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Artisans : sous-traitance, qui est responsable ?

Date de mise à jour : 26/04/2023 Date de vérification le : 26/04/2023 15 minutes

Lorsqu’une entreprise intervient en situation de sous-traitance sur un chantier, elle est liée par contrat avec l’entrepreneur principal. Mais il ne faut pas occulter la relation avec le maître d’ouvrage. Lorsqu’un litige survient, qui est responsable ?

Rédigé par l'équipe WebLex.
Artisans : sous-traitance, qui est responsable ?

Sous-traitance : la responsabilité du maître d’ouvrage

Un donneur d’ordres… Le maître d’ouvrage donne des ordres à l’entrepreneur principal et non au sous-traitant qui est un tiers à son égard. Il n’a donc pas de pouvoir de direction sur lui.

… passif ? Mais en pratique, le maître d’ouvrage va déléguer son pouvoir de direction au maître d’œuvre, professionnel de la construction, ce qui le rend passif, une fois que l’opération de construction est commencée. Sur le banc de touche une fois la construction de la maison commencée, le maître d’ouvrage a une responsabilité assez limitée à l’égard des intervenants sur le chantier.

Un comportement fautif. Si un dommage est causé par une faute qui lui est imputable en raison de son comportement, il engage sa responsabilité. Mais ce sont essentiellement les autres intervenants qui engagent leurs responsabilités à son égard.

Obligation de vigilance du maître d’ouvrage. Il est tenu d’une obligation de vigilance dans le cadre de la lutte contre le travail dissimulé et l’emploi de ressortissants étrangers sans titre de travail. À ce titre, il doit se faire remettre une attestation de vigilance par l’organisme de recouvrement dont dépend l’entrepreneur principal (pour tout contrat d’un montant minimum de 5 000 € HT).

Le saviez-vous ?

Un locataire peut être considéré comme maître d’ouvrage si par son comportement, il a pu laisser croire aux entreprises intervenantes sur le chantier qu’il avait cette qualité. C’est ce qui est arrivé à un locataire qui a :

  • accepté les devis ;
  • approuvé les plans ;
  • assisté aux réunions de chantier ;
  • dirigé les travaux.

Pour la petite histoire. Une société, maître d’ouvrage, a été condamnée pénalement à la suite d’un accident survenu sur un chantier mettant en cause un salarié d’un sous-traitant. Condamnée à indemniser la victime, la société a demandé à l’entrepreneur principal de venir en garantie : une clause contractuelle prévoyait, en effet, que l’entrepreneur principal supporterait les conséquences pécuniaires des accidents corporels survenus sur le chantier à l’occasion de l’exécution des travaux. Ce que refuse l’entrepreneur principal : la société étant pénalement responsable, il estime que la clause de garantie ne peut pas être appliquée. Mais, selon le juge, la clause de garantie invoquée par la société reste valable, même si la société a été condamnée pénalement. L’entrepreneur principal doit donc assumer les conséquences pécuniaires de l’accident corporel survenu sur le chantier.


Sous-traitance : la responsabilité de l’entrepreneur principal

Une responsabilité contractuelle… Lié par contrat d’entreprise avec le maître d’ouvrage, l’entrepreneur principal engage sa responsabilité s’il manque à ses obligations contractuelles. Il est également responsable à l’égard du maître d’ouvrage en cas de dommage causé par le sous-traitant (il peut se retourner contre ce dernier pour qu’il y ait un partage de responsabilité et des indemnités).

Pour la petite histoire. Il a été jugé que l’entrepreneur principal qui a confié des travaux de charpente à un sous-traitant est responsable des malfaçons commises par ce dernier à l’égard du maître de l'ouvrage, et ce même s’il n’avait pas lui-même commis de faute.

Le saviez-vous ?

Pour que la responsabilité de l’entrepreneur principal soit engagée, il faut que le désordre lui soit imputable. Ainsi, si un désordre déjà présent sur la structure, est à l’origine d’un nouveau désordre dû à des travaux de réfection, l’entrepreneur principal ne doit réparer que le préjudice qui lui est imputable, c’est-à-dire le nouveau désordre.

… et contractuelle. Il doit également respecter le contrat signé avec le sous-traitant. Il doit respecter les obligations que la loi lui impose en matière de contrat de sous-traitance : acceptation du sous-traitant par le maître d’ouvrage, agrément de ses conditions de paiement, etc.

