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Transporteurs de marchandises : quelle est l’étendue de votre responsabilité ?

Date de mise à jour : 19/07/2023 Date de vérification le : 19/07/2023 25 minutes

Un de vos clients vous fait part d’une réclamation concernant l’état de la marchandise livrée. Un autre se plaint des délais de livraison et vous demande une indemnisation. Comment faire face à ces situations ? Quelle est l’étendue de votre responsabilité ?

Rédigé par l'équipe WebLex.
Transporteurs de marchandises : quelle est l’étendue de votre responsabilité ?

Une responsabilité découlant du contrat de commission de transport

Un principe. Le contrat de transport doit prévoir ses modalités d’exécution. Cela signifie qu’il doit mentionner les conditions d'enlèvement et de livraison de la marchandise (les délais, notamment), le prix de la prestation et les obligations respectives des parties.

Un modèle de contrat ? À défaut de stipulations particulières, vos relations commerciales seront soumises aux clauses d’un contrat type.

     =>  Vous pouvez consulter notre annexe : contrat type de commission de transport.

Pendant combien de temps ? Votre responsabilité peut, en principe, être engagée pendant un délai d’un an pour les actions concernant un retard, la perte de marchandises ou des avaries. Ce délai se décompte à partir de la date de livraison de la marchandise (ou de la date à laquelle elle devait être remise, en cas de perte totale). Il peut être interrompu en cas de reconnaissance non équivoque par le transporteur de son obligation d’indemniser son client (ce qui peut permettre au client d’agir en justice au-delà du délai d’un an). Le délai de recours est toutefois porté à 5 ans si vous vous rendez coupable de fraude ou d’infidélité (cas qui implique une volonté malveillante ou de déloyauté de votre part).

Délai de prescription : attention aux détails ! Le juge a récemment rappelé que le délai de prescription d’un an ne concerne que les seuls contrats ayant pour objet des prestations de transport de marchandises. Ainsi, l’entreprise sous-traitante qui n’a été mandatée que pour assurer la manutention d’un transformateur électrique ne peut se prévaloir de ce délai.

Le saviez-vous ?

Vous pouvez engager la responsabilité de votre client, si les marchandises transportées pour son compte ont causé des dommages à votre véhicule de transport. Dans ce cas, vous êtes également tenu d’agir dans le délai d’un an à compter de la date de livraison prévue au contrat, ou celle à laquelle la marchandise a pu être livrée.

Des formalités ? Pour bénéficier du délai d’un an pour agir en responsabilité, il faut que votre cocontractant mécontent accomplisse certaines formalités. Il s’agit ici de compléter la lettre de voiture au moment de la livraison de la marchandise. Une réception sans réserve de la marchandise vous exonère de toute responsabilité quant aux dommages qui ont pu être causés à la marchandise.

Un court délai. Le délai pour émettre ces réserves est de 3 jours, à la réception de la marchandise. Votre cocontractant doit vous faire part de sa contestation par LRAR ou exploit d’huissier. Le non-respect de ces formalités empêche toute action ultérieure contre vous.

Le saviez-vous ?

Vous disposez d’une action directe en paiement de vos prestations à l'encontre de l'expéditeur et du destinataire, lesquels sont garants du paiement du prix du transport. Toute clause contraire est réputée non écrite. Néanmoins, en cas de recours à la sous-traitance, vous ne pouvez pas bénéficier de cette action directe en paiement qui n’est ouverte qu’au professionnel qui a effectué personnellement la prestation (le sous-traitant en l’occurrence).


Une responsabilité résultant du retard de livraison

Une indemnisation. Par principe, tout retard préjudiciable dans l’exécution d’un contrat, s’il n’est pas justifié par un cas de force majeure, doit donner lieu à une indemnisation. En matière de transport de marchandises, ce principe est quelque peu adapté.

Une indemnisation limitée ? Le contrat type de commission de transport prévoit que tout retard occasionnant un préjudice donne lieu à indemnisation, celle-ci se limitant toutefois au prix de la prestation de transport (hors droits, taxes et frais divers).

Un complément d’indemnisation ? Si vous avez signé un contrat déterminant les modalités de son exécution, en fixant un délai ferme de livraison, ce délai s’impose à vous. Dès lors, tout retard occasionnant un préjudice donne lieu à réparation de l’entier préjudice subi par votre cocontractant.

