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Professionnels du bâtiment et marché privé : la protection de la rémunération du sous-traitant

Date de mise à jour : 20/07/2023 Date de vérification le : 20/07/2023 11 minutes

En raison de la particularité du contrat de sous-traitance, le professionnel du bâtiment qui intervient en tant que sous-traitant bénéficie d’une protection spécifique. Retour sur le contenu de cette protection et sa mise en œuvre…

Rédigé par l'équipe WebLex.
Professionnels du bâtiment et marché privé : la protection de la rémunération du sous-traitant

Les mesures de protection de la rémunération

Une « garantie » de paiement. Créancier de l’entrepreneur principal, le sous-traitant bénéficie d’une garantie en cas de défaillance de ce dernier afin de protéger sa rémunération.

2 types de garantie. L’entrepreneur principal doit pouvoir vous offrir des garanties :

  • soit il vous fournit une caution personnelle et solidaire qui doit être obtenue auprès d’un établissement bancaire agréé ;
  • soit il donne au maître de l’ouvrage une délégation de paiement.

Attention. Dès la conclusion du contrat de sous-traitance, la garantie doit être livrée et effective. Si la caution ou la délégation de paiement est fournie après la conclusion du contrat, le contrat est nul. Notez que le maître d’ouvrage doit, s’il ne bénéficie pas de la délégation de paiement, exiger de l’entrepreneur principal la justification de la fourniture de la caution lors de la conclusion du contrat ; à défaut, il engage sa propre responsabilité.

À noter. En l’absence de garantie de paiement fournie par l’entrepreneur principal, l’artisan sous-traitant pourra obtenir l’annulation du contrat de sous-traitance et une indemnisation dans l’hypothèse où il aurait exécuté des travaux.

En tout état de cause, si le contrat de sous-traitance est annulé alors que des travaux ont été exécutés, l’entrepreneur principal doit au sous-traitant le montant des travaux réellement exécutés, à l’exclusion de ceux qu’il a effectués pour reprendre les malfaçons dont il est l’auteur.


Les actions à mener pour protéger sa rémunération

En l’absence de paiement. Si l’entrepreneur principal ne vous paie pas, vous avez alors la possibilité d’engager une action directe contre le maître de l’ouvrage et obtenir le paiement de votre prestation. Mais cela suppose que la sous-traitance ait été acceptée par ce dernier et qu’il ait agréé les conditions de paiement.

Concrètement. L’entrepreneur principal doit vous « présenter » au maître d’ouvrage, idéalement au début du chantier, encore que ce ne soit pas une obligation puisqu’il est admis que le maître d’ouvrage puisse vous « accepter » à tout moment (même lorsque vous engagez, le cas échéant, une action directe pour obtenir le paiement de votre prestation). Il revient alors au maître d’ouvrage d’accepter et d’agréer la sous-traitance, soit expressément, soit tacitement. Il peut aussi la refuser, sous réserve de motiver son refus.

Une « présentation » à ne pas négliger ! N’avoir été ni accepté par le maître d’ouvrage, ni agréé dans les conditions de paiement fait perdre le droit à l’action directe en paiement. Ce qui peut coûter très cher ! Une entreprise de travaux n’a ainsi pas pu recouvrer 157 000 € de factures impayées. L’entreprise a pourtant tenté de prouver que le maître d’ouvrage avait connaissance de sa présence sur le chantier en produisant un document rédigé de la main d’un ancien salarié du maître d’ouvrage (responsable des travaux), aux termes duquel, ce dernier atteste avoir connaissance de sa présence sur le chantier. Mais cette attestation ne suffit pas, comme l’a rappelé le juge dans cette affaire en donnant raison au maître d’ouvrage.

Présence sur le chantier. Un artisan qui n’intervient pas physiquement sur un chantier peut tout à fait avoir la qualité de sous-traitant.

Le saviez-vous ?

Notez que le maître d’ouvrage qui refuse un sous-traitant ne commet pas de faute en le laissant malgré tout travailler sur le chantier (il n’est pas tenu de faire exclure du chantier le personnel du sous-traitant).

Attention. Si les modalités d’acceptation et d’agrément par le maître d’ouvrage ne sont pas respectées, la sous-traitance est dite « irrégulière » : le sous-traitant dispose d’une faculté de retrait et peut réclamer réparation du préjudice éventuel. Il doit pouvoir obtenir paiement des travaux réalisés (ce qui implique qu’il reste tout de même tenu de livrer les travaux pour lesquels il a obtenu ou réclame un paiement), l’entrepreneur principal ne pouvant pas se retrancher derrière le défaut d’acception pour refuser de payer.

Bon à savoir. Si le maître d’ouvrage a connaissance d’une sous-traitance sur le chantier qui n’a pas fait l’objet d’une acceptation et d’un agrément, il doit mettre en demeure (par lettre recommandée avec AR) l’entrepreneur principal de s’acquitter de ces obligations.