Une relation indépendante. Comme le sous-traitant n’est pas son salarié et qu’ils sont dans un rapport d’indépendance, l’entrepreneur principal n’est pas responsable à l’égard des tiers des dommages causés par son sous-traitant.

Quelle prescription ? Suite à la réception des travaux, l’entrepreneur principal engage sa responsabilité au regard des garanties légales qui se prescrivent par 10 ans (la garantie décennale recouvrant les dommages touchant le gros œuvre ou qui rendent l’ouvrage impropre à sa destination) et 2 ans (la garantie biennale recouvrant les dommages empêchant le bon fonctionnement de l’ouvrage). Ces garanties légales visent à protéger le maître d’ouvrage des désordres cachés qui apparaissent après la réception des travaux. Pour les dommages causés avant la réception des travaux, il engage sa responsabilité de droit commun (réglementation qui s’applique en l’absence de règles spécifiques) prescrite par 5 ans.

Le saviez-vous ?

Parmi ses obligations, l’entrepreneur principal a une obligation de vigilance : pour tout contrat portant sur un montant d’au moins 5 000 € HT, il doit s’assurer que le sous-traitant respecte ses obligations en matière sociale au moyen d’une attestation établie par l’URSSAF que ce dernier doit lui remettre.


Sous-traitance : la responsabilité du sous-traitant

À l’égard de l’entrepreneur principal. Lié par contrat, le sous-traitant doit respecter les obligations qui s’imposent à lui en vertu de ce dernier. Il est tenu à une obligation de renseignement et est responsable en cas d’inexécution du contrat ou de retard dans la livraison.

Recours de l’entrepreneur contre le sous-traitant. Un entrepreneur a vu sa responsabilité engagée vis-à-vis du maître d’ouvrage et a dû effectuer des travaux de réparation. Mais les désordres réparés concernaient le ravalement de la construction, prestation effectuée par le sous-traitant. L’entrepreneur a donc pu se retourner en garantie contre le sous-traitant qui était tenu à son égard d’une obligation de « résultat ».

Exonération de responsabilité. Les seules possibilités d’exonération de responsabilité du sous-traitant sont le cas fortuit et la force majeure. Notez que si l'empêchement est temporaire, le contrat est simplement suspendu (sauf si le retard justifie la résolution du contrat). Si l’empêchement est définitif, le contrat est résolu de plein droit. Toutefois, cette exonération est limitée parce que le sous-traitant doit à l’entrepreneur principal une obligation de résultat.

Le saviez-vous ?

L’absence d’un sous-traitant lors d’une expertise réalisée entre le maître d’ouvrage et l’entrepreneur principal ne l’exonère pas de sa responsabilité contractuelle, à l’égard de l’entrepreneur principal, parce qu’il est tenu par son obligation de résultat.

A l’égard du maître d’ouvrage. Ils sont des tiers dans leur rapport. Le sous-traitant engage donc sa responsabilité délictuelle. Il s’oblige donc à réparer le dommage causé à une personne avec laquelle il n’est pas lié contractuellement si des désordres constatés sur la maison construite proviennent de son fait. Ces désordres doivent avoir indissociablement concouru à la réalisation du dommage constaté.

Le saviez-vous ?

Dans le cadre d’un marché public de travaux, le sous-traitant engage également sa responsabilité vis-à-vis de la collectivité publique, maître d’ouvrage.

Les droits du sous-traitant. Le sous-traitant possède un droit à l’action directe contre le maître d’ouvrage si la garantie apportée par l’entrepreneur principal n’est pas une caution. Il peut également rechercher la responsabilité du maître d’ouvrage s’il manque à ses obligations de diligence, notamment en ce qui concerne les garanties légales que l’entrepreneur principal doit lui apporter lors de la signature du contrat de sous-traitance (caution ou délégation de paiement).

Prescriptions. Il est tenu au délai des responsabilités légales évoquées ci-dessus. Attention : lorsque l’action concerne un dommage antérieur à la réception, le délai de prescription est de 5 ans. Le point de départ de la prescription est la date de réception des travaux par le maître d’ouvrage auprès de l’entrepreneur principal et non la fin des travaux du sous-traitant sur le chantier.


Les cas de responsabilités plus spécifiques

Autres entreprises sous-traitantes. À l’égard des autres constructeurs intervenant sur le chantier, le sous-traitant est un tiers. C’est donc sa responsabilité délictuelle qui est engagée en cas de dommages causés à un autre sous-traitant.

Prescription. Le délai de prescription de l’action en responsabilité est celui de droit commun, c’est-à-dire de 5 ans à compter du jour où la victime a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.

