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Médecin : rappels utiles sur votre devoir d’information

Date de mise à jour : 16/12/2021 Date de vérification le : 11/09/2023 23 minutes

Un médecin est tenu d’informer son patient : à défaut, le professionnel de la santé peut voir sa responsabilité engagée. Toutefois, il existe certaines situations qui le dispensent de son devoir d’information. Voici ce que vous devez savoir…

Rédigé par l'équipe WebLex. En collaboration avec Hélène Folens, juriste spécialisée en droit de la santé
Médecin : rappels utiles sur votre devoir d’information


Médecin : les caractéristiques de l’information que vous devez délivrer

À qui est délivrée l’information ? Toute personne a le droit d'être informée sur son état de santé. Cela signifie que l’information doit être délivrée au patient à sa demande. Toutefois, il existe quelques exceptions.

1ère exception. La 1ère exception concerne les mineurs : l’information est, en effet, donnée au(x) titulaire(s) de l’autorité parentale, sauf dans le cas où le mineur s’oppose expressément à la consultation du ou des titulaires de l’autorité parentale, afin de garder le secret sur son état de santé, et que le médecin n’a pas su le convaincre de les en informer.

2nde exception. Elle concerne les personnes protégées : pour les majeurs sous tutelle, c’est le tuteur qui reçoit l’information médicale, pour les mineurs, il s’agit là encore des titulaire(s) de l’autorité parentale. Cependant, les mineurs ou les majeurs sous tutelle ont le droit de recevoir eux-mêmes une information et de participer à la prise de décision les concernant, d’une manière adaptée soit à leur degré de maturité s’agissant des mineurs, soit à leurs facultés de discernement s’agissant des majeurs sous tutelle.

Qualité de l’information. Le Code de déontologie médicale prévoit que « le médecin doit à la personne qu’il examine, qu’il soigne ou qu’il conseille, une information loyale, claire et appropriée sur son état, les investigations et les soins qu’il lui propose. Tout au long de la maladie, il tient compte de la personnalité du patient dans ses explications et veille à leur compréhension ».

L’information doit être loyale. Si le médecin doit informer le patient, ce dernier doit également lui répondre honnêtement, et ne doit pas lui cacher certains détails ou certaines affections antérieures, ce qui viendrait fausser l’information délivrée par le médecin. Il en va de même de la part du médecin, qui ne doit pas mentir à son patient concernant son état de santé ou les actions possibles concernant sa pathologie (sauf exceptions, voir ci-dessous).

L’information doit être claire. L’information donnée au patient doit être comprise par lui, et le médecin doit éviter d’employer des termes trop techniques, au risque que l’information ne soit pas totalement assimilée par le patient.

L’information doit être appropriée. L’information doit être modulée, adaptée, en fonction de la maladie et de son pronostic, du moment où l’information est délivrée (annonce d’un pronostic grave ou d’une rémission) et surtout du patient, de sa personnalité et de ses facultés (notamment concernant les mineurs, majeurs sous tutelle, patients atteints de troubles mentaux liés à l’âge, à la maladie, etc.).

Quand donner l’information quand un acte médical doit être réalisé ? L’information est délivrée à l’occasion d’un entretien individuel, préalable à chaque acte médical.

Contenu de l’information. La liste des éléments sur lesquels doit porter l’information est assez longue, et a vocation à couvrir tout risque, même exceptionnel, qui surviendrait pendant et/ou après l’intervention médicale choisie, ou en l’absence d’intervention :

  • l’information porte sur les différentes investigations, traitements ou actions de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu'ils comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les conséquences prévisibles en cas de refus ;
  • la personne est également informée de la possibilité de recevoir, lorsque son état de santé le permet, notamment lorsqu'elle relève de soins palliatifs, les soins sous forme ambulatoire ou à domicile ; il doit être tenu compte de la volonté de la personne de bénéficier de l'une de ces formes de prise en charge ;
  • lorsque, postérieurement à l'exécution des investigations, traitements ou actions de prévention, des risques nouveaux sont identifiés, la personne concernée doit en être informée, sauf en cas d'impossibilité de la retrouver ;
  • le patient doit être informé des risques qu’il court du fait de l’affection dont il souffre et de son évolution, dès lors qu’il s’agit de mettre tout en œuvre pour éviter leur réalisation, même si cette réalisation n’est pas fréquente ; ainsi, l’information doit porter sur les risques graves, y compris les risques graves exceptionnels ;
  • le patient doit être informé des risques connus, au jour de la réalisation de l’acte médical (et non pas au jour de la délivrance de l’information), mais également des risques nouvellement identifiés, après la réalisation de l’acte ; la teneur de l’information s’adapte donc en fonction des nouvelles données acquises de la science.

Le saviez-vous ?

Les juges ont précisé que l’information due au patient devait porter sur l’éventualité des risques que l’utilisation de ces nouvelles techniques pouvaient entraîner, mais pas sur les risques eux-mêmes, ces risques étant au jour de la réalisation de l’acte, inconnus.

