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Dirigeant : le point sur votre rémunération

Date de mise à jour : 17/06/2021 Date de vérification le : 17/06/2021 10 minutes

S’il est un sujet sensible, c’est bien celui qui intéresse la rémunération des dirigeants de société. Et cette question est d’autant plus sensible pour les entreprises soumises à l’impôt sur les sociétés : elle emporte en effet des conséquences tant au regard de l’IS pour la société que de l'IR, de l’ISF (avant le 31 décembre 2017) et de l’IFI (depuis le 1er janvier 2018) pour vous. Pourquoi ?

Rédigé par l'équipe WebLex.
Dirigeant : le point sur votre rémunération


Rémunération des dirigeants : le risque d’une rémunération « excessive »

Une rémunération normalement déductible. Par principe, les sommes correspondant aux rémunérations figurent normalement parmi les charges de l’entreprise : ces charges seront déductibles du résultat imposable de la société pour le calcul de son impôt sur les sociétés (IS). Mais cette déduction n’est pas sans limites…

Sauf si… Une rémunération sera déductible sur le plan fiscal si elle n’est pas excessive. Si cette condition est rarement remise en cause pour les salariés de la société, elle est en revanche régulièrement contrôlée en ce qui concerne les dirigeants.

Une double conséquence. Si l’administration fiscale estime que votre rémunération perçue en qualité de dirigeant est excessive, elle pourra :

  • refuser la déduction fiscale de la somme correspondante, ce qui aura pour effet de majorer le montant de l’IS dû par l’entreprise ;
  • considérer que la fraction jugée excessive de cette rémunération est un revenu réputé distribué, imposé entre vos mains à l’impôt sur le revenu sans le bénéfice de la fiscalité appliquée aux rémunérations (sans tenir compte de la déduction pour frais professionnels) : ce revenu réputé distribué sera, en outre, majoré de 25 % pour le calcul de l’impôt sur le revenu.

Le saviez-vous ?

Cette question est sans incidence pour les entreprises relevant de l’impôt sur le revenu : rappelons, en effet, que ces entreprises n’acquittent pas leur propre impôt (le résultat est imposé entre les mains du chef d’entreprise ou des associés dans le cas d’une société) et que les rémunérations des dirigeants/associés ne sont pas déductibles de ce résultat imposable.

Une rémunération… Pour apprécier le niveau de rémunération, l’administration devra s’attacher à vérifier si elle excède la rétribution normale du travail fourni dans le cadre de vos fonctions de direction : il faut prendre en compte la rémunération directe et les avantages directs et indirects, du type indemnités diverses, avantages en nature, remboursements de frais, etc.

… excessive ? Le « niveau » d’une rémunération dépendra des circonstances de fait en fonction des profils des entreprises et des dirigeants concernés : l’administration devra ainsi tenir compte de votre qualification professionnelle, de votre activité effectivement exercée dans la société, du montant de votre rémunération par rapport au chiffre d’affaires et au résultat de l’entreprise, etc. Elle pourra aussi vérifier, par une étude comparative, le niveau des rémunérations perçues par des dirigeants occupant les mêmes fonctions que vous dans des entreprises similaires.

Attention ! L’appréciation du caractère excessif d’une rémunération peut aller assez loin. Un gérant d’EURL, ayant pour activité la location de locaux commerciaux, a doublé sa rémunération au titre d’un exercice notamment en raison de la perception de produits exceptionnels par son entreprise liés à la vente de locaux loués. L’administration a refusé la déduction fiscale d’une fraction de cette rémunération, considérant qu’elle était excessive au regard du niveau de chiffre d’affaires et du résultat de l’EURL, sans tenir compte de ces produits exceptionnels. Et le juge de l’impôt lui a donné raison : il a même considéré que « la vente d’immeubles ne pouvait qu’obérer le chiffre d’affaires de l’entreprise provenant de son activité de location d’immeubles à usage industriel et commercial ».


Rémunération des dirigeants : le risque d’une rémunération « anormale » avant le 31 décembre 2017

A titre personnel. Si votre patrimoine net (après déduction des dettes) excède 1,3 M€, vous êtes normalement soumis à l’ISF. Pour déterminer ce patrimoine imposable, il faut tenir compte de l’ensemble de vos biens immobiliers (maisons, appartements, etc.) et mobiliers (véhicules, etc.), de vos actifs financiers, etc. La valeur des titres de votre société n’est normalement pas soumise à l’ISF car il s’agit de « biens professionnels », normalement exonérés de cet impôt. Sous réserve que des conditions soient respectées…

Une condition pour échapper à l’ISF. Dans le cadre des sociétés soumises à l’IS, l’une des conditions requises pour bénéficier de l’exonération au titre des biens professionnels suppose que vous exerciez une fonction de direction donnant lieu à une rémunération normale représentant plus de la moitié de vos revenus professionnels. Cette condition s’apprécie au 1er janvier de l’année d’imposition (au 1er janvier 2015 pour l’ISF 2015, au 1er janvier 2016 pour l’ISF 2016, etc.).

