C’est l’histoire d’une filiale qui estime qu’avant d’être punie, sa mère doit être avertie…
Une société, filiale d’un groupe de sociétés fiscalement intégré, fait l’objet d’un contrôle fiscal à l’issue duquel l’administration lui réclame un supplément de TVA, qu’elle refuse de payer : pour elle, la procédure est irrégulière…
Elle rappelle que l’administration aurait dû informer la société mère des conséquences financières du contrôle fiscal avant toute mise en recouvrement de cette TVA supplémentaire. Ce qu’elle n’a pas fait ici, constate la filiale… Ce qu’elle n’avait pas à faire, conteste à son tour l’administration : cette obligation n’est applicable qu’en cas de redressement d’impôt sur les sociétés (IS) ou de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), mais pas en cas de rappels de TVA.
Ce que confirme le juge, qui rappelle que cette obligation d’information préalable ne vise que l’IS et la CVAE, pour lesquels la société mère est le redevable légal unique. La TVA, elle, reste due par chaque société membre du groupe. La procédure est bel et bien régulière ici.
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C’est l’histoire d’un employeur et d’un salarié « remplaçant » qui prétend remplacer définitivement un salarié « remplacé » …
Un salarié est embauché en CDD pour remplacer un salarié absent pour maladie, le temps de son absence. Il apprend, près de 2 ans plus tard, que le salarié qu’il remplace a été licencié en réalité peu de temps après son arrivée. De quoi voir sa situation évoluer, selon lui…
Faute d’avoir été informé en temps utile du licenciement du salarié qu’il remplace, son CDD de remplacement est arrivé de facto à son terme. Et parce que ce CDD s’est poursuivi après son terme, il se transforme automatiquement en CDI, selon lui… Ce que conteste l’employeur : le seul fait d’avoir tardé à prévenir le salarié remplaçant du licenciement du salarié remplacé ne doit pas avoir pour conséquence la requalification du CDD en CDI…
« Si ! », tranche le juge en faveur du salarié : le licenciement d’un salarié remplacé est de nature à mettre un terme au CDD de remplacement ; et parce qu’il n’a pas informé le remplaçant, tout en continuant la relation de travail, le CDD doit bel et bien être requalifié en CDI ici !
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C’est l’histoire d’une société qui aurait dû tourner la page du « papier » et passer au numérique…
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Licenciement économique : pour quels motifs ?
Licenciée pour motif économique, une salariée vous consulte : son employeur n’a pas réussi à prouver la baisse du chiffre d’affaires selon les critères légaux.
Il n’a, en effet, fourni que des données semestrielles, alors que la loi mentionne une analyse trimestrielle.
Pourtant, l’entreprise affirme que d’autres éléments – forte baisse du résultat d’exploitation, recul de l’activité, abandon de loyers par le bailleur – suffisent à démontrer ses difficultés économiques, même s'ils ont été fournis sur le semestre.
La salariée veut savoir : l’employeur peut-il malgré tout justifier son licenciement économique ?
La bonne réponse est... oui
Même si l’employeur ne parvient pas à prouver une baisse du chiffre d’affaires selon les critères légaux, le juge peut s’appuyer sur d’autres éléments économiques fournis pour établir des difficultés réelles, sérieuses et durables.
Une baisse importante du résultat d’exploitation ou d’autres indicateurs financiers peuvent ainsi suffire à justifier un licenciement économique.
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C’est l’histoire d’une société qui aurait dû tourner la page du « papier » et passer au numérique…
Un associé consulte le compte fiscal en ligne de sa société et découvre, à sa grande surprise, des avis d’imposition de cotisation foncière des entreprises (CFE) datant de plus de 2 ans. Une erreur, puisque son activité est exonérée de CFE, estime la société qui décide de déposer une réclamation fiscale…
« Trop tard ! », lui oppose l’administration fiscale : pour contester cette taxe, la société aurait dû agir avant le 31 décembre de l’année qui suit celle au cours de laquelle les avis d’impôt lui ont été notifiés. Sauf qu’elle n’a jamais reçu ces avis, conteste la société : selon elle, son délai de réclamation court à compter de la date où elle a pris connaissance de cette taxe ; sa réclamation n’est donc pas tardive…
« Faux ! », tranche le juge : la mise à disposition d’un avis d’impôt de CFE sur un compte fiscal en ligne vaut notification régulière, de sorte que le délai de réclamation commence à courir à compter de cette date. La réclamation, bien tardive ici, doit être rejetée !
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C’est l’histoire d’un voyageur qui a un goût pour ce qui brille… tout comme la douane…
Après un voyage en Suisse, un particulier se présente à la douane française à son retour et déclare avoir fait l’acquisition d’une montre de luxe de grande valeur. Une déclaration qui interroge la douane, qui fait le lien avec des activités illégales…
Pour l’administration, parce qu’elle a été achetée avec l’argent issu de ces activités, ramener cette montre en France constitue un délit de blanchiment douanier : elle rappelle, en effet, que toute importation en France visant à réaliser une opération financière à partir de fonds mal acquis est répréhensible en ces termes. « Toute importation ? », se questionne le voyageur selon qui l’administration omet un point important : ce sont les importations de fonds qui sont visées ici. Les biens, comme les montres, ne sont pas concernés par ce délit…
Ce que confirment les juges : le délit de blanchiment douanier ne peut porter que sur des fonds et non des biens. Ce motif de poursuite n’étant pas adapté ici, l’administration doit revoir sa copie.