Ainsi, le fait d'utiliser une technique innovante n'exonère pas le praticien de son obligation d'information : le médecin qui s'abstiendrait d'informer son patient sur l'éventualité de ces risques, verrait sa responsabilité engagée si un tel risque se réalisait et entraînait un préjudice pour le patient.

L’« information-conseil » de la part du médecin. La Loi précise que « toute personne prend avec le professionnel de santé et compte tenu des informations et des préconisations qu’il lui fournit, les décisions concernant sa santé ». Cela sous-entend que le médecin a un rôle actif dans la prise de décision du patient, qui consiste en un devoir de conseil envers le patient, devoir rappelé dans le Code de déontologie médicale.

Information sur les frais exposés. Le patient doit être informé des frais auxquels il pourrait être exposé à l’occasion d’activités de prévention, de diagnostic et de soins et, le cas échéant, sur les conditions de leur prise en charge et de dispense d’avance de frais. Cette information, qui est gratuite, doit :

  • être affichée dans les lieux de réception des patients, de façon visible et lisible (salle d’attente, salle de consultation, ou sites internet de communication au public pour les établissements de santé) ;
  • prendre la forme d’un écrit préalable, ou « note préalable d’information sur les honoraires », dès lors que, lorsqu'ils comportent un dépassement, les honoraires totaux des actes et prestations facturés lors de la consultation sont supérieurs ou égaux à 70 euros ;
  • prendre la forme d’un devis détaillé lorsque l’acte inclut la fourniture d’un dispositif médical sur mesure.

Le saviez-vous ?

Concernant les médecins libéraux exerçant en cabinet de ville, le Conseil national de l’Ordre des médecins précise que l’obligation d’affichage concerne les prestations suivantes lorsqu’elles sont effectivement proposées : la consultation, la visite à domicile, la majoration de nuit, la majoration de dimanche, les majorations pratiquées dans le cadre de la permanence des soins et au moins 5 des prestations les plus couramment pratiquées.

Le cas particulier de la chirurgie esthétique. Concernant les interventions de chirurgie esthétique, le chirurgien est soumis à une obligation d’information dite « renforcée », le patient devant être informé par le praticien responsable des conditions de l’intervention, des risques et des éventuelles conséquences et complications.

Un devis détaillé. Cette information est accompagnée de la remise d’un devis détaillé lorsque le patient le demande, et de manière obligatoire lorsque le montant estimé est supérieur ou égal à 300 € ou comportant une anesthésie générale. Un délai minimum de 15 jours doit être respecté entre la remise du devis, daté et signé, et l’intervention. Il ne peut en aucun cas être dérogé à ce délai.

Qui pratique la chirurgie ? Le médecin doit indiquer, le cas échéant, si c’est lui-même ou un autre praticien qui réalisera l’opération de chirurgie esthétique. Cette information doit être indiquée sur le devis remis au patient.


Médecin : les exceptions au devoir d’information

3 exceptions légales. La Loi prévoit 3 cas dans lesquels le médecin est dispensé de respecter le devoir d’information : l’urgence, l’impossibilité d’informer le patient et la volonté du patient d’être tenu dans l’ignorance.

L’urgence. Le cas d’urgence, notamment l’urgence vitale, dispense le médecin de son devoir d’information sur les soins qu’il va prodiguer au patient dans ce contexte. L’urgence constitue également une exception à recueillir le consentement du patient ou de ses représentants légaux (pour les mineurs ou les majeurs protégés).

L’impossibilité d’informer le patient. Il s’agit du patient qui est inconscient, ou dans le coma, et qui est hors d’état d’exprimer sa volonté. Dans ces cas, il est en effet impossibilité d’informer le patient.

Le saviez-vous ?

Cette exception au devoir d’information ne constitue pas une exception au recueil du consentement, qui doit être recherché auprès d’autres intervenants : lorsque la personne est hors d’état d’exprimer sa volonté, aucune intervention ou investigation ne peut être réalisée, sauf urgence ou impossibilité, sans que la personne de confiance, ou la famille, ou à défaut, un de ses proches ait été consulté.

Seule l’impossibilité d’informer la personne de confiance, la famille ou un proche peut délier le médecin de son obligation d’obtenir le consentement du patient (identité du patient non connue, absence de personne de confiance ou de famille, etc.).

La volonté du patient d’être tenu dans l’ignorance. La volonté d’une personne d’être tenue dans l’ignorance d’un diagnostic ou d’un pronostic doit être respectée, sauf lorsque des tiers sont exposés à un risque de contamination. Ce refus concerne notamment les diagnostics ou pronostics graves, voire fatals, que le patient ne souhaite pas connaître.

Attention ! Le médecin doit s’efforcer d’expliquer à son patient les conséquences d’un tel refus, et doit respecter ce choix s’il persiste. Il est alors recommandé au médecin de consigner ce refus d’information de la part du patient dans son dossier médical.