Attention ! Si l’administration considère que la rémunération perçue au titre de votre fonction de dirigeant est « anormale », vos titres ne seront pas qualifiés de biens professionnels. Conséquence : leur valeur sera soumise à l’ISF, ce qui peut être particulièrement dommageable !

Une rémunération « normale »... Votre rémunération sera considérée comme normale si son montant est en rapport avec la rémunération courante des personnes exerçant pleinement leur fonction de direction, compte tenu de la nature, de l’importance de l’activité et des résultats de l’entreprise. Une rémunération très insuffisante ne sera, par exemple, pas considérée comme normale.

… pour votre fonction de dirigeant. Par principe, la normalité de votre rémunération, au regard de l’ISF, s’apprécie au regard de votre seule fonction de dirigeant. L’administration admet, à cet égard, de tenir compte de la rémunération attachée aux autres fonctions que vous pourriez exercer dans la société pour apprécier cette condition de rémunération normale. Mais encore faut-il toutefois que votre fonction de dirigeant soit effectivement rémunérée malgré tout (les juges ont ainsi estimé que cette condition n’est pas remplie si le dirigeant n’est pas en mesure d’établir le montant de la rémunération perçue en qualité de dirigeant).

Une comparaison à faire ! Si l’administration entend remettre en cause la normalité de votre rémunération, elle devra :

  • apprécier la nature de votre fonction et le niveau de vos prérogatives dans la société ;
  • comparer votre rémunération avec celle perçue par d’autres dirigeants et les salariés de l’entreprise, notamment pour vérifier si le montant que vous percevez est effectivement en adéquation avec votre fonction et vos prérogatives ;
  • le cas échéant, procéder à une comparaison avec la rémunération perçue par d’autres dirigeants d’entreprise comparables.

Le saviez-vous ?

Normalement, il n’est pas possible de tenir compte des dividendes pour apprécier la normalité de votre rémunération. Toutefois, l’administration admet que ces dividendes pourront être pris en compte pour apprécier le caractère normal de votre rémunération si :

  • l’importance des dividendes contrebalance un niveau faible de rémunération ;
  • cette situation résulte de motifs économiques.

Des mesures de tolérance. L’administration fiscale se montre tolérante dans les circonstances suivantes :

  • dans le cas d’une entreprise nouvelle ou d’une entreprise en difficultés, l’exonération d’ISF propre aux biens professionnels n’est pas remise en cause en raison du niveau de la rémunération pendant 2 ans ;
  • si vous possédez plusieurs sociétés qui constituent un bien professionnel unique, la condition liée à la rémunération normale n’est pas exigée dans chaque société ;
  • si vous possédez une holding qui anime le groupe qu’elle forme avec sa ou ses filiales, cette condition n’est requise qu’au titre des fonctions exercées dans la holding à la condition que le cumul des rémunérations perçues dans la holding et la ou les filiales représente plus de la moitié de vos revenus professionnels.


Rémunération des dirigeants : le risque d’une rémunération « anormale » depuis le 1er janvier 2018

A titre personnel. Depuis le 1er janvier 2018, si votre patrimoine net (après déduction des dettes) excède 1,3 M€, vous êtes normalement soumis à l’IFI (l’impôt sur la fortune immobilière).

A noter. Depuis le 1er janvier 2018, l’IFI est venu remplacer l’ISF qui, de fait, a été supprimé.

Le patrimoine imposable. Pour déterminer le patrimoine imposable à l’IFI, il faut tenir compte de l’ensemble de vos biens immobiliers (maisons, appartements, etc.), de vos droits immobiliers (usufruit, droit d’usage et d’habitation, etc.) et de vos parts ou actions de sociétés, qui sont représentatives de biens et droits immobiliers détenus directement ou indirectement par une société.

Toutefois. Ne sont pas retenus, pour le calcul de la fraction imposable à l'IFI de la valeur des titres, les biens ou droits immobiliers qui sont affectés, par la société qui les détient, à son activité opérationnelle de nature industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale (il peut s’agir des immeubles détenus directement par la société dans laquelle vous détenez vos titres ou ceux détenus par une filiale ou sous-filiale de cette société).

