour administrative d’appel de Paris du 17 octobre 2013, n° 12PA01476 (décision définitive et provision sans objet)
- Arrêt du Conseil d’État du 7 décembre 2016, n° 384309 (décision définitive et provision sans objet)
- Arrêt de la cour administrative d’appel de Paris du 23 janvier 2019, n°17PA03871 (provision pour dépréciation de stocks / provision pour litige)
Facture impayée : attention à l’impact fiscal !
Votre client ne paie pas la facture : provisionner la créance ?
Un principe. Lorsque vous facturez votre client, une fois la livraison effectuée ou la prestation rendue, vous constatez ce que l’on appelle en comptabilité une créance certaine, à la fois dans son principe et dans son montant : concrètement, vous constatez un produit égal au chiffre d’affaires correspondant, produit qui est normalement imposé, au titre de l’exercice de sa réalisation, indépendamment de l’encaissement effectif des sommes correspondantes. Et si le client ne paie pas, que se passe-t-il ?
Un problème ? Dans le cas où une facture n’est pas payée à la clôture d’un exercice comptable, il faudra tout de même la prendre en compte dans vos produits imposables, puisqu’elle est « certaine dans son principe et dans son montant ». Et c’est à ce niveau que se pose un problème évident : vous serez amené à payer de l’impôt sur un chiffre d’affaires non encaissé… Fort heureusement, et notamment parce que l’une des règles de la comptabilité repose sur la prudence, il va pouvoir être possible d’atténuer, comptablement et fiscalement, cette difficulté.
Une solution ! Vous allez pouvoir « provisionner » ce risque client : en clair, cette provision permettra d’anticiper la charge probable qui résulterait d’un défaut de paiement (sur le plan comptable, il s’agit de déprécier la créance correspondante, normalement inscrite à l’actif du bilan). Constatée en charge de l’exercice (on parle de dotation aux provisions), elle viendra diminuer à due concurrence le produit correspondant au montant de la créance.
Abandon de créance ou provision ? Dans le cadre d’un litige l’opposant à une société, l’administration fiscale lui a refusé la déduction d’une provision pour créance douteuse détenue sur l’une de ses filiales, considérant que dans sa situation, elle aurait dû consentir un abandon de créance, non déductible par nature s’agissant d’une aide financière. Une position non partagée par le juge : puisque l’administration fiscale ne prouve pas que le choix opéré par la société relève d’une gestion anormale, et parce que le risque de non-recouvrement de la créance est avéré au vu de la situation financière de la filiale, le redressement fiscal doit être annulé.
Votre client ne paie pas la facture : déduire la provision ?
Une provision déductible… La provision constituée en vue de faire face à une perte probable liée au non-paiement d’une facture sera déductible des résultats imposables. Mais la règlementation fiscale impose, comme toujours, des conditions précises. A quoi devez-vous faire attention pour éviter toute remise en cause de cette provision sur le plan fiscal ?
… sous conditions. Pour que cette provision soit déductible des résultats imposables de l’entreprise, il faut qu’elle réponde aux conditions générales suivantes :
- cette provision doit être constituée en vue de faire face à une perte ou une charge elle-même déductible : une perte liée à un défaut de paiement constituera, en elle-même, une perte d’exploitation déductible ;
- la perte ou la charge provisionnée doit être nettement précisée : en clair, vous devez détenir tous les éléments permettant d’identifier la créance correspondante ainsi que son montant que vous devrez évaluer avec une approximation suffisante ;
- la perte ou la charge provisionnée doit être probable : il n’est pas possible de provisionner un simple défaut de paiement (vous devez avoir de véritables doutes quant à vos chances de recouvrer votre créance), comme il n’est pas possible de provisionner une créance irrécouvrable (dans cette hypothèse, vous constatez directement une perte) ;
- la probabilité de la perte ou de la charge doit résulter d’évènements en cours à la clôture de l’exercice : c’est parce que vous avez eu des alertes en cours d’exercice que vous pourrez effectivement prendre la décision de provisionner cette créance à la clôture de l’exercice ; si l’évènement qui motive cette provision n’intervient qu’après la date de clôture de l’exercice, vous ne pourrez, le cas échéant, provisionner le risque de perte correspondant qu’au titre de l’exercice suivant.
Le saviez-vous ?
Vous ne pourrez tenir compte d’évènements intervenus après la date de clôture de votre exercice que pour ajuster, le cas échéant, le montant de la provision. Mais le principe même de cette provision doit être justifié par des éléments intervenus avant cette date.
Justifiez votre provision ! Non seulement la provision doit être régulièrement comptabilisée, mais vous devrez aussi être en mesure de justifier cette provision.
Comment ? La manière de justifier une prévision dépendra souvent des difficultés que vous rencontrez pour obtenir le paiement de votre facture :
- si vous faites face à un client qui refuse de payer, parce qu’il conteste la facture, soit dans son principe, soit dans son montant, vous vous dirigez très vraisemblablement vers un litige : on parle alors de « provision pour créance litigieuse », que vous justifierez utilement en conservant les courriers de contestation du client, vos relances et mises en demeure (faites en recommandé avec accusé réception), les éventuelles assignations en justice, etc.
- si vous faites face à un client qui a manifestement des difficultés à payer, on parle alors de « provision pour créance douteuse » : conservez précieusement vos courriers de relances et mises en demeure de payer, les courriers faisant état de difficultés de paiement, tous les éléments de nature à établir une situation financière notoirement difficile, etc.
Attention. La seule perspective d’une crise économique ne suffit pas à justifier une provision, de même qu’un simple défaut de paiement de la facture à l’échéance prévue sera également insuffisant. Il est impératif que vous puissiez démontrer de réelles difficultés à recouvrer votre créance, soit parce que votre client a des difficultés à payer, soit parce que vous êtes en litige avec lui.
Pour la petite histoire. Une société a constitué une provision au titre des créances détenues sur 3 sociétés clientes. Elle justifie cette provision en faisant valoir que la première société était déficitaire depuis plusieurs années et que ses capitaux propres étaient négatifs au cours des deux derniers exercices, que la deuxième société n’exerçait plus d’activité et que la troisième société avait perdu la moitié de ses capitaux propres. Mais la déduction fiscale de cette provision est refusée (par l’administration fiscale, confirmée par le juge de l’impôt) : si elle fournit les extrait K-bis des sociétés étayant ces mauvaises situations financières, les circonstances invoquées ont été jugées, malgré tout, insuffisantes pour démontrer le caractère douteux du recouvrement des créances détenues sur ces sociétés.
Conseil. En présence d’une créance douteuse, faire simplement état d’une mauvaise situation financière ne suffit pas. Inversement, ne produire que des lettres de rappels restées lettre morte ne suffira pas non plus. On n'insistera donc jamais assez sur l’importance de produire, systématiquement, toutes les pièces justifiant que le client ne peut effectivement pas (ou ne veut pas) payer tout ou partie de votre créance : courriers de relance, mises en demeure, constats d’huissier, procédures d’injonction de payer, éléments relatifs à la situation financière délicate ou difficile du client, etc.
Exemple. L’administration a refusé qu’une société déduise une provision pour créance douteuse constituée à la clôture d’un exercice, les premiers courriers de relance réclamant le paiement de sa facture ayant été envoyées à la société débitrice plus d’un an après ladite constitution.
Le saviez-vous ?
La jurisprudence admet que la déduction d’une provision n’est pas subordonnée à la poursuite judiciaire systématique de votre client défaillant, notamment lorsqu’il est dans votre intérêt de ne pas attaquer en justice votre client au regard des relations commerciales importantes pour vous que vous entretenez avec lui.
Notez que, d’une manière générale, la circonstance que votre client soit placé en liquidation judiciaire suffit à constituer (et justifier) une provision pour créance douteuse (cette circonstance ne justifie pas à elle seule la constatation d’une perte pure et simple).
À noter. Ces différentes justifications vous permettront également de quantifier le montant de votre provision. Sachez, en outre, qu’à partir du moment où vous êtes en mesure de récupérer la TVA liée à cette créance, dans l’hypothèse où vous constateriez une perte définitive, le montant provisionné doit s’entendre hors taxes.
Votre client ne peut pas payer la facture : constater une perte ?
Une déduction… provisoire. Comme on vient de le voir, une provision a pour objet un risque de non-paiement de la facture : sans être considérée comme définitivement perdue, le recouvrement de votre créance peut toutefois être compromis. Cette provision n’est donc que provisoire : elle a pour objet une créance dont vous attendez le paiement, issue qui ne peut se concrétiser que par un paiement effectif, total ou partiel, ou un défaut de paiement définitif.
Si votre client paie la facture. La provision n’a plus lieu d’être : le risque de perte provisionné n’existe plus. Vous allez « reprendre » cette provision : parce que vous avez déduit fiscalement cette provision au moment de sa constitution, la reprise de provision, constatée en produit, figurera parmi les produits imposables de l’exercice. Si le paiement n’est que partiel, la reprise ne sera effective qu’à hauteur du montant payé, le solde constituant alors une perte définitive.
Si votre client ne paie pas. Vous savez que votre client ne paiera jamais la facture, en tout ou partie. Le montant non payé correspond alors à une perte définitive. Là encore, la provision n’a plus lieu d’être puisqu’elle a justement pour objet une perte « probable ». Parce que cette perte est devenue définitive, vous allez « reprendre » cette provision (le montant de cette reprise étant alors imposable) et vous constaterez une perte définitive, déductible du résultat imposable.
Attention. Pour que cette perte soit effectivement déductible, il faut que la créance correspondante soit définitivement irrécouvrable. Il s’agit là, bien sûr, d’une question de fait qui dépendra des circonstances propres à l’entreprise, mais qui ne doit pas vous empêcher de prouver cette irrécouvrabilité : vous pouvez, par exemple, recourir aux services d’un huissier qui établira une attestation ou, comme cela peut malheureusement arriver, faire constater que votre client est parti sans laisser d’adresse.