Sauf… si vous justifiez d’un cas de force majeure ou si le contrat de commission de transport prévoit une clause limitative de responsabilité.

Pas d’indemnisation ? La clause qui exonère le transporteur de toute responsabilité pour retard est nulle.

Le saviez-vous ?

La clause limitative de responsabilité n’est pas valable en cas de faute inexcusable de votre part. C’est-à-dire si vous avez commis une faute délibérée (sans raison valable) avec la pleine conscience qu’il puisse en résulter un dommage pour votre client. Tel n’est pas le cas lorsque le chauffeur s’arrête après 13h de route dans un lieu régulièrement utilisé par les camions, où il pouvait dîner et stationner son camion.


Responsabilité du transporteur en cas de pertes ou d’avaries

Qu’est-ce que la perte ? La perte résulte de l’impossibilité de livrer la marchandise prise en charge. Elle est partielle lorsqu’une partie de la marchandise mentionnée dans le document de prise en charge est livrée à destination. Elle est totale lorsque vous êtes dans l’impossibilité matérielle de livrer le bien mentionné dans le document de prise en charge.

Qu’est-ce qu’une avarie ? Une avarie est un dommage causé à la marchandise entre son chargement et son déchargement du véhicule.

Quelle responsabilité ? Vous ne pouvez pas vous exonérer de cette responsabilité par une clause spécifique dans le contrat de commission de transport : il s’agit d’une obligation de résultat qui pèse sur vous. Cela signifie que la marchandise doit arriver conformément à ce qu’elle était d’après le document de prise en charge. Ce principe est toutefois atténué si le dommage résulte d’un vice inhérent à la marchandise.

Exemple. Malgré la livraison, la responsabilité d’un transporteur maritime a été retenue car il n’avait pas effectué la totalité de sa mission. Dans cette affaire, le transporteur devait également retirer les verrous unissant les conteneurs entre eux. Or, il en a laissé un, et c’est ce verrou oublié qui a causé la chute d’un des conteneurs dans la mer…

Le saviez-vous ?

Si votre donneur d’ordre participe au chargement du véhicule, il a alors la qualité d’expéditeur. Aussi, en cas de réserves émises par le destinataire, c’est lui-même qui pourra être mis en cause.

Client professionnel : quelle indemnisation ? L’indemnisation peut être plafonnée en application du contrat, lorsqu’il le prévoit. Par ailleurs, le contrat type fixe la réparation due par le transporteur à 20 € par kilogramme de poids brut de marchandise manquante ou avariée, sans pouvoir excéder une somme supérieure au produit du poids brut de la marchandise de l'envoi exprimé en tonnes multiplié par 5 000 €.

Mais… Il est possible de faire remplir une déclaration de valeur ou une déclaration d’intérêt spécial à la livraison. Dans ces cas, en cas de perte ou d’avarie, vous serez redevable d’une indemnité égale à la valeur déclarée. Ces options peuvent, bien entendu, donner lieu à un coût supplémentaire pour le donneur d’ordre.

Client particulier : quelle indemnisation ? L’indemnisation peut être plafonnée en application du contrat, lorsqu’il le prévoit. Toutefois, la clause qui a pour objet de supprimer ou de réduire le droit à réparation du client en cas de manquement du déménageur à ses obligations est abusive.

Perte ou vol de marchandises. En cas de perte ou de vol de marchandises, vous devez effectuer toutes les diligences nécessaires pour faire constater précisément l’existence et l’étendue des pertes.

Pour la petite histoire. Une société dont la marchandise a été volée a réclamé l’indemnisation totale de son préjudice, le transporteur n’ayant pas respecté le contrat. Ce dernier interdisait, en effet, le recours à la sous-traitance, ce qu’a pourtant fait le transporteur. Peine perdue, cependant, le juge rappelant que le seul fait de ne pas respecter l’interdiction de sous-traitance n’implique pas, en lui-même, la réalisation du vol.

Pour la petite histoire (bis). Une société dont la marchandise a été endommagée a également réclamée l’indemnisation totale de son préjudice, le transporteur ayant tenté de passer, sans succès, sous un pont trop petit pour le camion. Pour la société, il s’agissait là d’une faute délibérée du transporteur. À tort, pour le juge : le pont n’était pas aux normes départementales, ce qu’aucun panneau ne signalait.

