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Conseils pratiques pour la gestion de mon activité

Changer d’activité : attention aux conséquences fiscales !

Date de mise à jour : 22/06/2021 Date de vérification le : 22/06/2021 9 minutes

Contraint de vous adapter à l’environnement économique, vous pouvez être amené à faire évoluer les activités de votre société : filialiser, transférer, abandonner une activité, voire tout bonnement changer d’activité. Ces différentes situations peuvent avoir des conséquences fiscales qu’il est essentiel d’anticiper : lesquelles ?

Rédigé par l'équipe WebLex.
Changer d’activité : attention aux conséquences fiscales !


Changement d’activité : les conséquences d’une « cessation d’entreprise » ?

Un changement d’activité « réelle »… Lorsqu’une société change d’objet social ou d’activité réelle, le principe veut que ce changement entraîne toutes les conséquences d’une cessation d’entreprise, sur le plan fiscal. Concrètement, comment gérer cette situation ?

Des conséquences à connaître ! Un changement d’activité entraînera les conséquences suivantes :

  • imposition immédiate des résultats de l’exercice en cours ;
  • imposition immédiate des bénéfices en sursis d’imposition (sont notamment visées les provisions qu’il faudra réintégrer dans le résultat imposable) ;
  • imposition immédiate des profits latents sur stocks et des plus-values latentes, ce qui pourra être le cas par exemple en présence d’un fonds de commerce qui n’est pas valorisé à l’actif du bilan de l’entreprise.

A noter. Un changement d’activité n’entraîne pas pour autant un changement de régime fiscal. C’est ce qu’a rappelé le juge à propos d’une EURL qui avait opté à l’IS et qui a changé d’activité : ce changement d’activité, s’il entraîne certaines conséquences fiscales, n’a toutefois pas d’incidences sur l’option à l’IS de l’EURL. En d’autres termes, le changement d’activité n’a pas pour effet de mettre fin à l’existence de la société, ni, par voie de conséquences, à son option IS.

La question des déficits. Le sort des éventuels déficits subis par la société antérieurement au changement d’objet ou d’activité sera traité différemment selon que la société relève de l’impôt sur le revenu ou est soumise à l’IS.

Pour les sociétés relevant de l’IR. Les conséquences seront neutres, dans la mesure où ces déficits antérieurs ont été
« transmis » aux associés, du fait des modalités particulières d’imposition du résultat fiscal dans ces sociétés. Il faut, en effet, rappeler qu’une société de ce type ne paie pas directement d’impôt sur les bénéfices : ce sont les associés qui sont soumis à l’impôt sur le revenu à raison de la quote-part des bénéfices ou des déficits qui leur revient (au prorata de leur participation dans le capital de la société). Quant à l’éventuel déficit constaté au moment du changement d’activité, qui emporte fiscalement cessation d’entreprise, il sera de la même manière transmis aux associés.

Pour les sociétés soumises à l’IS. La question n’appelle pas la même réponse ici. La société reste « propriétaire » de ces déficits, qui sont alors reportables et imputables sur les bénéfices ultérieurs de la société. Mais pour que ce report déficitaire puisse s’appliquer, encore faut-il qu’il y ait « identité d’entreprise » : les textes subordonnent, en effet, le report des déficits à la condition que la société n’ait pas subi, dans son activité, des transformations telles qu’elle n’est en réalité plus la même. Un important changement d’activité bloquera le report des déficits. Autrement dit, le report des déficits antérieurs est perdu !

Exemple. Une société qui exploite 7 fonds de commerce fait évoluer son activité : elle créée 6 filiales ayant pour objet d’assurer la gestion de 6 de ses fonds, tout en se réservant l’exploitation du 7ème. Quelques années plus tard, elle ferme le fonds exploité par elle et se concentre sur son activité de holding. Avant cette opération, la société était déficitaire et a placé ses déficits en report pour les imputer sur ses bénéfices ultérieurs.