Le maître d’œuvre. Il n’est pas lié par contrat avec les entreprises intervenant sur le chantier mais il doit bien sûr travailler en harmonie avec elles pour que la construction se déroule dans de bonnes conditions. Ils engagent leurs responsabilités délictuelles dans leurs rapports, lorsqu’un dommage survient et qu’il est imputable soit au sous-traitant, soit au maître d’œuvre. Le maître d’œuvre, en revanche, est responsable de ses obligations contractuelles au titre du contrat qui le lie avec le maître d’ouvrage.

A retenir

La sous-traitance se caractérise par des rapports différents entre le maître d’ouvrage, l’entrepreneur principal et le sous-traitant qui varient selon les relations en jeu. La question de la responsabilité se pose essentiellement pour l’entrepreneur principal et le sous-traitant vis-à-vis du maître d’ouvrage, acteur passif de l’opération de construction.
 

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Sources
  • Article 1218 du Code Civil
  • Articles 1240 et 1241 du Code Civil
  • Article 1245 et suivants du Code Civil
  • Articles 1792 et suivants du Code Civil
  • Loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance
  • Décret n° 2015-364 du 30 mars 2015 relatif à la lutte contre les fraudes au détachement de travailleurs et à la lutte contre le travail illégal
  • Arrêt de la Cour de cassation, 3e chambre civile, du 20 février 2002, n° 00-15591 (responsabilité contractuelle du sous-traitant à l’égard de l’entrepreneur principal)
  • Arrêt de la Cour de cassation, 3e chambre civile, du 4 janvier 2006, n° 04-18455 (sous-traitant-obligation de renseignement)
  • Arrêt de la Cour de cassation, 3e chambre civile, du 21 mai 2008, n° 07-13769 (troubles anormaux du voisinage-responsabilité du sous-traitant)
  • Arrêt de la Cour de cassation, 3e chambre civile, du 8 septembre 2009, n° 08-12273 (entrepreneur non-responsable à l’égard des tiers d’une faute du sous-traitant-indépendance dans leurs relations)
  • Arrêt de la Cour de cassation, 3e chambre civile, du 23 septembre 2009, n° 07-21634 (dommages causés par le sous-traitant)
  • Arrêt de la Cour de cassation, 3e chambre civile, du 12 juin 2013, n° (11-12283) (responsabilité étendue de l’entrepreneur principal à l’égard du maître de l’ouvrage)
  • Arrêt de la Cour de cassation, 3e chambre civile, du 20 mai 2015, n° 14-13271 (imputation des désordres-responsabilité de l’entrepreneur principal exonérée)
  • Arrêt de la Cour de cassation, 3e chambre civile, du 10 novembre 2016, n° 15-23658 (sous-traitant-pas d’action directe en paiement si les conditions de paiement n’ont pas été agréées)
  • Arrêt du Conseil d’Etat, du 7 décembre 2015, n° 380419 (maître d’ouvrage public-responsabilité du sous-traitant)
  • Arrêt de la Cour de cassation, 3e chambre civile, du 2 février 2017, n° 15-29420 (recours en garantie de l’entrepreneur contre le sous-traitant)
  • Arrêt de la Cour de cassation, 3e chambre civile, du 23 mars 2017, n° 15-23683 (locataire-maître d’ouvrage apparent)
  • Arrêt de la Cour de cassation, 3e chambre civile, du 14 décembre 2017, n° 16-26111 (clause de garantie-conséquences pécuniaires d’un accident corporel sur le chantier)
  • Arrêt de la Cour de cassation, 3e chambre civile, du 25 janvier 2018, n° 17-11482 (obligation de résultat à l’égard du donneur d’ordre)
  • Arrêt de la Cour de cassation, 3e chambre civile, du 29 mars 2018, n° 17-14736 (obligation de résultat même si l’artisan est absent lors d’une expertise)
  • Arrêt de la Cour de cassation, 3e chambre civile, du 25 juin 2020, n° 19-15929 (la faute du sous-traitant engage la responsabilité contractuelle de l’entrepreneur principal à l’égard du maître de l'ouvrage)
  • Arrêt de la Cour de cassation, 3e chambre civile, du 13 avril 2023, no 21-24985 (l'entrepreneur n'est pas responsable, à l'égard du maître de l'ouvrage, des dommages causés par les prestataires qu'il fait intervenir à l'occasion de l'exécution de son contrat et avec qui il n'est pas dans une relation de sous-traitance)
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