A retenir
Cherchez à savoir pourquoi votre client ne paie pas votre facture : s’agit-il d’un oubli, d’une mauvaise volonté ou d’une réelle difficulté à payer ? S’il s‘agit d’un simple défaut de paiement, au plan fiscal, vous ne pourrez rien faire, mais si vous suspectez un réel doute sur sa capacité à payer ou sa volonté de payer, vous pourrez constituer, selon les cas, une provision pour créance douteuse ou pour créance litigieuse.
Cette provision sera déductible, à condition de la justifier, ce qui annulera, par voie de conséquence, la prise en compte de votre créance dans votre résultat imposable. Constituez-vous un dossier suffisamment complet pour justifier le doute quant à vos chances de pouvoir recouvrer cette créance ou le litige qui vous oppose à votre client.
- Article 39 du Code général des impôts
- Arrêt du Conseil d’État du 19 juin 1989, n° 58984 (poursuites judiciaires non systématiques)
- Arrêt de la cour administrative d’appel de Lyon du 26 janvier 2006 n°01LY02206 (avances consenties à une filiale finalement liquidée et absence de démarche pour recouvrer les sommes dues)
- Arrêt du Conseil d’État du 28 février 2007, n°283441 (défaut de justification d’une provision malgré la mauvaise situation financière du débiteur)
- Arrêt de la cour administrative d’appel de Nantes du 23 mars 2009, n° 07NT00846 (radiation du registre du commerce et des sociétés)
- Arrêt de la cour administrative d’appel de Paris du 29 juillet 2011, n° 09PA02378 (défaut de justification d’une provision malgré la mauvaise situation financière du débiteur)
- Arrêt de la cour administrative d’appel de Paris du 17 octobre 2013, n°12PA01476 (ne produire que des lettres de relance ne suffit pas à justifier une provision)
- Arrêt du Conseil d’État du 17 avril 2015, n° 371467 (entreprise en liquidation judiciaire)
- Arrêt du Conseil d’État du 17 février 2016, n°377415 (provision constituée en l’absence de courrier de relance… et avant même tout défaut de paiement)
- Arrêt de la cour administrative d’appel de Lyon du 12 octobre 2017, n°16LY02737 (Provision constituée un an avant l’envoi d’un premier courrier de relance)
- Jugement du Tribunal administratif de Montreuil du 30 octobre 2017, n°1607367 (NP) (provision pour créances douteuses vs abandon de créances)
- Arrêt de la cour administrative d’appel de Versailles du 4 octobre 2018, n°17 VE00342 (provision constituée en l’absence de courrier de relance)
- Arrêt du Conseil d’État du 30 janvier 2019, n°408436 (refus de déduction car le montant de la perte probable est insuffisamment précisé)
- Arrêt de la cour administrative d’appel de Nantes du 13 février 2020, n°18NT01820 (refus de déduction, absence de démarche pour obtenir le recouvrement et nouveaux prêts accordés au débiteur)
- Arrêt du Conseil d’État du 22 avril 2021, n°433028 (société de crédits, retards de paiement et caractérisation du risque de non-recouvrement)
- Arrêt du Conseil d’État du 2 février 2022, n°434428 (absence de justification du montant et du caractère probable d’une perte financière)
- Arrêt de la cour administrative d’appel de Nancy du 22 septembre 2022, n°21NC00302 (provision d’une créance douteuse et aide à caractère financier)
- Arrêt du Conseil d’État du 09 novembre 2023, no 468731 (absence de preuve du caractère probable du non-paiement d’une créance)
Si l’entreprise est victime d’un détournement de fonds…
Détournement commis par un tiers ou un salarié
Qui est l’auteur ? Vol d’argent dans la caisse, détournement de fonds commis au préjudice de l’entreprise… Tous ces vols ont pour conséquence des désagréments évidents pour l’entreprise, mais également des incidences fiscales. La question qui va notamment se poser, sur un plan strictement fiscal, sera de savoir si la perte résultant du détournement est ou non déductible du résultat imposable de l’entreprise. Et la teneur de la réponse va dépendre de l’auteur de ce détournement…
Un tiers ? Dans l’hypothèse où le vol est le fait d’un tiers à l’entreprise, la perte en résultant sera normalement déductible des résultats imposables de l’entreprise. La carence ou le comportement des dirigeants ne fait pas obstacle à la déductibilité des pertes résultant du détournement commis par un tiers contrairement à ceux commis par un salarié de la société. Pensez, bien entendu, à justifier de cette perte en portant plainte pour vol auprès des autorités compétentes (cette démarche sera, en tout état de cause, obligatoire pour effectuer les formalités nécessaires auprès des assurances, le cas échéant).
Un salarié ? Si le détournement est le fait d’un salarié, la perte résultant de ce vol est, par principe, déductible. Il en sera de même si l’entreprise provisionne le risque de perte lié à ce détournement si l’entreprise a de sérieux doutes quant à la possibilité de récupérer les fonds détournés. Mais il existe une limite à cette déduction fiscale qui n’est pas nécessairement acquise.
Déductible, si… Les détournements commis par un salarié seront déductibles à la condition qu’ils aient été commis à votre insu. Cette condition suppose effectivement que vous n’ayez pas eu connaissance de ces détournements ou que vous n’ayez pas concouru à ces détournements par votre comportement délibéré ou une carence manifeste dans l’organisation de l’entreprise.
Concrètement. C’est ce qui est arrivé à un dirigeant d’entreprise qui avait pris pour habitude de laisser à la disposition d’une salariée des chèques en blanc signés par lui. Victime de détournements de fonds commis par cette salariée, l’entreprise a été sanctionnée sur le plan fiscal : laisser des chèques en blanc signés caractérise un comportement délibéré et une carence manifeste. D’autant, souligne le juge, que compte tenu de la petite taille de l’entreprise, les détournements répétés (et imputés pour partie de surcroît sur le compte courant du dirigeant) ne pouvait pas échapper à son contrôle. Dans cette affaire, la déduction fiscale de la provision constituée pour faire face à ce détournement a été refusée.
Concrètement (bis). La même mésaventure est arrivée à un dirigeant qui avait confié la gestion comptable et administrative de son entreprise à son épouse, laquelle avait commis des détournements de fonds (et de laquelle il finira par divorcer). Le juge a considéré que le dirigeant aurait dû déceler les malversations commises par l’ex-épouse (qui sera finalement condamnée pénalement) s’il avait effectué en temps utile les contrôles qu’il lui appartenait de faire. Cette carence dans le contrôle interne de l’exploitation a eu pour conséquence un refus de déduction des pertes correspondant aux détournements de fonds.
Et après ? Si, par chance, l’entreprise récupère les fonds détournés (le salarié rembourse, l’assurance indemnise l’entreprise, etc.), le profit en résultant vient contribuer au résultat imposable de l’entreprise (en pratique, il s’agira de compenser la perte ou la provision déduite au moment du vol).
Le saviez-vous ?
Dans le cas où le vol ou le détournement portent sur des marchandises, il est tenu automatiquement compte de la charge correspondante du fait de la diminution des stocks en résultant à la clôture de l'exercice.
Notez aussi qu’au plan de la TVA, vous n’aurez pas de régularisation à opérer si le vol ou le détournement de marchandises sont justifiés, c’est-à-dire si vous avez régulièrement déposé plainte.
Sur le plan social. Dès lors que le détournement de fonds est prouvé et que l’auteur effectivement reconnu coupable est un salarié, vous pourrez engager une procédure disciplinaire à son encontre, en envisageant par exemple un licenciement pour faute.
Et pour le coupable ? Un vol commis par un salarié ne constitue pas, en tant que tel, pour ce dernier, un revenu distribué imposable. Mais l’administration fiscale pourrait considérer qu’il s’agit tout de même d’une source de profit imposable (dans la catégorie des bénéfices non commerciaux dans cette hypothèse).
À noter. La situation a été jugée différemment pour un dirigeant salarié non associé qui s’est rendu coupable de détournements de fonds : le juge a considéré que le dirigeant avait prélevé des bénéfices et les a imposés à son nom comme des revenus de capitaux mobiliers.
Détournement commis par un associé ou un dirigeant
Une solution différente pour les associés. Si le détournement est le fait d’un associé de la société, la perte en résultant ne constituera pas en elle-même une charge déductible des résultats imposables : ce détournement sera au contraire considéré comme une appréhension irrégulière d’une partie des bénéfices.
Le saviez-vous ?
Dans une telle situation, l’associé sera imposé personnellement à l’impôt sur le revenu à raison des fonds ainsi détournés au titre des revenus de capitaux mobiliers (si la société est soumise à l’impôt sur les sociétés).
Notez que dans les sociétés relevant de l’impôt sur le revenu, les associés restent imposables à raison de leur quote-part dans le résultat de la société, même si tout ou partie du bénéfice a été détourné par l’un d’eux.
À noter toutefois. Dans l’hypothèse où l’associé, auteur du détournement, n’a qu’une très faible participation dans le capital de la société, de sorte qu’il faille considérer qu’il ne joue pas un rôle aussi déterminant qu’un dirigeant dans la conduite des affaires, le détournement des fonds pourra être qualifié de perte déductible (toutes autres conditions étant par ailleurs remplies).
Une solution différente pour les dirigeants. Un détournement commis par un dirigeant ne sera pas déductible des résultats imposables de l’entreprise parce qu’il ne peut avoir été commis à l’insu de la société.
À noter. Le détournement sera considéré comme une appréhension irrégulière d’une partie des bénéfices. Dès lors que les sommes détournées ne constituent pas une charge déductible pour la société, elles doivent être imposées au titre de l’impôt sur le revenu du dirigeant associé dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers.
A retenir
Un détournement commis par un salarié constituera une charge déductible sur le plan fiscal si ce détournement a été commis à votre insu. A l’inverse d’un détournement commis par un associé ou un dirigeant qui n’est pas déductible sur le pan fiscal.