Mais. Pour que ces déficits soient effectivement reportables, la règlementation impose que la société ne subisse pas un changement important d’activité. Or, c’est justement ce que lui reproche l’administration, qui refuse donc qu’elle reporte ses déficits. Sauf que le déficit en cause est né au cours d’un exercice au titre duquel l’activité de holding de la société était déjà prépondérante, rappelle le juge. La fermeture du fonds de commerce n’étant pas constitutif d’un changement important d’activité, la société conserve son droit au report des déficits.

Le saviez-vous ?

Les juges ont précisé que la perte du droit au report des déficits empêche de reporter les déficits antérieurs, même s’il s’agit de les imputer sur des profits comptabilisés après le changement d’activité, mais provenant de l’ancienne activité.

Une astuce. Si vous constatez un déficit au moment du changement d’activité, une astuce consiste à opter pour le « carry-back », qui permet de reporter le déficit subi sur le bénéfice de l’exercice précédent. Ce report donne lieu à une créance fiscale qui pourra être remboursée dans les 5 ans.


Changement d’activité : des conséquences atténuées…

Un tableau noirci ? Evidemment, présenter comme cela, on a tout intérêt à réfléchir à deux fois avant de changer ou de faire évoluer l’activité d’une société. Cela étant, il existe des moyens d’atténuer ces conséquences, d’autant qu’elles ne sont susceptibles de s’appliquer qu’en cas de changement d’activité qualifié de « profond ».

Quelle est l’ampleur du changement ? La première question qu’il convient d’analyser, si possible avec votre conseil, tant ces situations peuvent être sources de litiges avec l’administration fiscale, concerne l’ampleur du changement. Pour qu’il emporte cessation d’entreprise, il faut que le changement d’activité fasse que votre société n’est effectivement plus la même.

Quelques principes à ce sujet… Sont, de prime abord, visés les changements radicaux d’objet social ou changements profonds d’activité réelle. De même, un changement d’activité sera aussi caractérisé en cas d’adjonction d’une activité ou en cas de retrait d’une activité qui entraîne une augmentation ou une diminution (selon les cas) de plus de 50 %, soit du chiffre d’affaires, soit de l’effectif moyen de l’entreprise, soit du montant brut des éléments de l’actif immobilisé de la société (augmentation appréciée au titre de l’exercice de l’adjonction de cette nouvelle activité ou de son retrait, ou de l’exercice suivant).

Mais aussi… Sachez qu’il pourra en être de même en cas de « disparition des moyens de production nécessaires à la poursuite de l'exploitation pendant une durée de plus de 12 mois » sauf en cas de force majeure (comme la survenance d’un événement climatique par exemple), ou lorsque l'interruption et la reprise d'activité sont justifiées par des motivations principales autres que fiscales (dans ce cas, il faudra obtenir tout de même obtenir un agrément ministériel préalable pour éviter les conséquences fiscales d’une cessation d’entreprise).Les « moyens de production nécessaires à la poursuite de l’exploitation » s’entendent notamment du fonds de commerce, des biens et matériels, des stocks, des moyens humains, etc. sans lesquels l’activité ne pourrait pas être exploitée par l’entreprise.

Le saviez-vous ?

L’administration admet que, pour une société holding, les titres qu’elle détient ne constituent pas, en tant que tel, des moyens de production. Leur vente ne pourra donc pas être qualifiée de « disparition de moyens de
production ».

Attention tout de même aux hypothèses dans lesquelles la vente des titres a pour conséquence un changement réelle d’activité ou une diminution importante de son activité (application du seuil de 50 % précité).

Exemples de changements « profonds ». C’est ainsi que le juge de l’impôt a considéré, par exemple, que les changements d’activité suivants emportaient cessation d’activité :

  • filialisation d’une activité par une société qui devient, de ce fait, une société holding ;
  • adjonction d’une activité de commercialisation à une activité initiale de simple prise de participation dans d’autres sociétés, de telle sorte que la nouvelle activité, par son ampleur, a entraîné un changement radical d’activité ;
  • passage d’une activité de production à une activité de commercialisation ;
  • transfert de l’exploitation d’un fonds de commerce à une filiale, pour ne gérer ensuite qu’une activité de location immobilière et de matériels ;
  • passage d’une activité d’achat-revente à une activité de prestataire d’un service commercial.