Conseil. Le Conseil national de l’Ordre des médecins préconise de faire consigner le souhait du patient de rester dans l’ignorance par écrit, sous la forme d’un document qu’il devra signer, ce qui peut lui signifier d’une autre manière la gravité de sa décision. Cependant, ce document ne décharge pas le médecin de sa responsabilité, mais prouve que le patient a bien été informé sur la situation.

Longue maladie. Si la maladie se prolonge dans le temps, le médecin doit s’assurer auprès du patient que celui-ci souhaite toujours être tenu dans l’ignorance sur son état de santé.

Pronostic fatal. Dans le cas de l’annonce d’un pronostic fatal, il est préférable que le patient en soit informé, afin qu’il puisse prendre les dispositions nécessaires. Cependant, s’il souhaite être tenu dans l’ignorance d’un tel pronostic, le médecin pourra prévenir les membres de la famille, un proche ou la personne de confiance, si le patient ne s’y est pas clairement opposé, afin qu’ils puissent le soutenir dans les derniers instants de sa maladie.

Exceptions au respect de la volonté du patient. Il existe 2 exceptions au respect de la volonté du patient :

  • en cas de risque vital, le médecin se doit d’agir en conscience pour tenter de sauver le patient : l’acte qu’il propose doit alors être indispensable à la survie du patient et proportionné à son état ;
  • lorsque des tiers sont exposés à un risque de contamination, le médecin doit tout de même informer le patient qui souhaite rester dans l’ignorance de la maladie, afin que ce dernier puisse informer ses proches, et éviter une éventuelle contamination.


L’engagement de responsabilité du médecin

Absence d’information = responsabilité du médecin. La responsabilité du médecin qui n’a pas délivré à son patient une information lui permettant de prendre une décision éclairée quant à son état de santé, peut-être engagée par ce dernier si ce défaut d’information a entraîné un préjudice.

La preuve de la délivrance de l’information. C’est au médecin qu’il appartient de prouver que l’information a bien été délivrée. La preuve de la délivrance de l’information peut être apportée par tout moyen.

Premier élément à prouver. Le médecin devra dans un premier temps prouver que l’entretien individuel au cours duquel il aura informé son patient a bien eu lieu. Pour autant, prouver que l’entretien a bien eu lieu n’est pas une preuve du contenu de l’information délivrée.

Preuve du contenu de l’information. Dans la meilleure hypothèse, le médecin aura une preuve écrite du contenu de l’information donnée. Mais parfois, il arrive que l’information soit délivrée par oral : dans cette situation, la preuve de la délivrance de l’information sera difficile.

Remettre une fiche d’information ? La remise d’un document au patient, sous forme de « fiche d’information » ou « document de consentement éclairé », facilite la preuve de la délivrance de l’information par le médecin, la contresignature de ce document par le patient pouvant aider à prouver que celui-ci a bien reçu l’information.

Fiche d’information = décharge de responsabilité ? Ce type de document n’exonère pas le médecin de sa responsabilité en matière d’information, surtout lorsqu’il s’agit d’un « document type » remis à tous les patients, sans que soit prise en compte leur situation médicale propre.

La sanction du défaut d’information. Un défaut d'information de la part du médecin, ou la délivrance d'une information incomplète, peut entraîner la mise en œuvre de la responsabilité civile du médecin.

Quelles sont les préjudices indemnisables ? Indépendamment de l’indemnisation du préjudice corporel qui peut découler de la réalisation d'un risque dont le patient n'avait pas été informé, certains préjudices découlant du défaut d'information peuvent également être indemnisés.

L'indemnisation de la perte de chance. Cette indemnisation est accordée lorsque le patient prouve que le défaut d'information ou l'information défaillante lui a fait perdre la chance d'échapper à un risque non connu qui s'est réalisé.

À noter. Il a été jugé que le patient non-informé des risques qu'il pouvait courir, du fait d'une intervention sans aucune autre alternative, ne pouvait pas prétendre à une indemnisation pour perte de chance dans le cas où le risque dont il n'avait pas été informé se serait tout de même réalisé. Le juge a estimé que, même informé du risque, le patient aurait forcément accepté l'intervention, car c'était sa seule chance d'être soigné. De ce fait, le patient ne justifie d'aucun préjudice indemnisable au titre de la perte de chance, et n’a donc pas à être indemnisé.

L'indemnisation du préjudice moral d'impréparation. La troisième indemnité à laquelle un patient peut prétendre est l’indemnisation d’un préjudice moral d’impréparation.

À retenir

Un médecin est tenu de délivrer une information claire, loyale et appropriée à son patient, sauf dans 3 situations (urgence, impossibilité d’informer le patient et volonté du patient d’être tenu dans l’ignorance). S’il manque à son devoir d’information, le médecin peut voir sa responsabilité engagée et indemniser, le cas échéant, son patient pour le préjudice subi.
 

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