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Conclure des contrats avant la création de la société : attention aux formalités !

Date de mise à jour : 21/10/2022 Date de vérification le : 12/12/2023 14 minutes

Vous êtes engagé dans une démarche de création d’une société, et pour les besoins de votre nouvelle activité, vous allez devoir signer des contrats et prendre divers engagements : ouvrir un compte bancaire pour la société, signer un contrat de bail, etc. Problème : votre société n’est pas encore créée. Comment faire ?

Rédigé par l'équipe WebLex.
Conclure des contrats avant la création de la société : attention aux formalités !

Actes passés pour le compte de la société en formation : une nécessité

Le chat qui se mord la queue ? Pour les besoins de votre future activité, votre société va devoir détenir un compte bancaire. Pour ouvrir un compte bancaire, votre société doit avoir une existence légale, c’est-à-dire être effectivement créée et immatriculée. Mais pour finaliser l’immatriculation définitive de votre société, vous devez avoir déposé les fonds représentant l’apport des associés sur un compte bancaire… ouvert à son nom. Comment faire ?

Prendre des engagements avant d’avoir créé la société ? La même difficulté peut se rencontrer lorsqu’il s’agira de conclure un emprunt bancaire, de conclure un bail commercial, voire de prendre des engagements avec des fournisseurs ou des clients, avant même que la société ne soit créée. Le développement commercial ne se fait pas toujours au rythme des formalités administratives, mais faut-il pour autant attendre que toutes les formalités administratives de création de la société soient effectuées pour démarrer votre activité ?

Oui, c’est possible. Heureusement, une formalité permet de pallier ses difficultés pour autant que vous en respectiez toutes les conditions : il sera possible de faire reprendre, par la société, à son compte, les différents actes que vous aurez conclus avant son immatriculation définitive.


Actes passés pour le compte de la société en formation : une reprise possible

Le problème. La règle est, en pratique, la suivante : une société ne sera dotée de la personnalité morale (c’est-à-dire qu’elle aura une existence propre la dotant d’une capacité à agir sur le plan juridique) que lorsqu’elle sera immatriculée au registre du commerce et des sociétés (RCS) : tant qu’elle n’est pas immatriculée, une société n’a pas la capacité de contracter. Si elle conclut un acte avant cette date d’immatriculation, l’acte est nul. Pour qu’il soit valable, il va falloir remplir certaines conditions.

La solution. Il faut prendre l’engagement ou conclure le contrat pour le compte de la société et faire reprendre, par la suite, ce contrat ou cet engagement par la société, une fois celle-ci définitivement constituée. Si toutes les conditions requises pour cette reprise sont réunies, l’acte ou le contrat sera réputé conclu dès l’origine par la société elle-même ; si ce n’est pas le cas, l’acte restera à votre charge.

Attention aux conditions ! Il est impératif que vous informiez votre co-contractant que vous n’agissez pas pour votre compte personnel, mais bien pour le compte de votre future société, pour qu’il sache avec précision avec qui le contrat est conclu. C’est pourquoi il est absolument nécessaire d’apposer, sur le contrat, la formule « Monsieur ou Madame… agissant au nom et pour le compte de la société en formation, dénommée…».

Attention aux conséquences ! Si cette mention ne figure pas dans l’acte, le contrat ne pourra pas être repris par la société et restera à la charge de celui qui l’a souscrit. C’est ce qui est arrivé à un dirigeant qui avait ouvert un compte bancaire « à titre provisoire en attendant la création de la société » et qui s’est retrouvé condamné à devoir régler à la banque le solde débiteur du compte bancaire.

Voire même… L’acte peut également être annulé au motif qu’il a été conclu par une société n’ayant pas d’existence légale, à défaut d’être immatriculée et donc d’être dépourvue de la « capacité juridique » à signer un acte ou un contrat.

Pour la petite histoire... Une société en cours de formation conclut une promesse de vente avec un tiers. Parce que le contrat n'est finalement jamais conclu du fait de cette personne, la société décide de réclamer une indemnisation. Sauf que la promesse n'a pas été conclue par le mandataire agissant pour le compte de la SCI... mais par la société elle-même. Elle n'est donc pas valable et l'indemnisation réclamée n'est pas due.

Le saviez-vous ?

À titre d’exemple, un bailleur a ainsi pu obtenir l’annulation d’un contrat de location conclu par une société à une date antérieure à celle de son immatriculation : le contrat avait été conclu par la société elle-même, et non pas « au nom et pour le compte de la société en formation », comme cela aurait dû être fait.


Actes passés pour le compte de la société en formation : des formalités à respecter

3 possibilités. Pour que la reprise de l’acte par la société soit régulière, et vous libère des engagements correspondants, il faut formaliser l’opération. Vous disposez, à cet effet, de 3 procédures distinctes pour formaliser la reprise des actes passés pour le compte de votre société en formation. Passons-les en revue.

La formalité la plus couramment utilisée. Il suffit d’annexer à vos statuts, déposés au greffe du Tribunal, un état indiquant la nature des actes accomplis « au nom et pour le compte de la société en formation » avant la signature de ces statuts et détaillant les engagements qui en résultent. Dans cette hypothèse, la signature des statuts emporte automatiquement reprise des engagements concernés par la société.