- Arrêt du Conseil d’État du 5 octobre 2007, n° 291049 (condition déduction fiscale d’un tournement commis par un salarié)
- Arrêt du Conseil d’État du 14 novembre 2014, n° 364792 (appréciation d’un détournement commis à l’insu des dirigeants)
- Arrêt du Conseil d’État du 14 février 2001, n° 193309 (détournement commis par un associé très minoritaire)
- Arrêt de la Cour de Cassation, chambre sociale, du 9 avril 2014, n° 13-10175 (qualification faute du salarié)
- Arrêt du Conseil d’État du 27 avril 2011, n° 319472 (détournement de fonds commis par l’ex-épouse)
- Arrêt de la cour administrative d’appel de Nancy du 22 mars 2018, n°16NC01979 (détournement de fonds commis par un dirigeant non associé)
- BOFiP-Impôts-BOI-BIC-CHG-60-20-10
- Arrêt du Conseil d’État du 12 avril 2019, n° 410042 (vol de billets en entreprise)
- Arrêt du Conseil d’État du 06 décembre 2023, n°458981 (détournements de fonds commis par un salarié également associé minoritaire)
Charges de personnel : quelle déduction fiscale ?
Charges de personnel : des rémunérations déductibles !
De quoi s’agit-il ? Les charges de personnel dont il s’agit, ici, correspondent aux salaires et autres appointements versés aux collaborateurs de l’entreprise, conformément à leur contrat de travail, en contrepartie du travail fourni pour lequel ils ont été embauchés.
Concrètement. On vise ici la rémunération principale (le salaire brut proprement dit), ainsi que ses accessoires : les éventuelles heures supplémentaires, les primes (d’assiduité, d’ancienneté, de technicité, d’objectif, etc.), les éventuels avantages en nature (mise à disposition d’un véhicule par exemple), les sommes versées au titre de l’intéressement ou de la participation, les abondements aux plans d’épargne entreprise, votre participation à l’achat de titres-restaurant, de chèques-vacances, etc.
Des charges déductibles ? Oui ! Les rémunérations versées aux salariés sont déductibles des résultats de l’entreprise. Pour être précis, il faut rappeler que cette déduction suppose 3 conditions : la rémunération doit correspondre à un travail effectif, ne doit pas être excessive et doit être réellement versée.
En pratique. La stricte application de ces conditions est rarement remise en cause par l’administration fiscale, s’agissant des rémunérations versées au personnel salarié de l’entreprise ; elle précise, elle-même, à cet égard, qu’il n’est pas question de discuter systématiquement le montant des salaires, appointements ou rémunérations versés par les entreprises à leur personnel non dirigeant, pour le seul motif que ce montant excéderait celui des rémunérations pratiquées pour les mêmes services dans des entreprises similaires.
Le saviez-vous ?
Retenez que le refus de déduction fiscale du salaire versé à un collaborateur, qui serait qualifié d’excessif, n’est susceptible d’intervenir que dans des situations exceptionnelles (par exemple, si l’administration relève des liens affectifs ou d'intérêts unissant les bénéficiaires à des personnes possédant le contrôle de l'entreprise qui pourraient laisser supposer que la rémunération n’est alors pas nécessairement accordée dans l’intérêt direct de l’entreprise).
À noter. La situation sera, en revanche, toute autre s’agissant des rémunérations versées aux dirigeants, et pour lesquelles l’administration fiscale appelle à la plus stricte application des conditions de déduction (dans le cadre des entreprises soumises à l’IS plus particulièrement, puisque, dans le cadre d’une entreprise relevant de l’IR, les rémunérations ne sont pas déductibles).
Le saviez-vous ?
Les indemnités, remboursements et allocations versés aux salariés correspondant à la prise en charge de l’entreprise de certains frais sont aussi déductibles, dès lors qu’ils correspondent à des dépenses d’ordre professionnel : frais de transport, frais de déplacement, frais de restaurant, indemnités de panier, etc.
Charges de personnel : à quel moment s’exerce cette déduction ?
Rémunérations de l’exercice. Par principe, seules les rémunérations dont l’entreprise est devenue débitrice au cours de l’exercice sont admises en déduction du résultat de cet exercice. Si ce principe semble évident, il appelle toutefois deux observations : comment gérer les avances au personnel ? Comment gérer les primes de fin d’année ?
Avance au personnel. Il peut arriver qu’une entreprise accorde une avance à un salarié qui se retrouve momentanément en difficulté. Il faut savoir que, dans cette hypothèse, cette avance est considérée comme un prêt accordé par l’entreprise au salarié, non déductible. Si vous faites une avance de ce type au profit d’un collaborateur, en fin d’exercice, à valoir sur une rémunération due au titre de l’exercice suivant, cette avance n’est pas déductible des résultats de l’exercice au cours duquel vous l’avez versée.
Le point sur les primes de fin d’année. A la clôture de l’exercice, il est généralement fait le point sur les objectifs assignés aux salariés et, par voie de conséquence, sur les primes éventuellement dues en rapport avec ces objectifs. En pratique, ces sommes sont souvent versées au cours de l’exercice suivant, de sorte qu’elles sont encore à régler à la clôture de l’exercice. Sur quel exercice doivent donc être déduites ces primes ?
2 méthodes. Tout d’abord, il faut savoir que si la prime résulte d’un engagement ferme de l’entreprise à l’égard de ses salariés, qui porte sur le principe et les modalités de calcul des sommes dues, la déduction fiscale sera acquise. Cette prime est déduite du résultat de l’exercice au titre duquel elle est calculée (indépendamment de son versement) : une prime liée à l’exercice 2022, versée pendant l’exercice 2023, est déduite au titre de l’exercice 2022. Mais 2 méthodes sont possibles, selon les hypothèses :
- soit vous connaissez exactement le montant de la prime à verser, dans ce cas vous la comptabilisez en « charges à payer » ;
- soit vous ne connaissez pas avec exactitude ce montant, et vous pourrez constater une provision, déductible du résultat fiscal.
Charges de personnel : des charges sociales déductibles !
Cotisations sociales. En plus des rémunérations, l’entreprise verse des cotisations sociales patronales (assurance maladie, assurance vieillesse, allocations familiales, accidents du travail, assurance chômage, etc.). Par principe, ces charges sont également admises en déduction du résultat fiscal de l’entreprise.
Quand ? La déduction des charges sociales suit le même régime que les rémunérations elles-mêmes. S’agissant des cotisations de sécurité sociale liées aux salariés dues en fin d’exercice, il est admis qu’elles soient, bien que non encore versées, déduites du résultat de cet exercice au titre des « charges à payer ».
Charges de personnel : focus sur les congés payés
Le principe. Les droits à congés acquis au cours de la période qui s'étend du 1er juin au 31 mai (dite « période de référence ») doivent être utilisés de la manière suivante : pour partie au cours d'une période fixée par les conventions ou accords collectifs de travail, comprenant dans tous les cas la période du 1er mai au 31 octobre de chaque année (période légale des congés), et pour le solde avant le 30 avril de l'année suivante, sauf disposition conventionnelle contraire.
Une indemnité déductible. Au cours de son congé, le salarié perçoit une indemnité versée par l’entreprise (sous réserve des dispositions particulières concernant notamment les entreprises du secteur du bâtiment et des travaux publics). Par principe, les droits à congés acquis par les salariés à la clôture de l’exercice, et les charges sociales correspondantes, sont déductibles des résultats imposables de l’entreprise. Pour quel montant ?
Combien ? L’indemnité est égale à 10 % de la rémunération totale perçue par le salarié au cours de la période de référence. Toutefois, cette indemnité ne peut être inférieure au montant de la rémunération qui aurait été perçue pendant la période de congé si le salarié avait continué à travailler (ce qui a pour effet d'inclure les augmentations de salaires obtenues avant la prise du congé dans l'indemnité à verser au salarié en congé).
Le saviez-vous ?
À la clôture de l'exercice, vous devez comptabiliser l'indemnité correspondant aux droits acquis et non utilisés par les salariés. Le montant estimé de l'indemnité et des charges sociales et fiscales correspondantes doit être enregistré dans un compte de provision ou de charge à payer.
À noter. Pour information, certaines entreprises constituées avant 1987 ont pu opter (de manière irrévocable), avant cette date, pour un régime spécifique : ce régime leur permet de déduire l’indemnité de congés payés au titre de l’exercice au cours duquel elle est effectivement payée (ce qui suppose une correction extracomptable pour la détermination du résultat fiscal, l'indemnité liée aux droits acquis et non utilisés à la clôture de l'exercice n'étant alors pas déductible sur le plan fiscal).
Charges de personnel : focus sur le prêt de main d’œuvre
Un principe à connaître. Par principe, le prêt de main d’œuvre réalisé dans un but lucratif est interdit (hors hypothèses particulières, liées notamment au travail temporaire, au portage salarial, aux sociétés sportives, à la mise à disposition de salarié auprès d’organisations syndicales, etc.) : concrètement, la mise à disposition de personnel salarié auprès d’une autre entreprise en facturant cette prestation avec une marge bénéficiaire est interdite.
Quelle déduction fiscale ? Cela signifie qu’en présence d’une mise à disposition de personnel, seuls sont refacturés à l’entreprise utilisatrice les salaires versés au salarié prêté, les charges sociales correspondantes et les éventuels frais professionnels remboursés au salarié au titre de sa mise à disposition. Ces frais constituent alors pour l’entreprise utilisatrice des charges déductibles (et des produits imposables pour l’entreprise prêteuse).
Le saviez-vous ?
L’administration admet que des frais de gestion puissent être également refacturés à l’entreprise utilisatrice, sans que cela remette en cause le caractère non lucratif du prêt de main d’œuvre. Cela suppose toutefois que ces frais demeurent (dixit l’administration) modérés et justifiés.