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C’est l’histoire d’un dirigeant qui estime qu’un club de sport est un lieu de travail comme les autres…
À l’occasion du contrôle fiscal d’une entreprise qui gère une activité de location meublée, l’administration se penche sur des factures payées par l’entreprise relatives à des abonnements à un club de sport au nom du dirigeant et de son conjoint. Des dépenses d’ordre « personnel » non déductibles, estime l’administration...
Des dépenses « personnelles » en apparence, mais en réalité « professionnelles », conteste le dirigeant : ils ne pratiquent en réalité aucun sport au sein du club, ces frais leur permettent juste de bénéficier des installations équipées du club pour prospecter la clientèle et entretenir leur réseau d’affaires. Sauf qu’en l’absence de contrats ou de devis mentionnant les noms des potentiels clients rencontrés au club, rien ne justifie le lien entre ces dépenses et l'activité de l’entreprise, maintient l’administration…
Ce qui, en l’absence de preuves, confirme l’apparence de dépenses d’ordre purement personnel, constate aussi le juge… qui valide le redressement fiscal !
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Refus d’expulsion : indemnisation possible ?
Titre exécutoire et concours de la force publique : comment ça marche ?
Pour rappel, un titre exécutoire est un document juridique qui permet à son titulaire d’exiger de son débiteur l’exécution de son obligation, comme une décision de justice par exemple. Cela peut être une obligation de payer une dette, de réparer ou de restituer un bien ou, dans le cas présent, de quitter un logement ou un local.
La personne titulaire d’un tel titre peut ainsi demander le concours de la force publique pour en obtenir l’application, comme en présence d’un occupant d’un logement qui refuse de partir et contre lequel une décision d’expulsion est prise.
Très concrètement, lorsqu’un juge rend une décision d’expulsion d’un locataire, le propriétaire peut demander au commissaire de justice (anciennement huissier de justice) de solliciter le préfet pour obtenir le concours de la force publique afin que les lieux soient libérés.
Dans ce cas, le préfet a un délai de 2 mois pour répondre, sachant que le défaut de réponse vaut refus.
Pour autant, la loi prévoit que l'État est tenu de prêter son concours à l’exécution des titres exécutoires, faute de quoi il peut être redevable d’une indemnisation.
La loi du 27 juillet 2023 visant à protéger les logements contre l'occupation illicite, dite « loi anti-squat », avait prévu que les modalités d'évaluation de la réparation due au propriétaire en cas de refus du concours de la force publique devaient être précisées par le Gouvernement.
C’est à présent chose faite.
Expulsion et refus du concours de la force publique : quelle indemnisation ?
Lorsque les conditions d’expulsion sont remplies mais que l’État a refusé de prêter son concours ou n’a pas répondu à la demande dans les 2 mois, sa responsabilité peut être engagée à compter de la date du refus ou, en l’absence de réponse, à l’expiration des 2 mois qui suivent la demande du propriétaire bénéficiaire de la décision d’expulsion.
Pour ce faire, le propriétaire doit envoyer au préfet sa demande d’indemnisation avec tous les éléments qui permettent de prouver et de chiffrer les préjudices. Attention, seuls les préjudices ayant un lien direct et certain avec la décision de refus du préfet peuvent être indemnisés.
Cette demande doit faire l'objet d'un accusé de réception précisant les mentions listées ici (date, références du dossier, informations sur le service en charge du dossier, etc.).
Il revient alors au préfet de statuer sur la responsabilité de l’État et, par conséquent, sur la demande d’indemnisation.
Dans l ’hypothèse où la responsabilité de l’État est engagée, le préfet propose un montant d’indemnisation au propriétaire au regard des pièces fournies et, le cas échéant, des justificatifs complémentaires envoyés.
L'indemnisation fait alors l'objet d'une transaction, c’est-à-dire d’un écrit aux termes duquel l’État et le propriétaire acceptent des concessions réciproques afin de mettre fin à une contestation potentielle. Ainsi, le propriétaire, en acceptant la transaction, s’engage à :
- renoncer à tout recours ;
- à rembourser l'État de toute somme qu'il aurait perçue, ou percevra, de la part de l'occupant expulsé ou d'organismes tiers.
En cas de refus d’indemnisation ou d’absence de réponse pendant 2 mois de la part du préfet, le propriétaire pourra se tourner vers le juge pour examen de sa demande.