Soyez suffisamment précis ! Un état qui indique simplement, par exemple, un « engagement de frais et honoraires de conseil et du coût des formalités (publicité, greffe) en vue de la constitution de la société » ne suffit pas à valider la reprise de l’acte, faute d’avoir nommément désigné le contrat conclu avec la société de conseil en question.

Faire valider l’acte par les associés. La deuxième solution suppose une décision des associés : ils pourront, en effet, prendre, après l’immatriculation de la société, une décision validant expressément la reprise des actes et engagements pris au nom et pour le compte de la société en formation (dans le cas d’une EURL, ne comptant qu’un associé unique, la reprise doit résulter d’un acte exprès de sa part reporté sur le registre des décisions).

Pour la petite histoire. Il a été jugé qu’une société ne pouvait valablement reprendre à son compte un acte passé avant son immatriculation par ses fondateurs si celui-ci ne mentionnait pas expressément avoir été en son nom ou pour son compte.

Mandater un associé ou un dirigeant. Une troisième possibilité, moins courante, consiste à donner mandat (dans les statuts ou par acte séparé) à un associé ou à plusieurs d’entre eux les autorisant à prendre des engagements pour le compte de la société. Dans ce cas, l’immatriculation de la société validera la reprise des engagements par la société. Mais attention : cette possibilité ne vaut que pour les actes conclus entre la signature des statuts et l’immatriculation de la société ; et cela suppose que les modalités des engagements soient précisées dans le mandat (un mandat général et indéterminé sera inopérant).

Pour la petite histoire. Un couple signe un devis pour la construction d’une maison, puis crée une société civile immobilière (SCI), dont madame devient la gérante. Elle demande ensuite, au nom de la SCI, une indemnisation au constructeur après avoir constaté des malfaçons sur la maison. Demande irrecevable selon le juge, qui précise qu’aucune formalité requise n’a été faites pour prouver la reprise, par la SCI, des engagements pris par la gérante avant son immatriculation.

Le saviez-vous ?

Seule l’une de ces 3 procédures emporte la reprise des actes antérieurs passés au nom de la société en cours de formation. Aucune autre procédure n’est possible ! Même la reprise implicite...Cependant, il a récemment été jugé que le fait qu’un bail commercial, signé par le fondateur d’une société en formation, précise que la société se substituerait à celui-ci une fois immatriculée, était suffisant pour que la reprise d’acte soit valable. Le fait que la société n’ait effectué aucune des 3 formalités normalement nécessaires est sans d’incidence, d’autant qu’elle s’était toujours comportée en locataire, notamment en réglant les loyers.

A retenir

Les différents contrats signés ou engagements pris pour le compte de votre future société, avant son immatriculation définitive, seront réputés pris par elle dès l’origine à la condition que vous ayez expressément pris ces divers engagements « au nom et pour le compte de la société en formation ». En outre, cette reprise devra être formalisée, soit dans les statuts, soit par une décision collective des associés.

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Sources
  • Article L 210-6 du Code de Commerce
  • Articles R 210-5 à R 210-7 du Code de Commerce
  • Arrêt de la Cour de Cassation, chambre commerciale, du 27 octobre 1980, n° 79-11232 (ouverture du compte bancaire en attente de la création d’une société)
  • Arrêt de la Cour de Cassation, chambre commerciale, du 13 juillet 2010, n° 09-68142 (défaut de précision dans l’état annexé aux statuts)
  • Arrêt de la Cour de Cassation, chambre commerciale, du 21 octobre 2014, n° 13-22428 (exemple nullité d’un acte conclu par une société en formation)
  • Arrêt de la Cour de Cassation, 3ème chambre civile, du 15 octobre 2015, n° 13-24355 (les 3 procédures légales sont les seules utilisables)
  • Arrêt de la Cour de cassation, chambre commerciale, du 13 septembre 2017, n° 15-26491 (contrat de location nul-absence de la mention « au nom et pour le compte de la société en formation »)
  • Arrêt de la Cour de cassation, chambre commerciale, du 20 février 2019, n° 17-14242 (pas de reprise implicite)
  • Arrêt de la Cour de cassation, chambre commerciale, du 15 janvier 2020, n° 17-28127 (reprise d’acte mentionnée au bail)
  • Arrêt de la Cour de cassation, chambre commerciale, du 10 juin 2020, n° 18-16441 (NP) (le contrat passé au nom d’une société en formation ne peut être repris valablement par elle s’il ne mentionne pas avoir été passé en son nom ou pour son compte)
  • Arrêt de la Cour de cassation, 3e chambre commerciale, du 16 septembre 2021, n° 20-17372 (reprise des actes signés avant immatriculation d’une SCI)
  • Arrêt de la Cour de cassation, 3e chambre civile, du 12 octobre 2022, no 21-19999 (nullité d'une promesse de vente signée par une SCI en cours de formation)
  • Arrêts de la Cour de cassation, chambre commerciale, du 29 novembre 2023, nos 22-18295 et 22-12865
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