Une déduction spécifique. La Loi de Finances rectificative pour 2017 a mis en place la possibilité, pour l’entreprise prêteuse, de déduire de son résultat imposable la totalité des charges de personnel supportées par elle au titre du prêt de main d’œuvre. Cette déduction suppose que le prêt de main d’œuvre soit mis en place, conformément aux règles édictées par le code du travail.
À noter. La déduction totale est possible, même si elle dépasse le montant refacturé à l’entreprise utilisatrice, et sans que cette opération soit alors requalifiée en acte anormal de gestion, impliquant un refus de déduction des charges correspondantes. Dans cette hypothèse toutefois, l’entreprise prêteuse sera soumise au respect de la règlementation relative aux aides de minimis.
Rappel. La règlementation européenne en matière d’aide de minimis prévoit que le total des avantages fiscaux dont pourra bénéficier l’entreprise est limité à 200 000 € sur une période glissante de 3 ans : il s’agit d’un plafond global et non d’un plafond applicable pour chaque avantage financier.
A retenir
Les charges de personnel (salaires, accessoires du salaire, avantages en nature, charges sociales correspondantes, etc.) sont par principe déductibles du résultat de l’entreprise. L’administration remet (très) rarement en cause cette déduction fiscale sur le fondement d’une rémunération excessive.
Retenez que des règles spéciales s’appliquent aux congés payés et aux éventuelles primes dues en fin d’année (qui peuvent faire l’objet de provisions).
- Article 39 du Code général des impôts
- Article L 8241-1 du Code du travail (prêt de main d’œuvre)
- BOFiP-Impôts-BOI-BIC-CHG-40-40
- BOFiP-Impôts-BOI-BIC-PROV-30-20-10
- Loi de finances rectificative pour 2017 du 28 décembre 2017, n°2017-1775 (article 13)
- Arrêt du Conseil d’État du 11 juillet 2018, n°405127 (avantage en nature, loyer et déduction
- Réponse ministérielle Besson-Moreau du 26 avril 2022, Assemblée nationale, n°42423 (critères d’appréciation du caractère excessif d’une rémunération)
Focus sur les dépenses non déductibles
Déduction des charges : une déduction sous condition
Des charges déductibles si… Pour déduire, sur le plan fiscal, les dépenses et autres charges du résultat imposable de l’entreprise, vous devez respecter des conditions précises que l’administration s’attachera à vérifier dans le cadre d’un contrôle fiscal.
3 conditions principales. Une charge ou une dépense viendra diminuer immédiatement le résultat de l’entreprise (dans le jargon, on applique le principe selon lequel la dépense se traduit comptablement par une diminution de l’actif net de l’entreprise), à la différence de l’immobilisation, qui correspond à un investissement venant au contraire augmenter la valeur patrimoniale de l’entreprise (et donc la déduction s’opèrera de manière échelonnée dans le temps, sous forme d’amortissement). Cette déduction comptable sera admise sur le plan fiscal si, d’une part, elle est régulièrement justifiée et comptabilisée, et si, d’autre part, elle est engagée dans l’intérêt de l’exploitation. C’est cette dernière condition qui nous intéresse ici.
Une dépense non déductible ? Une charge, déduite sur le plan comptable, mais dont la déduction n’est pas admise sur le plan fiscal, devra être « rapportée au résultat » : en clair, vous devrez majorer à due concurrence le résultat effectivement soumis à l’impôt. Exemple : prenons l’hypothèse d’une entreprise qui constate un bénéfice comptable de 10 000 €. Elle a constaté dans ses charges une amende de 1 000 € qui n’est pas déductible au plan fiscal. Cette somme de 1 000 € devra être « réintégrée » dans le résultat fiscal : l’impôt sur les bénéfices sera donc calculé sur la base d’un résultat fiscal égal à 11 000 €.
Déduction des charges : des interdictions à connaître !
D’une manière générale. Si vous entendez déduire une dépense ou une charge, il vous revient de justifier du principe même de sa déductibilité : pour apporter la preuve de son caractère déductible, vous devez être en mesure de produire tous les éléments justificatifs suffisamment précis portant sur la nature de la dépense ou de la charge et sur l’existence de la valeur de la contrepartie que l’entreprise en retire (au moyen d’une facture régulière par exemple).
Un contrôle de l’administration fiscale. Cette justification se fera sous le contrôle de l’administration fiscale qui pourra, le cas échéant, considérer, sous réserve de le prouver, que la dépense n’est pas déductible par nature, qu’elle est dépourvue de contrepartie, qu’elle a une contrepartie dépourvue d’intérêt pour l’entreprise ou encore que la rémunération de cette contrepartie est excessive.
Exemple. Une société déduit de son résultat imposable des frais qui correspondent à l’utilisation d’une voiture et d’une moto haut de gamme (BMW) par le dirigeant et son épouse salariée. Une déduction refusée par l’administration pour qui ces véhicules ne sont pas utilisés dans le cadre professionnel. Elle précise, en effet, que le dirigeant bénéficie déjà, pour ses déplacements professionnels, de 2 autres véhicules haut de gamme (Audi et Porsche Cayenne), et que son épouse dispose elle aussi d’un véhicule mis à sa disposition par la société pour ses déplacements professionnels. De plus, la société ne compte que 3 autres salariés, dont 2 qui ont été embauchés pour quelque mois seulement.
Donc. Puisqu’aucun élément ne permet d’établir que ces véhicules sont utilisés par le dirigeant, son épouse, ou l’un des 3 autres salariés, dans un cadre professionnel, le juge confirme que les frais engagés ne sont pas déductibles du résultat imposable de la société. Le redressement fiscal est donc maintenu.
Des dépenses non déductibles ? En dehors du cas où une charge ne serait pas déductible, parce qu’elle est estimée non justifiée ou excessive par l’administration fiscale, ou encore parce que cette dernière estime qu’elle n’est pas engagée dans l’intérêt de l’entreprise, la Loi peut tout simplement interdire la déduction d’une charge.
Pour les charges d’exploitation. Il en sera ainsi, par exemple :
- des dépenses dites somptuaires, sauf exception : sont visées les dépenses de chasse, les dépenses de pêche non professionnelle, l’achat ou la location de résidence de plaisance, l’achat ou la location de bateau de plaisance ;
- de la partie des rémunérations qualifiée d’excessive, versée aux dirigeants (peuvent être visés les avantages en nature, les remboursements de frais, etc.) ;
- etc.
Pour les charges financières. On relèvera notamment parmi les charges financières non déductibles :
- la part des intérêts de comptes courant d’associés qui excède le taux maximum admis sur le plan fiscal ;
- les dons versés dans le cadre du mécénat à un organisme sans but lucratif (association, fondation, etc.), lesquels ouvrent droit à une réduction d’impôt spécifique ;
- etc.
Pour les charges exceptionnelles. Certaines dépenses dites exceptionnelles ne sont pas admises en déduction. Il en est ainsi par exemple :
- des pénalités et amendes prononcées à l’encontre de l’entreprise qui contrevient à une obligation légale : pénalités fiscales, amendes pénales, majorations et pénalités de retard liées aux cotisations sociales, pénalités prononcées par une autorité administrative, etc.
- les abandons de créance de nature financière consentis au profit d’une société filiale.
« Punitive damages ». À l’inverse, les « punitive damages », c’est-à-dire les dommages et intérêts punitifs ou exemplaires versés à une victime, notamment dans le cadre de litiges commerciaux, sont déductibles. Cela résulte du fait que ces indemnités, qui ne sont pas versées à une autorité publique, ne viennent pas sanctionner le non-respect d’une obligation légale, mais plutôt réprimer un comportement particulièrement dommageable dans le cadre de relations commerciales.
À retenir
Parmi les charges qui ne peuvent pas être déduites du résultat fiscal (on parle de « réintégrations fiscales »), on retrouve les dépenses dites somptuaires, certains impôts (notamment l’impôt sur les bénéfices), la rémunération des dirigeants lorsqu’elle est qualifiée d’excessive, etc.
- Article 39 du Code général des impôts
- Article 154 du Code général des impôts (salaire du conjoint de l’exploitant ou de l’associé d’une société de personnes)
- Arrêt du Conseil d’État du 30 mars 2011 n° 334152 (justification dépenses)
- Arrêt du Conseil d’État du 11 juillet 2018, n°405127 (dépenses non réalisées dans l’intérêt de l’exploitation et refus de déduction)
- BOFiP-Impôts-BOI-BIC-CHG-40-30
- Loi de finances rectificative pour 2017 du 28 décembre 2017, n°2017-1775, article 14
- Loi de finances pour 2019 du 28 décembre 2018, n°2018-1317, article 60
- Arrêt de la Cour administrative d’appel de Lyon du 5 décembre 2019, n°18LY01587 (5 véhicules haut de gamme mis à disposition de 2 salariés)
- Loi de finances pour 2020 du 28 décembre 2019, n°2019-1479, article 69
- Décret n°2020-169 du 27 février 2020 fixant la date à compter de laquelle les émissions de dioxyde de carbone utilisées pour les besoins de la fiscalité des véhicules de tourisme seront déterminées selon la procédure d’essai mondiale harmonisée –WLTP- pour les voitures particulières et véhicules utilitaires légers
- Arrêt du Conseil d’État du 21 juillet 2021, n°433101 (exemple de charge non déductible – loyers versés pour la location du domicile du gérant)
- Arrêt de la Cour administrative d’appel de Versailles du 5 octobre 2021, n°20VE00034 (déduction possible des « punitive damages »)
- Arrêt de la Cour administrative d’appel de Nantes du 26 novembre 2020, n°19NT00199 (exemple de charge non déductible – « redevance de marque »)
- Arrêt de la Cour administrative d’appel de Paris du 9 juin 2021, n°20PA01202 (Frais d’avocat engagés par un dirigeant dans le cadre d’un procès pénal personnel)
- Arrêt du Conseil d’État du 18 octobre 2023, n° 464201 (dépenses non réalisées dans l’intérêt de l’exploitation et refus de déduction)
- Arrêt du Conseil d’État du 8 décembre 2023, n°458968 (dommages-intérêts punitifs et refus de déduction)
- Arrêt de la Cour administrative d’appel de Paris du 27 février 2024, n° 22PA01903 (dépenses non réalisées dans l’intérêt de l’exploitation et refus de déduction)
- Arrêt de la Cour administrative d’appel de Lyon du 29 février 2024, no 22LY01462 (prestations fictives et refus de déduction)
- Arrêt de la Cour administrative d’appel de Nantes du 13 février 2024, n° 22NT02728 (déduction de loyer d'un appartement de luxe)
Acte anormal de gestion : comment l’éviter ?