Attention ! Si ce dernier ne le fait pas, il s’expose à devoir indemniser le sous-traitant qui subirait un éventuel préjudice : ce dernier conserve donc malgré tout une possibilité de se retourner contre le maître d’ouvrage, notamment en cas de défaillance de l’entreprise principale et bien que privé de l’action directe faute d’acceptation et d’agrément.

Engager une action directe. L’action directe ne peut être engagée contre le maître d’ouvrage qu’après une mise en demeure de l’entrepreneur principal de payer les sommes dues (restée infructueuse durant 1 mois). Le sous-traitant doit adresser une copie de la mise en demeure au maître d’ouvrage. Il revient alors à ce dernier de payer les sommes dues à l’entrepreneur principal au moment de la réception de la copie de la mise en demeure : le sous-traitant ne peut réclamer que le prix des travaux déjà exécutés.

Le saviez-vous ?

Le cas échéant, la caution de l’entrepreneur principale qui a payé le sous-traitant et qui est « subrogée » dans les droits de ce dernier peut engager l’action directe en paiement.

À noter. S’il y a plusieurs sous-traitants qui exercent concurremment une action directe, les sommes payées sont réparties entre eux, proportionnellement au montant de leurs créances.

À noter (bis). Les éventuels intérêts de retard ne sont pas à la charge du maître d’ouvrage : ils sont dus par l’entrepreneur principal s’ils ont pour cause sa carence dans l’exécution de l’opération de travaux.

Le saviez-vous ?

L’action directe subsiste même si l’entrepreneur principal se trouve en liquidation de biens de règlement judiciaire ou en état de suspension provisoire des poursuites.

À noter. À défaut de mise en demeure avant la liquidation judiciaire de l'entrepreneur principal, le sous-traitant doit déclarer sa créance au passif de cette liquidation s’il souhaite que son action directe contre le maître de l’ouvrage soit recevable, cette déclaration de créance valant mise en demeure.

À retenir

Dans le cadre de la sous-traitance d’un marché privé, le sous-traitant bénéficie d’une protection de sa rémunération qui peut prendre la forme d’une caution personnelle ou d’une délégation de paiement.
 

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Sources
  • Loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance
  • Loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte (article 18)
  • Arrêt de la Cour de Cassation, 3e chambre civile, du 12 mai 1999, n° 97-13106 (succession de sous-traitants-présentation par l’entrepreneur principal au maître de l’ouvrage)
  • Arrêt de la Cour de Cassation, 3e chambre civile, du 9 juillet 2003, n° 02-10644 (obligation d’ordre public-pas de renonciation)
  • Arrêt de la Cour de Cassation, 3e chambre civile, du 20 octobre 2004, n° 03-11507 (responsabilité du maître de l’ouvrage avant le paiement intégral de l’entrepreneur principal)
  • Arrêt de la Cour de Cassation, 3e chambre civile, du 21 janvier 2015, n° 13-18316 (absence de présentation)
  • Arrêt de la Cour de Cassation, 3e chambre civile, du 18 février 2015, n° 14-10604 (caution tardive et absence de diligence du maître de l’ouvrage)
  • Arrêt de la Cour de cassation, 3e chambre civile, du 10 novembre 2016, n° 15-23658 (sous-traitant-pas d’action directe en paiement si les conditions de paiement n’ont pas été agréées)
  • Arrêt de la Cour de cassation, 3ème chambre civile, du 18 mai 2017, n° 16-10719 (caution de l’entrepreneur principale-action directe en paiement)
  • Arrêt de la Cour de cassation, 3e chambre civile, du 30 novembre 2017, n° 16-25312 (sous-traitant dont la présence sur le chantier n’était pas connu du maître d’ouvrage)
  • Arrêt de la Cour de cassation, 3e chambre civile, du 25 janvier 2018, n° 16-24738 (sous-traitant refusé par un maître d’ouvrage)
  • Arrêt de la Cour de cassation, 3e chambre civile, du 28 février 2018, n° 16-26682 (sous-traitant absent du chantier)
  • Arrêt de la Cour de cassation, 3e chambre civile, du 21 juin 2018, n° 17-23909 (absence de garantie de paiement-nullité du contrat)
  • Arrêt de la Cour de cassation, 3e chambre civile, du 21 janvier 2021, n° 19-22219 (garantie de paiement fournie après la signature du contrat de sous-traitance-nullité du contrat)
  • Arrêt de la Cour de cassation, 3e chambre civile, du 8 juin 2023, no 22-13330 (l’annulation du contrat de sous-traitance emporte le paiement du coût réel des travaux réalisés au sous-traitant, à l’exclusion de ceux qu’il a effectués pour reprendre les malfaçons dont il est l’auteur)
  • Arrêt de la Cour de cassation, 3e chambre civile, du 13 juillet 2023, no 21-23747 (à défaut de mise en demeure avant la liquidation judiciaire de l'entrepreneur principal, le sous-traitant doit déclarer sa créance au passif de cette liquidation s’il souhaite que son action directe contre le maître de l’ouvrage soit recevable, cette déclaration de créance valant mise en demeure)
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