Pour la petite histoire (ter). Une société de transport n’a pas pu faire valoir la clause limitative de responsabilité insérée dans un contrat à son client, suite au vol de sa marchandise (des téléviseurs). Le juge a, en effet, considéré que la société avait commis une faute inexcusable : le transporteur s’était garé, de nuit, sur un site isolé en pleine campagne, sans aucune surveillance effective. En outre, les téléviseurs se trouvaient dans une remorque non cadenassée, ce qui était en contradiction avec les instructions qui lui avaient été données.

Pour la petite histoire (quater). Un transporteur a été chargé de transporter par navire des palmiers, dont 9 sont arrivés morts, à destination. Sa responsabilité n’a pas été retenue par le juge car le transporteur n’avait pas reçu d’instruction particulière, de la société qui les avait achetés, pour les soins à apporter aux palmiers ; et un rapport d’expertise a révélé que c’est l’entreprise qui avait chargé les palmiers dans le navire qui était fautive.

Pour la petite histoire (quinquies). Un transporteur a vu sa responsabilité engagée, sans qu’il puisse se prévaloir de la clause limitative de responsabilité, suite au vol des photocopieurs transportés durant un week-end, car il avait commis une faute inexcusable (entrepôt non surveillé le week-end et attelage laissé portes ouvertes).

Pour la petite histoire (sexies). Un juge a considéré qu’un transporteur n’avait pas commis de faute inexcusable en obéissant à l’injonction de voleurs déguisés en policiers.

Pour la petite histoire (septies). Le compartiment frigorifique du véhicule d’un transporteur a connu des dysfonctionnements durant un voyage. Mais parce le véhicule possédait toutes les attestations de conformité sanitaire requises, le juge a considéré que la faute inexcusable du transporteur n’était pas caractérisée.

Pour la petite histoire (octies). Il a été jugé qu’un transporteur n’ayant pas sanglé les marchandises transportées, qui ont chuté pendant le transport, n’avait pas commis de faute inexcusable dans la mesure où il ne lui avait été donné aucune instruction quant à l’arrimage des caisses. A défaut d’avoir eu conscience de la probabilité du dommage, il ne peut pas lui être reprochée une faute délibérée.

Pour la petite histoire (nonies A). Il a été jugé qu’un transporteur qui laisse une remorque de marchandises sur un parking sans surveillance après avoir désolidarisé la remorque du véhicule qui la tracte est responsable de son vol.

Pour la petite histoire (nonies B). Il a été jugé qu’un transporteur terrestre qui n’a pas émis de réserves à la réception de la marchandise peut toutefois s’exonérer de sa responsabilité s’il prouve que les pertes et avaries sont survenues pendant le transport maritime. Dans cette affaire, le transport de la marchandise s’est fait en 2 temps : transport maritime, puis transport terrestre. À la suite du constat de la disparition et de la casse d’une partie de la marchandise à la livraison finale, le transporteur maritime contestait l’engagement de sa responsabilité, en indiquant que le transporteur terrestre, qui était intervenu en dernier lieu, n’avait pas émis de réserves à la réception de la marchandise. Sauf, a retenu le juge, que les éléments de preuve apportés par le transporteur terrestre prouvent que les avaries sont arrivées pendant le transport maritime. Le transporteur maritime est donc seul responsable.

Pour la petite histoire (nonies C). Il a été jugé qu’un transporteur n’est pas tenu de rembourser l’intégralité d’une marchandise volée au moment de la livraison, lorsqu’il existe un contrat de transport entre elle est la société expéditrice plafonnant cette indemnité. Selon le juge, le remboursement intégral n’est dû que lorsque le transporteur a commis une faute délibérée entrainant le vol. Or, s’il n’a pas connaissance de la valeur et de l’importance de la marchandise, il ne peut savoir que des précautions particulières sont à prendre. Dans ces conditions, il ne peut donc pas avoir conscience de la probabilité du dommage.

À retenir

Lorsque vous êtes chargé de réaliser un transport de marchandises, vous êtes tenu d’une obligation de résultat dans la livraison, c’est-à-dire que vous devez livrer la chose, conformément à l’état dans lequel elle était lorsque vous l’avez prise en charge. Cela signifie que si le résultat n’est pas atteint, votre responsabilité peut être engagée. Néanmoins, les indemnisations auxquelles vous pouvez être tenu sont susceptibles d’être plafonnées, en fonction de ce que votre contrat prévoit. D’où l’intérêt de sécuriser vos contrats !
 

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