Gestion de l’entreprise : c’est vous le patron !
Déterminer le résultat fiscal de l’entreprise. Pour déterminer le résultat fiscal de votre entreprise, il va falloir tenir compte, non seulement de l’ensemble des produits imposables, mais aussi de l’ensemble des dépenses et autres charges qui pourront être déduites de ces mêmes produits. Le contrôle fiscal s’exerçant a posteriori en France, l’administration fiscale pourra revenir sur les modalités de détermination du résultat fiscal, qui sert de base de calcul à l’impôt sur les bénéfices, et refuser, sous réserve d’en expliquer les raisons, la déduction d’une dépense ou d’une charge. À quelles conditions ?
Ce que vous pouvez faire… Par principe, vous êtes maître de la gestion de votre entreprise : il ne saurait être question de vous reprocher de ne pas avoir, par vos choix, retirer le meilleur profit possible de votre exploitation. Ainsi, si vous préférez, par exemple, recourir à l’emprunt, générateur de charges financières, pour financer un investissement plutôt que de puiser dans la trésorerie de l’entreprise, libre à vous. De la même manière, ce n’est pas parce que vous vous engagez dans une opération risquée que l’administration fiscale pourra refuser la déduction des charges correspondantes.
Ce que vous ne pouvez pas faire… L’administration fiscale, parce qu’elle n’a pas le droit de s’immiscer dans la gestion de votre entreprise, n’a pas à juger de l’opportunité de vos dépenses et décisions, même si elles ont un impact financier pour l’entreprise. Mais elle pourra toutefois apprécier la « normalité » de cette charge : qu’est-ce que cela veut dire ? En retenant la qualification d’acte anormal de gestion, l’administration considère que la dépense mise à la charge de l’entreprise est contraire à ses intérêts (la dépense est engagée dans l’intérêt d’un tiers à l’entreprise par exemple). Cette qualification pourra également être retenue si l’opération contestée par l’administration a pour finalité de priver votre entreprise d’une recette.
Exemple. C’est précisément ce qu’a reproché l’administration à une société à l’issue d’un contrôle fiscal. La société, propriétaire d’un local commercial donné en location, a renoncé à percevoir 50 % du loyer, le locataire ayant des difficultés financières. Ne prouvant pas que cette renonciation à recettes avait été consenti dans l’intérêt de l’exploitation, l’administration et le juge ont décidé qu’il s’agissait en réalité d’un acte anormal de gestion et ont rehaussé en conséquence le bénéfice imposable.
Le saviez-vous ?
L’administration ne peut apprécier la normalité d’une prise de décision par l’entreprise, comme l’engagement d’une charge par exemple, qu'au regard du seul intérêt de l’entreprise : non seulement elle n’a pas à juger de l’opportunité d’une dépense, mais l’administration n’a pas non plus le droit de juger l’ampleur du risque pris par l’entreprise.
Un exemple classique. Les relations qu’entretiennent les associés et dirigeants avec leur société sont souvent sujettes à un contrôle attentif de la part de l’administration fiscale. À titre d’exemple, dans l’hypothèse où le dirigeant est propriétaire des locaux dans lesquels est installée son entreprise, l’administration fiscale s’attachera à vérifier si le montant du loyer n’est pas anormalement élevé, ce qui pourrait entraîner, pour l’entreprise, un appauvrissement injustifié, dans l’intérêt direct de son dirigeant. Ce n’est que sur ce fondement qu’elle pourra remettre en cause la déduction du loyer, et non sur le fait que le propriétaire des locaux est, également, le dirigeant. Il en va de même lorsque l’entreprise rachète un immeuble appartenant à ses associés : l’administration fiscale vérifiera si le prix d’achat n’est pas anormalement élevé, ce qui pourrait entraîner, pour l’entreprise, un appauvrissement injustifié dans l’intérêt direct de ses associés.
Contrôle de l’entreprise : l’administration en mode « contrôle de gestion »
Des charges déductibles si… Pour déduire, sur le plan fiscal, les dépenses et autres charges du résultat imposable de l’entreprise, vous devez respecter des conditions précises que l’administration s’attachera à vérifier dans le cadre d’un contrôle fiscal.
3 conditions principales. Pour être déduite, la charge (ou la dépense) doit :
- diminuer immédiatement le résultat de l’entreprise (dans le jargon, on applique le principe selon lequel la dépense se traduit comptablement par une diminution de l’actif net de l’entreprise), à la différence de l’immobilisation, qui correspond à un investissement venant au contraire augmenter la valeur patrimoniale de l’entreprise (et dont la déduction s’opèrera de manière échelonnée dans le temps, sous forme d’amortissement) ;
- être justifiée et déduite comptablement ;
- être engagée dans l’intérêt de l’exploitation. C’est cette dernière condition qui nous intéresse ici.
L’administration se retranche derrière l’intérêt de votre entreprise. Cela semble peut-être évident, mais des dépenses d’ordre strictement privées ne pourront pas être déduites du résultat imposable de votre entreprise. De même, une charge qui profite directement à un tiers à l’entreprise, sans aucun rapport avec l’exploitation, ne sera pas déductible des résultats imposables de l’entreprise. Il sera également possible pour l’administration de refuser la déduction d’une charge, du moins en partie, si elle estime qu’elle est d’un montant excessif non justifié.
Exemple. Reprenons l’exemple fréquent de la location des locaux d’exploitation par le dirigeant au profit de son entreprise. La fixation du montant du loyer sera contrôlée par l’administration : si elle estime que le montant est anormalement élevé, elle pourra refuser la déduction de la partie qu’elle estime excessive.
Autre exemple. Un cas fréquent de remise en cause de la déduction d’une dépense concerne aussi les remboursements de frais de déplacement du dirigeant. C’est ce qui est arrivé à un gérant de société qui n’a pas été en mesure de prouver que les remboursements de factures d’hôtel, de restaurant, de billets de train ou d’avion correspondaient à des dépenses engagées dans l’intérêt de l’exploitation : ces factures étaient libellées au nom du gérant lui-même ou ne mentionnaient aucun nom.
Le risque. Il se traduit, de prime abord, par le refus de la déduction fiscale de la charge ou le refus de prise en compte d’une éventuelle renonciation à recette, de sorte que le résultat imposable sera rehaussé à due concurrence. Et s’il est avéré que l’acte ou la charge en question vous profite directement, l’administration pourra en tirer toutes les conséquences à votre niveau en rehaussant vos propres revenus imposables (elle retiendra la qualification de « revenus réputés distribués »).
Encore faut-il qu’elle motive son redressement ! L’administration fiscale est tenue de motiver son redressement si elle retient à votre encontre cette théorie de l’acte anormal de gestion : il ne lui suffit donc pas d’énoncer simplement qu’un acte ou une opération sont anormaux pour rectifier votre résultat imposable. Elle doit prouver que l’acte ou la dépense sont contraires aux intérêts de l’exploitation et augmente indûment ses charges ou la prive d’une recette. Mais elle n’a pas toujours raison.
Exemple. Afin de mettre fin à un litige entre des associés et une ancienne dirigeante, elle-même associée, un protocole d’accord est mis en place : en échange de l’abandon des poursuites judiciaires intentées par l’ancienne dirigeante suite à sa révocation et aux diverses actions engagées en vue de contrarier l’exploitation de la société, la société lui accorde des avantages à valoir sur sa production et prend en charge ses frais d’avocats. L’administration estime que la société s’est, non seulement, indûment privée de recettes, mais a pris en charge des dépenses d’ordre privé, en dehors de toutes considérations liées à sa propre exploitation. Mais le juge a donné raison à la société : la mise en place de ce protocole, avec les concessions réciproques qu’il induit, a permis de mettre fin à un litige qui s’avérait particulièrement nuisible à son image et à son fonctionnement.
Conseil. Comme toujours en matière de preuve, celui qui la supporte lance un débat que l’autre s’attachera à réfuter. Et ce principe vaut pour la déduction fiscale des charges de l’entreprise :
- de votre côté, vous devez justifier tant du montant de la charge que vous entendez déduire que du principe même de sa déductibilité ; et cette justification sera utilement rapportée par la production de tous éléments suffisamment précis détaillant la nature de cette charge (facture, contrat, etc.) ;
- si l’administration entend remettre en cause cette déduction, elle devra alors, de son coté, apporter la preuve que la charge en cause est non déductible par nature, excessive, dépourvue de contrepartie ou contraire aux intérêts de l’entreprise.
Le saviez-vous ?
En matière de TVA, l’acte anormal de gestion se rencontre plus rarement (notamment en présence d’opérations fictives) : ce n’est pas parce qu’une opération est anormale qu’elle n’en est pas pour autant effective.
Retenez que dès lors que l’opération n’est pas purement fictive, la TVA correspondante n’en demeurera pas moins déductible pour l’entreprise (toutes autres conditions pour autoriser cette déduction étant réunies), indépendamment de l’appréciation que l’administration porte sur l’opération au regard de sa « normalité ».