Inversement… Il a été admis qu’une mise en location-gérance d’une activité, qu'un simple recentrage d’activité à l’intérieur d’un même métier, etc. ne caractérisent pas un changement profond d’activité, susceptible d’emporter les conséquences fiscales d’une cessation d‘activité. Il en est de même, en principe, en cas d’interruption temporaire d’une activité (sauf en cas de disparition des moyens de production nécessaires à la poursuite de l’exploitation pendant une durée de plus de 12 mois, hors cas de force majeure).

Et si un changement profond est caractérisé ? Si vous êtes dans cette situation, sachez que vous pouvez éviter certaines des conséquences fiscales précitées. Notamment, vous pourrez éviter l’imposition des bénéfices en sursis d’imposition et des profits latents sur stocks ou sur immobilisation aux conditions cumulatives suivantes :

  • aucune modification n’est apportée aux écritures comptables ;
  • l’imposition des bénéfices et des plus-values demeure possible malgré le changement d’activité.

En pratique. Ces deux conditions sont, en règle générale, remplies en présence d’un changement d’activité. Mais il n’en demeure pas moins que, même si les conditions précitées sont remplies, vous devrez malgré tout tenir compte des deux conséquences suivantes :

  • vos résultats seront immédiatement imposés à la date du changement d’activité ;
  • et vous perdez le droit au report de vos déficits antérieurs, si votre société est soumise à l’IS (pensez alors, le cas échéant, à opter pour le report en arrière de ce déficit si c’est possible).

A retenir

Un changement d’activité entraînera « cessation d’entreprise », au plan fiscal, ce qui suppose : imposition immédiate des bénéfices de l’exercice en cours, imposition des profits latents et des bénéfices en sursis d’imposition, et, pour les sociétés soumises à l’IS, perte du droit au report des déficits antérieurs. Des atténuations conditionnelles de ces conséquences sont toutefois prévues.

En présence d’une restructuration importante de votre société, en cas de modification substantielle de votre exploitation et de votre activité, pensez « conséquences fiscales d’un changement d’activité », idéalement avec votre conseil.


J'ai entendu dire

En cas de changement d’activité, doit-on payer des droits d’enregistrement ?

En présence d’un changement d’activité, il n’y a pas à proprement parler de création d’une société nouvelle, même si on évoque, sur le plan de la règlementation fiscale, la notion de cessation d’entreprise. Dans ce cas, seul le droit fixe de 125 € est exigible.
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Sources
  • Articles 202 ter, 221-5 et 221 bis du Code Général des Impôts (conséquence fiscale d’un changement d’activité)
  • BOFiP-Impôts-BOI-BIC-CESS10-20-30
  • BOFiP-Impôts-BOI-IS-CESS-10
  • Article 680 du Code Général des Impôts (droit fixe de 125 €)
  • Arrêt de la Cour de Cassation, chambre commerciale, du 7 mars 1984, n° 82-12432 (absence de création d’une personne morale nouvelle)
  • Arrêt du Conseil d’Etat du 8 février 1991, n° 75459 (passage d’une activité de production à une activité de commercialisation)
  • Arrêt du Conseil d’Etat du 10 juillet 2007, n° 288484 (adjonction d’une activité de commercialisation à une activité de holding)
  • Arrêt du Conseil d’Etat du 30 juin 2010, n° 308531 (filialisation d’une activité)
  • Arrêt du Conseil d’Etat du 4 février 2013, n° 349169 (transfert d’un fonds de commerce puis exercice d’une activité de location)
  • Arrêt du Conseil d’Etat du 11 juin 2014, n° 362284 (passage d’une activité d’achat-revente à une activité de prestataire d’un service commercial)
  • Arrêt du Conseil d’Etat du 11 juin 2014, n° 347355 (le changement d’activité d’une EURL n’entraîne pas un changement de régime fiscal)
  • Arrêt du Conseil d’Etat du 26 juillet 2018, n°404078 (fermeture de fonds de commerce puis exercice d’une activité de holding = pas de perte du droit au report des déficits)
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