Une activité opérationnelle. La notion d’activité opérationnelle englobe :

  • les activités des agents immobiliers, promoteurs, des lotisseurs, des marchands de biens,
  • les activités des personnes qui donnent en location des locaux commerciaux ou industriels munis du mobilier et du matériel nécessaire à l’exploitation,
  • les activités des loueurs en meublé,
  • les sociétés holdings animatrices du groupe qu’elles forment avec leurs filiales (cela suppose donc que la société holding, outre la gestion des titres de ses filiales, participe activement au contrôle des filiales dont elle définit la politique et la stratégie, et, le cas échéant, rende des services internes de nature administrative, informatique, comptable, juridique, financière, immobilière, etc.).

Une exonération pour les biens professionnels ? Une exonération, très proche de celle qui s’appliquait en matière d’ISF et connue sous le nom d’exonération au titre des « biens professionnels » est susceptible de s’appliquer, sous réserve que vous exerciez une activité professionnelle : cette activité, exercée à titre professionnel, doit donc être de nature industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale.

Des actifs nécessaires et affectés à l’activité. Les actifs immobiliers nécessaires et affectés à votre activité principale, de nature industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale, sont exonérés d'IFI. Il importe peu que l’activité professionnelle soit exercée à titre individuelle ou dans le cadre d’une société.

Activité exercée dans le cadre d’une société IS. Lorsque l'activité est exercée dans une société soumise, de plein droit ou sur option, à l'impôt sur les sociétés, les biens ou droits immobiliers détenus par vous et affectés à l’activité de cette société ainsi que la valeur des titres correspondant à la fraction représentative de ces mêmes biens, sont exonérés, sous les conditions suivantes :

  • l’activité de la société à qui sont affectés les biens et droits immobiliers doit être de nature industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale ;
  • vous devez effectivement exercer à titre principal dans la société une fonction de direction, qui doit donner lieu à une rémunération normale représentant plus de la moitié de ses revenus professionnels ;
  • vous devez détenir directement ou indirectement (un seul niveau d’interposition) au moins 25 % des droits de vote (seul ou avec les membres de son groupe familial au sens large), cette condition ne visant que les gérants minoritaires de SARL et les associés dirigeants de SA et SAS (cette condition de détention minimale du capital n’est pas exigée si la valeur brute de leur participation dépasse 50 % de la valeur brute de leur patrimoine).

Une rémunération « normale »... Votre rémunération sera considérée comme normale si son montant est en rapport avec la rémunération courante des personnes exerçant pleinement leur fonction de direction, compte tenu de la nature, de l’importance de l’activité et des résultats de l’entreprise. Une rémunération très insuffisante ne sera, par exemple, pas considérée comme normale.

Une comparaison à faire ! Si l’administration entend remettre en cause la normalité de votre rémunération, elle devra :

  • apprécier la nature de votre fonction et le niveau de vos prérogatives dans la société ;
  • comparer votre rémunération avec celle perçue par d’autres dirigeants et les salariés de l’entreprise, notamment pour vérifier si le montant que vous percevez est effectivement en adéquation avec votre fonction et vos prérogatives ;
  • le cas échéant, procéder à une comparaison avec la rémunération perçue par d’autres dirigeants d’entreprise comparables.

Une exonération limitée. Cette exonération a une portée limitée, dans la mesure où la valeur des titres d’une société n’est pas prise en compte au titre de l’IFI à hauteur de la valeur des biens ou droits affectés par cette société à sa propre activité opérationnelle.

A retenir

Versez-vous une rémunération normale ! Une rémunération excessive ne sera pas admise en déduction des résultats imposables de la société. Une rémunération anormale pourra vous faire perdre le bénéfice de l’exonération d’IFI attachée aux parts ou actions de sociétés, qui sont représentatives de biens et droits immobiliers détenus directement ou indirectement par une société (exonération au titre des « biens professionnels »).

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Sources
  • Article 158 du Code Général des Impôts (revenu réputé distribué)
  • Article 885 O bis du Code Général des Impôts (fonction de direction donnant lieu à une rémunération normale)
  • BOFiP-Impôts-BOI-PAT-ISF-30-30-30-10
  • Arrêt du Conseil d’Etat du 29 décembre 1999, n° 185480 (comparaison du niveau de rémunération par rapport à celles versées par d’autres entreprises)
  • Arrêt du Conseil d’Etat du 22 mai 2002, n° 221541 (appréciation du caractère excessif de la rémunération perçue par un dirigeant)
  • Arrêt de la Cour de Cassation, chambre commerciale, du 22 octobre 2013, n° 12-22991 (rémunération normale)
  • Arrêt de la Cour Administrative d'Appel de Versailles du 4 novembre 2014, n° 13VE03689 (appréciation niveau rémunération et non prise en compte d’un produit exceptionnel)
  • Arrêt de la Cour Administrative d’Appel de Nantes du 28 septembre 2017, n°16NT00084 (appréciation niveau rémunération)
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