Pour rappel. La TVA facturée par un fournisseur est déductible pour l’entreprise de la taxe à laquelle elle est elle-même assujettie à condition :
- que les factures mentionnent ladite taxe ;
- qu'elles aient été établies au nom du redevable par son fournisseur ;
- qu'elles correspondent effectivement à l'exécution de la prestation de service dont elles font état ou des biens ou marchandises achetées ;
- et que le prix indiqué soit réellement celui qui a été payé par l'entreprise.
Déduire une dépense : les bons réflexes !
En pratique… Fort heureusement, de nombreuses dépenses ou charges ne souffrent pas véritablement de discussions : il ne saurait être question de remettre en cause le principe d’un loyer payé par l’entreprise pour l’utilisation des locaux d’exploitation (encore que le montant du loyer peut faire l’objet d’un contrôle, surtout si vous êtes le propriétaire des murs), ni les charges d’exploitations récurrentes, ni les approvisionnements, ni les charges d’emprunt contracté pour le financement d’investissements professionnels, etc. Les questions se concentrent essentiellement dans les hypothèses où l’administration suspecte que la charge ou la dépense profitent à des tiers.
La charge de la preuve… D’une manière générale, lorsque l’administration fiscale entend remettre en cause la normalité d’une dépense ou d’un acte, pour rectifier le résultat imposable de votre entreprise, la charge de la preuve lui incombera (sauf exceptions précises, notamment en cas d’imposition d’office par exemple). Mais, comme toujours en matière de preuve, celui qui supporte cette charge ne fait que mettre en avant des éléments de preuve que la partie adverse aura à cœur de réfuter. Ce qui signifie que vous ne serez pas dispensé, en tout état de cause, d’apporter la preuve que la dépense ou l’opération incriminées ont bien été engagées dans l’intérêt de votre entreprise.
Une preuve de l’intention libérale ? Dans tous les cas, retenez que l’administration fiscale n’a pas à démontrer l’existence d’une intention libérale, c’est-à-dire d’une volonté de donner quelque chose sans contrepartie, pour qualifier une opération « d’acte anormal de gestion ».
Le saviez-vous ?
Munissez-vous toujours d’une facture ou d’une pièce justificative : comme l’a rappelé le juge de l’impôt, la seule comptabilisation de la charge, même réellement supportée, ne suffit pas à justifier sa nature, ainsi que l’existence et la valeur de la contrepartie, et donc l’intérêt de l’entreprise à engager la dépense.
Dans tous les cas… Vous devez être en mesure d’apporter la preuve de votre bon droit : il s’agit là d’un principe à avoir à l’esprit lorsque vous déduisez une charge quelle qu’elle soit. Posez-vous systématiquement la question suivante : quel intérêt a mon entreprise à prendre telle ou telle dépense en charge ? La réponse à cette question vous permettra de développer un argumentaire précieux dans l’hypothèse où l’administration remettrait en cause la déduction fiscale : la prise en charge de frais de déplacements permet de développer la prospection commerciale, les cadeaux d’affaires permettent de maintenir de bonnes relations commerciales avec les clients et fournisseurs, tel investissement permet de renouveler les outils de production, etc.
Exemple. Une société organisait, pour ses clients, des journées de promotion, au cours desquelles étaient prévus des tours de circuits en Porsche (véhicule non immatriculé uniquement utilisé sur circuit). Elle prenait en charge les frais d’utilisation et d’entretien de ce véhicule comptabilisés en charges déductibles du résultat imposable. Bien que l’administration fiscale se soit opposée à cette déduction, le juge a, au contraire, considéré que ces dépenses étaient déductibles : la société a apporté suffisamment d’éléments de nature à démontrer que ces dépenses étaient exposées dans l’intérêt de l’exploitation, dans le but de développer et de conserver sa clientèle (ce qui s’est notamment traduit par une progression de son activité).
Et plus spécialement... Certaines dépenses ou prises en charges de frais sont plus suspectes que d’autres aux yeux de l’administration, et spécialement celles qui entremêlent vos intérêts à ceux de l’entreprise. Soyez ici particulièrement vigilant, d’autant que l’administration disposera d’arguments à mettre en avant plus facilement dès lors que vous apparaissez directement. En tout état de cause, à chaque fois que s’entremêlent les intérêts de plusieurs personnes, voire même de plusieurs entreprises, demandez-vous toujours à qui profite la dépense.
À retenir
L’administration, dans le cadre de sa mission de contrôle, sera amenée à vérifier que les différentes charges ou dépenses prises en compte pour la détermination du résultat fiscal de l’entreprise, ont été effectivement engagées dans l’intérêt direct de l’exploitation, et non pas pour servir les intérêts de ses dirigeants, de ses associés, ou de tiers.
Elle pourra requalifier une dépense en considérant qu’elle n’a pas été engagée dans l’intérêt direct de l’exploitation, ce qui se traduira par un refus de déduction fiscale de la charge correspondante. S’il lui appartiendra d'apporter la preuve de ce qu’elle avance, anticipez les questions éventuelles en vous attachant à justifier systématiquement les dépenses prises en charge par l’entreprise.
- Arrêt du Conseil d’État du 2 avril 2003, no 233375 (acte anormal de gestion et TVA)
- Arrêt du Conseil d’État du 16 juillet 2008, no 291400 (remboursements de frais engagés dans l’intérêt de l’entreprise)
- Arrêt de la cour administrative d’appel de Nancy du 15 janvier 2009, no 07NC01335 (dépenses d’utilisation et d’entretien d’un véhicule Porsche)
- Arrêt du Conseil d’État du 30 mars 2011, no 334152 (preuve de la réalité de la charge)
- Arrêt de la cour administrative d’appel de Bordeaux du 4 juin 2013, no 11BX00915 (protocole d’accord et acte anormal de gestion)
- Arrêt de la Cour Administrative d’Appel de Bordeaux du 17 octobre 2013, no 11BX03266 (refus de déduction des remboursements de frais au gérant)
- Arrêt du Conseil d’État du 9 avril 2014, no 358279 (charge de la preuve)
- Arrêt du Conseil d’État du 23 janvier 2015, no 369214 (exemple immixtion dans la gestion de l’entreprise sanctionnée par le juge)
- Arrêt du Conseil d’État du 20 mai 2015 no 369373 (exemple immixtion dans la gestion de l’entreprise sanctionnée par le juge)
- Arrêt du Conseil d’État du 13 juillet 2016, no 375801 (l’administration n’a pas le droit de juger l’ampleur du risque pris par l’entreprise)
- Arrêt de la cour administrative d’appel de Versailles du 7 février 2017, no 15VE03890 (le risque manifestement excessif n’est pas un critère d’acte anormal de gestion)
- Arrêt du Conseil d’État du 22 décembre 2017, no 401489 (antiquaire, preuves suffisantes, et déduction des charges d’exploitation)
- Arrêt de la cour administrative d’appel de Paris du 9 novembre 2017, no 16PA03719 (avocat, secret professionnel et intérêt de l’entreprise)
- Arrêt du Conseil d’État du 12 octobre 2018, no 405256 (renonciation à recettes et acte anormal de gestion)
- Arrêt du Conseil d’État du 30 janvier 2019, no 408436 (cession à prix minoré et manque de preuve de l’acte anormal de gestion)
- Arrêt du Conseil d’État du 6 février 2019, no 410248 (acte anormal de gestion et preuve de l’intention libérale)
- Arrêt du Conseil d’État du 15 février 2019, no 407531 (achat par l’entreprise d’un immeuble appartenant à ses associés pour un prix anormalement élevé)
- Arrêt du Conseil d’État du 12 juin 2019, no 403413 (exemple acte anormal de gestion)
- Arrêt de la cour administrative d’appel de Paris du 24 novembre 2020, no 19PA00948 (absence de preuve de l’acte anormal de gestion)
- Arrêt de la cour administrative d’appel de Douai du 28 octobre 2021, no 19DA00178 (exemple acte anormal de gestion)
- Arrêt du Conseil d’État du 11 mars 2022, no 453016 (cession à prix minoré et manque de preuve de l’acte anormal de gestion)
- Arrêt de la cour administrative d’appel de Marseille du 17 mars 2022, no 21MA02353 (avances entre sociétés sœurs et acte anormal de gestion)
- Arrêt de la Cour administrative d’appel de Nantes du 13 février 2024, n° 23NT02728 (abandon de loyer et prêt sans intérêts)
- Arrêt de la Cour administrative d’appel de Lyon du 29 février 2024, no 22LY03705 (cession à prix minoré et acte anormal de gestion)
- Arrêt de la Cour administrative d’appel de Marseille du 8 février 2024, no 22MA00906 (location d’une maison et acte anormal de gestion)
Soutenez une association et faites des économies d’impôt sur les bénéfices
Mécénat : à qui pouvez-vous faire un don ?
Une 1re condition à vérifier ! Le bénéfice de la réduction d’impôt suppose que le don soit fait au profit d’une association « éligible » : entendez par-là une association qui est habilitée par la réglementation fiscale à recevoir des dons ouvrant droit à la réduction d’impôt. Au profit de qui devrez-vous faire ce don ?