La responsabilité de l’État, en cas de refus du préfet du concours de la force publique, prend fin lorsque :
- le préfet accorde ultérieurement le concours de la force publique ou à la date de sa mise en œuvre effective lorsqu’elle intervient plus de 15 jours après sa décision, sauf exception ;
- les occupants quittent volontairement les locaux, la date prise en compte étant celle de la constatation de leur départ ;
- le propriétaire bénéficiaire de la décision de justice renonce à poursuivre l'expulsion ;
- le bien immobilier est vendu (dans ce cas c’est la date de signature de l'acte de vente qui est prise en compte) ;
- l'occupant décède.
Très concrètement, sont réparables :
- la perte des loyers et des charges locatives récupérables sur l'occupant ;
- la perte de la valeur vénale du bien liée à une vente désavantageuse ;
- les frais liés à l'impossibilité de vendre le bien ;
- les frais de remise en état ;
- les frais de commissaire de justice ;
- la taxe d'enlèvement des ordures ménagères ;
- le trouble dans les conditions d'existence.
Concernant la perte de loyer, l’indemnité se calcule par rapport à la valeur locative des locaux, par référence au contrat de bail. Ne sont en revanche pas pris en compte le supplément de loyer ou de frais qui n’est pas la conséquence directe et certaine du refus d'octroi du concours de la force publique.
En l'absence de contrat de bail ou s'il apparaît que le loyer prévu par celui-ci ne correspond pas à la valeur locative réelle du bien, le propriétaire pourra établir par tout moyen le montant de l’indemnité.
Attention : lorsqu’un recours a eu pour conséquence de remettre en cause le titre exécutoire du propriétaire (par exemple en faisant appel de la décision du juge), il n’y a pas de préjudice indemnisable par l’État même en cas de refus du préfet du concours de la force publique.
De même, en cas de délai de grâce accordé par le juge ou de période de trêve hivernale, un tel refus n’engage pas la responsabilité de l’État pendant ce délai ou cette période.
Enfin, si un organisme d'HLM conclut avec l'occupant un protocole d'accord de prévention de l'expulsion, qui permet d’éviter l’expulsion de l’occupant sous conditions, la responsabilité de l'État est suspendue pendant la durée de ce protocole.
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C’est l’histoire d’un employeur, d’une nouvelle affectation et d’un refus du salarié…
Embauché par une agence de nettoyage, un salarié se voit affecter vers un nouveau lieu de travail, ce qu’il refuse : pour lui, le lieu de travail est un élément essentiel de son contrat de travail qui ne peut pas être modifié sans son accord…
Or, son contrat mentionne son lieu de travail initial, qui est donc un élément essentiel ne pouvant être modifié sans son accord… Ce que réfute l’employeur : le lieu de travail apparaît dans le contrat puisque cette mention est obligatoire, mais elle n’est qu’indicative et n’a pas vocation à « contractualiser » le lieu de travail. Ainsi, le refus du salarié de changer de lieu de travail est une faute puisque ce changement n’a pas à être impérativement accepté par le salarié…
Ce que valide le juge, qui donne raison à l’employeur : pour que le lieu de travail soit considéré comme un élément essentiel du contrat, il faut qu’une mention le précise, faute de quoi il n’est mentionné qu’à titre indicatif et peut être modifié sans l’accord du salarié.
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Action contre son concubin : une (im)possibilité d’agir ?
Concubinage paisible = impossibilité morale d’agir ?
Pour rappel, la prescription extinctive est, comme son nom l’indique, un mode d’extinction d’un droit qui résulte de l’inaction de son titulaire pendant un certain délai, qui varie en fonction des sujets.
De même, il existe des hypothèses où la prescription est suspendue, notamment :
- entre époux pendant leur mariage ou entre partenaire pendant leur pacte civil de solidarité (PACS) ;
- en cas d’empêchement résultant de la loi, de la convention ou de la force majeure.
Qu’en est-il pour les concubins ? C’est la question à laquelle le juge a dû répondre dans un cas récent.
Un couple en concubinage achète leur résidence principale ensemble. Le concubin décède et laisse sa fille pour unique héritière.
La concubine et l’héritière se retrouve ainsi en indivision, notamment sur la résidence du couple. À l’occasion des opérations de partage, la concubine demande à l’héritière une indemnité correspondant au coût d'acquisition de la résidence principale qu’elle a financé seule avec son argent personnel.
Ce que refuse l’héritière, estimant que cette demande est prescrite, la résidence ayant été acquise il y a près de 10 ans.
« Faux ! », conteste la concubine selon qui la prescription était, tout le temps de son concubinage, suspendue, comme le prévoit la loi : selon elle, en présence d’un concubinage stable et durable, la concubine était, justement, dans l’impossibilité morale d’agir contre son compagnon.
Ce qui ne convainc pas le juge qui rappelle le principe : la prescription est suspendue par la loi, la convention ou la force majeure. Or, ici, la suspension du fait de la loi ou d’une convention ne trouve pas à s’appliquer. Quant à la force majeur, le concubinage ne remplit pas les conditions d’imprévisibilité, d’irrésistibilité et d’extériorité qui caractérisent la force majeure.
En conclusion, faute d’avoir agi dans les temps, la concubine ne peut pas obtenir d’indemnité.