Plus exactement… Voici la liste exhaustive des organismes éligibles à cette réduction d’impôt :
- œuvres ou organismes d'intérêt général ayant un caractère philanthropique, éducatif, scientifique, social, humanitaire, sportif, familial, culturel ou concourant à la mise en valeur du patrimoine artistique, à la défense de l'environnement naturel ou à la diffusion de la culture, de la langue et des connaissances scientifiques françaises ;
- fondations universitaires, fondations partenariales, fondations d’entreprise, projets de thèse proposés au mécénat de doctorat par les écoles doctorales ;
- fondations ou associations reconnues d’utilité publique ;
- musées de France ;
- associations cultuelles ou de bienfaisance et établissements publics des cultes reconnus d'Alsace-Moselle ;
- établissements d'enseignement supérieur ou d'enseignement artistique publics ou privés, d'intérêt général, à but non lucratif ;
- établissements d’enseignement supérieur consulaire pour leurs activités de formation professionnelle, initiale et continue, et de recherche ;
- sociétés ou organismes de recherche scientifique et technique, publics ou privés, agréés ;
- organismes publics ou privés, dont la gestion est désintéressée et qui ont pour activité principale la présentation au public d'œuvres dramatiques, lyriques, musicales, chorégraphiques, cinématographiques, audiovisuelles et de cirque ou l'organisation d'expositions d'art contemporain, à la condition que les versements soient affectés à cette activité ;
- Fondation du patrimoine ou fondations ou associations qui affectent irrévocablement ces versements à la Fondation du patrimoine ;
- organismes de sauvegarde du patrimoine culturel d’intérêt mondial ;
- fonds de dotation dont la gestion est désintéressée et qui, soit constituent eux-mêmes un organisme éligible, soit reversent à un tel organisme les revenus tirés des versements reçus ;
- organismes agréés dont l'objet exclusif est de verser des aides financières permettant la réalisation d'investissements ou de fournir des prestations d'accompagnement à des petites et moyennes entreprises ;
- sociétés, dont l'État est l'actionnaire unique, qui ont pour activité la représentation de la France aux expositions universelles ;
- sociétés nationales de programme pour le financement de programmes audiovisuels culturels ;
- orchestres de Radio France, fédérations ou unions d’organismes, dûment agréées, ayant pour objet exclusif de fédérer, d’organiser, de représenter et de promouvoir les organismes agréés, sous réserve qu’elles présentent une gestion désintéressée et réalisent exclusivement des prestations non rémunérées au bénéfice de leurs membres ;
- communes, syndicats intercommunaux de gestion forestière, syndicats mixtes de gestion forestière et groupements syndicaux forestiers pour la réalisation, dans le cadre d’une activité d’intérêt général concourant à la défense de l’environnement naturel, d’opérations d’entretien, de renouvellement ou de reconstitution de bois et forêts présentant des garanties de gestion durable, ou pour l’acquisition de bois et forêts destinés à être intégrés dans le périmètre d’un document d’aménagement approuvé.
Exemple des centres de santé associatifs. Les centres de santé, même constitués sous forme associative, ne peuvent pas recevoir de dons éligibles à la réduction d’impôt mécénat si leur activité s’inscrit dans un cadre concurrentiel, notamment avec des praticiens du secteur libéral, et si elle est exercée dans des conditions similaires. Cela tient au fait qu’en concurrençant le secteur privé, l’association ne peut pas être assimilée à un organisme « d’intérêt général ».
Mécénat : quel avantage fiscal ?
Une réduction d’impôt. Si vous faites un don, par l’intermédiaire de votre entreprise, vous pourrez bénéficier d’une réduction d’impôt qui viendra s’imputer directement sur l’impôt sur les bénéfices dû par votre entreprise. Mais le bénéfice de cette réduction d’impôt est entouré de conditions précises.
Quel montant ? Cette réduction d’impôt est égale à 40 % des sommes versées, pour la fraction des versements qui excède 2 M €. Pour les versements n’excédant pas ce seuil de 2 M €, le taux de la réduction d’impôt est fixé à 60 % des sommes versées dans la limite de 5 pour mille du chiffre d’affaires ou, si elle est plus favorable, dans la limite de 20 000 €.
Des exceptions. Le taux de 40 % ne s’appliquera pas aux versements effectués au profit d’organismes sans but lucratif qui proposent les prestations ou les produits suivants :
- fourniture gratuite de repas à des personnes en difficulté ;
- logement de personnes en difficulté ;
- lorsqu'elle est exercée à titre principal, la fourniture gratuite à des personnes en difficulté de :
- soins dispensés par les membres des professions médicales et paramédicales réglementées, par les pharmaciens, par les praticiens autorisés à faire usage légalement du titre d'ostéopathe, de chiropracteur, de psychologue ou de psychothérapeute et par les psychanalystes titulaires d'un des diplômes requis, à la date de sa délivrance, pour être recruté comme psychologue dans la fonction publique hospitalière ainsi que les travaux d'analyse de biologie médicale et les fournitures de prothèses dentaires par les dentistes et les prothésistes ;
- matériels (literie, dispositif d’occultation des fenêtres dans les pièces destinées à être utilisées comme chambre à coucher, etc.), ainsi que meubles de rangement, linge de maison, équipements de salle de bain et de puériculture, biberons et matériels pour nourrissons et enfants en bas âge, petits et gros appareils électroménagers ;
- matériels et équipements conçus spécialement pour les personnes handicapées ou à mobilité réduite ;
- fournitures scolaires, y compris jouets et jeux d'éveil et éducatifs ;
- vêtements, y compris chaussures ;
- produits sanitaires, y compris d'entretien ménager, et produits d'hygiène bucco-dentaire et corporelle ;
- produits de protection hygiénique féminine ;
- couches pour nourrissons ;
- produits et matériels utilisés pour l'incontinence ;
- produits contraceptifs.
Quelles conditions ? La réduction d’impôt a pour base le don que vous ferez à l’association choisie. Et qui dit « don », dit versement effectué sans aucune contrepartie directe ou indirecte à votre profit. L’administration précise que le mécénat s’entend, en effet, d’un soutien matériel ou financier apporté sans contrepartie directe ou indirecte de la part du bénéficiaire à une œuvre pour l’exercice d’activités présentant un intérêt général.
À ne pas confondre ! C’est en cela qu’un don se distingue d’une dépense de sponsoring, qui, elle, supposera une contrepartie, notamment un retour en termes de retombées publicitaires.
Quel type de don ? Dans la majorité des cas, le don se fera sous la forme d’un versement en numéraire (somme d’argent), mais rien n’interdit de faire un don en nature (biens, moyens en personnel, services, compétences.)
Un don de denrées alimentaires. Dans le cas d’un don en nature, même portant sur des denrées alimentaires, vous devrez retenir le prix de revient comme valeur servant de base au calcul de la réduction d’impôt. Ce prix de revient, qui correspond en général à la valeur marchande des denrées alimentaires, comprend également les coûts qui peuvent être supportés par la société pour acquérir ou produire les produits en question. De même, si la société a engagé des frais liés à des prestations relatives à ces dons (par exemple, si elle a fait appel à une entreprise de transport pour livrer les denrées à l’association), ces frais seront inclus dans le prix de revient, à condition bien sûr qu’ils puissent être rattachés à un don.
Un don sous forme de mise à disposition de personnel. Dans cette hypothèse, aussi appelée « mécénat de compétence » pour le calcul de la réduction d’impôt, le montant du don est évalué à son prix de revient, c’est-à-dire à hauteur de la rémunération et des charges sociales y afférentes. Ce prix de revient est plafonné, par salarié mis à disposition, à hauteur de 3 fois le montant du plafond de la sécurité sociale (3 666 € par mois en 2023).
Des salariés « pompiers » ? Si vous comptez parmi vos salariés des sapeurs-pompiers volontaires, vous pourrez bénéficier de cette réduction au titre de leur mise à disposition, à titre gratuit, au profit des services départementaux d’incendie et de secours (SDIS), pendant les heures de travail et pour des interventions opérationnelles ou des formations nécessaires pour la réalisation d’interventions opérationnelles. Pour le calcul de la réduction d’impôt, le don sera évalué à son prix de revient, c’est-à-dire à hauteur de la rémunération et des charges sociales y afférentes, desquelles seront déduits les éventuels dédommagements versés par le SDIS à l’entreprise (subrogation de l’indemnité du sapeur-pompier).
Des salariés « réservistes » ? Il en sera de même si vous comptez parmi vos salariés des réservistes : l’administration admet que la mise à disposition de salariés réservistes pendant les heures de travail au profit de la réserve opérationnelle des forces armées ou de la gendarmerie nationale constitue du mécénat, éligible à la réduction d’impôt. L’entreprise devra justifier cette mise à disposition par une attestation précisant les dates et heures des interventions des salariés au titre de cette réserve.
Mécénat : un reçu
Demandez un reçu ! Pour éviter toute remise en cause de la réduction d’impôt par l’administration fiscale, il vous faudra apporter la preuve que votre don répond aux conditions exigées par la règlementation : en clair, vous allez devoir prouver la réalité du don, la nature, la date et le montant du versement, ainsi que l’identité de l’association bénéficiaire.
Une obligation supplémentaire. Pour les dons et versements effectués depuis le 1er janvier 2022, l’entreprise doit être en mesure de présenter les pièces justificatives de la réalité des dons et versements effectués à la demande de l’administration fiscale, ainsi que le reçu fiscal conforme au modèle établi par l’administration.
À noter. L’administration peut se rendre directement dans les locaux d’une association pour contrôler les reçus fiscaux émis, et surtout, pour vérifier que les dons, mentionnés sur les reçus, ont réellement été encaissés par elle. Depuis le 1er janvier 2022, elle peut également contrôler sur place la régularité de la délivrance des reçus, attestations ou de tous autres documents par lesquels les organismes bénéficiaires de dons et versements indiquent à une entreprise qu’elle est éligible au bénéfice de la réduction d’impôt.
Garanties de l’organisme contrôlé. Ce contrôle sera toutefois assorti de diverses garanties pour l’organisme bénéficiaire, puisqu’il ne pourra notamment être engagé qu’à la condition que l’organisme qui bénéficie des dons et versements en ait été préalablement informé par le biais d’un avis de contrôle. De plus, la durée du contrôle sera limitée à 6 mois à compter de la présentation de l’ensemble des documents et pièces de toute nature nécessaires à l’administration.
Une amende. Le fait, pour une association, de délivrer sciemment un reçu permettant d'obtenir indûment une réduction d'impôt entraîne l'application d'une amende dont le taux est égal à celui de la réduction d'impôt ou du crédit d'impôt en cause. Le montant de l’amende sera calculé sur la base des sommes indûment mentionnées sur le reçu. À défaut d’une telle mention, l'amende sera égale au montant de l'avantage fiscal indûment obtenu.
Une déclaration annuelle. Les organismes qui délivrent des reçus, des attestations ou tous autres documents par lesquelles ils indiquent à une entreprise qu’elle est en droit de bénéficier d’une réduction d’impôt sont dans l’obligation, chaque année, au plus tard le 31 décembre, de déclarer à l’administration fiscale :
- le montant global des dons et versements mentionnés sur ces documents et perçus au cours de l’année civile précédente (ou au cours du dernier exercice clos s’il ne coïncide pas avec l’année civile) ;
- et le nombre de documents délivrés au cours de cette période ou de cet exercice.
Les exclusions. Notez que cette disposition ne s’applique pas :
- aux dons versés à une association de financement électorale ou à un mandataire financier, qui sont consentis à titre définitif et sans contrepartie, dont il est justifié à l’appui du compte de campagne présenté par un candidat, un binôme de candidats ou une liste ;
- aux dons ou des cotisations versées aux partis et groupements politiques par l’intermédiaire de leur mandataire.
Quelle sanction ? Pour mémoire, le défaut de production dans les délais prescrits d’un document devant être remis à l’administration fiscale entraîne l’application d’une amende de 150 €. Ce montant est porté à 1 500 € en cas d’infraction, pour la 2e année consécutive, à l’obligation de déposer la déclaration annuelle.
Mécénat : une obligation déclarative
Une déclaration spécifique. Vous devez, par principe, remplir et adresser avec votre déclaration de résultats l’imprimé n° 2069-RICI-SD (intitulé Réductions et crédits d’impôts de l’exercice) obligatoirement par voie électronique (sauf pour les auto-entrepreneurs).
Pour les gros « donateurs ». Les entreprises qui engagent des dépenses de mécénat à hauteur de plus de 10 000 € par exercice doivent déclarer à l’administration fiscale le montant et la date de ces dons, l’identité des bénéficiaires ainsi que, le cas échéant, la valeur des biens et services reçus directement ou indirectement en contrepartie. À défaut de respecter cette obligation, elles s’exposent au paiement d’une amende de 1 500 €.
Une transmission par voie électronique. Ces informations doivent être transmises par voie électronique, par l’intermédiaire du tableau joint au formulaire n°2069-RCI-SD, dans le délai prévu pour le dépôt de la déclaration de résultats.
A retenir
Pour autant que l’organisme à qui vous faites un don est éligible, l’entreprise bénéficiera d’une réduction d’impôt égale à 60 % du montant du don, retenu dans la limite de 5 p. mille du chiffre d’affaires ou de 20 000 € (si elle est plus favorable). Pour la fraction des versements qui excède 2 M €, ce taux est abaissé à 40 %.
- Article 238 bis du Code général des impôts
- Article 222 bis du Code général des impôt
- Article 1740 A du Code général des impôts
- BOFiP-Impôts-BOI-BIC-RICI-20-30
- Décret no 2016-395 du 31 mars 2016 portant simplification des obligations déclaratives relatives à certains crédits et réduction d'impôt
- Réponse ministérielle Mazetier, Assemblée Nationale, du 10 mai 2016, no 90682 (les organismes agréés d’accompagnement des associations ne sont pas éligibles au mécénat)
- BOFiP-Impôts-BOI-BIC-RICI-20-30-10-20
- BOFiP-Impôts-BOI-CF-COM-20
- Décret no 2017-1187 du 21 juillet 2017 relatif aux garanties applicables aux organismes faisant l’objet du contrôle prévu à l’article L 14 A du livre des procédures fiscales
- www.impots.gouv.fr
- Réponse ministérielle Laabid du 12 juin 2018, Assemblée nationale, no 7240 (détermination du prix de revient en présence d’un don de denrées alimentaires)
- Loi de finances pour 2019 du 28 décembre 2018, no 2018-1317 (articles 61, 148 et 149)
- Décret no 2019-531 du 27 mai 2019 relatif aux modalités de transmission à l'administration fiscale sur un support électronique des informations relatives aux dons et versements effectués par une entreprise pour un montant de plus de 10 000 € au cours d'un exercice
- Loi de finances pour 2020 du 28 décembre 2019, no 2019-1479 (article 134)
- Réponse ministérielle Blanchet du 31 décembre 2019, Assemblée nationale, no 11530 (mise à disposition de logements et calcul de la réduction d’impôt)
- Réponse ministérielle Thiériot du 25 février 2020, Assemblée nationale, no 24221 (centre de santé associatif)
- Actualité du 16 juin 2020 sur le site impôts.gouv.fr (télédéclaration du formulaire 2069-A et des formulaires annexes)
- Actualité BOFiP Impôts du 17 juin 2020, BOI-CF-COM-20-40 (montant de l’amende encouru pour la transmission d’un reçu permettant d’obtenir indûment une réduction d’impôt)
- Décret no 2020-1013 du 7 août 2020 fixant la liste des prestations et produits mentionnés au 2 de l'article 238 bis du code général des impôts en application de l'article 134 de la loi no 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020
- Réponse ministérielle Raison du 24 septembre 2020, Sénat, no 16328 (pas de réforme du mécénat pour soutenir les associations sportives en difficulté suite à la crise sanitaire liée au coronavirus)
- Loi de finances pour 2021 du 29 décembre 2020, no 2020-1721, article 149 (nouveau type d’organisme éligible)
- Rescrit BOFiP-Impôts-BOI-RES-BIC-000076 (cas particulier des SCIC)
- Rescrit BOFiP-Impôts-BOI-RES-BIC-000070 (cas particulier des organismes dont le siège social se situe en dehors de l’espace européen)
- Loi no 2021-1109 du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République, articles 18 à 20
- Guide pratique du mécénat de compétences, novembre 2021
- Communiqué de presse du ministère de l’économie, des finances et de la relance du 9 novembre 2021, no 1653
- Loi no 2021-1520 du 25 novembre 2021 visant à consolider notre modèle de sécurité civile et valoriser le volontariat des sapeurs-pompiers et les sapeurs-pompiers professionnels
- Décret no 2022-1116 du 4 août 2022 fixant les conditions d'attribution du label « employeur partenaire des sapeurs-pompiers »
- Actualité Entreprendre.Service-Public.fr du 2 novembre 2022 : « Associations : la déclaration des dons et des reçus fiscaux devient obligatoire »
- Loi de finances pour 2023 du 30 décembre 2022, no 2022-1726 (article 12)
- Arrêté du 9 décembre 2022 portant fixation du plafond de la sécurité sociale pour 2023
- Bulletin officiel des finances publiques : BOI-RES-BIC-000129, rescrit du 21 juin 2023 (le modèle de reçu fiscal n'est pas le seul valable)
- Réponse ministérielle Gatel du 14 septembre 2023, Sénat, no 03803 : « Capacité de donation par les producteurs locaux aux services de restauration scolaire »
La responsabilité sociétale des entreprises (RSE) : de quoi s’agit-il ?
RSE : une dynamique volontaire et un label pour l’entreprise
Définition. La RSE (responsabilité sociétale des entreprises) est l’intégration volontaire, par les entreprises, de préoccupations sociales et environnementales dans leurs activités commerciales et leurs relations avec les tiers. Ce concept s’articule autour de 7 grands thèmes :
- la gouvernance de l’organisation ;
- les droits de l’Homme ;
- les relations et conditions de travail ;
- l’environnement ;
- la loyauté des pratiques ;
- les enjeux liés aux clients / consommateurs ;
- l’implication dans les territoires (développement local).
Entreprises concernées. Actuellement, cette démarche n’est pas une obligation pour les entreprises. Toutefois, elle est ouverte aux entreprises de toutes tailles, de toutes formes et de tous secteurs d’activité.
Norme ISO 26000. Ainsi, les entreprises qui souhaitent prouver leur engagement écoresponsable (et donc, gagner en attractivité) peuvent se servir de la norme ISO 26000. Il s’agit, sur cette base, d’obtenir « un label » qui atteste de la mise en œuvre des normes internationales en matière de RSE. Il existe plusieurs labels, délivrés, par exemple, par l’Afnor ou encore Ecocert.
RSE : un exemple, des outils
Entreprise à mission. Les entreprises soucieuses d’agir en ce sens peuvent, par exemple, inscrire dans leurs statuts « la raison d’être » de l’entreprise, les objectifs sociaux et environnementaux qu’elles se donnent pour mission de poursuivre dans le cadre de leurs activités et les modalités de contrôle de cet engagement. On appelle ce type de structure des « sociétés à mission ». Si vous souhaitez plus d’informations sur ce sujet, vous pouvez consulter notre fiche dédiée.
Des outils. Si vous souhaitez obtenir de l’aide dans votre démarche RSE, vous pouvez vous connecter sur la plateforme RSE ou vous rapprocher de votre CCI.
A retenir
La RSE consiste, pour les entreprises, à mesurer l’impact de leur activité sur une échelle sociale et environnementale. L’idée est de développer son activité en considération du développement durable et des droits humains. Bien qu’il s’agisse, pour la plupart des entreprises, d’une démarche volontaire, la RSE constitue aujourd’hui un critère de compétitivité, de valorisation et d’attractivité de l’entreprise.
- Communication de la commission au parlement européen, au conseil, au comité économique et social européen et au comité des régions - Responsabilité sociale des entreprises : une nouvelle stratégie de l'UE pour la période 2011-2014
- La responsabilité sociétale des entreprises, du ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires
- Articles L225-102-1 et R225-105 du code de commerce (reporting extra-financier)
- Article L229-25 du code environnement
- Loi n° 2017-399 du 27 mars 2017 relative au devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d'ordre (devoir de vigilance)
- Loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises (loi PACTE – société à mission)
- Loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021 (art. 244 – bilan carbone)
- Loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets (loi climat – CSE et environnement)
