Aller au contenu principal
Gérer mon entreprise
Pour les prestataires de services

Déménageurs : quelle est l’étendue de votre responsabilité ?

Date de mise à jour : 01/06/2021 Date de vérification le : 01/06/2021 12 minutes

Un de vos clients vous fait part d’une réclamation concernant l’état de ses biens suite à un déménagement. Un autre se plaint de délai non respecté et vous demande une indemnisation. Comment faire face à ces situations ? Quelle est l’étendue de votre responsabilité ?

Rédigé par l'équipe WebLex.
Déménageurs : quelle est l’étendue de votre responsabilité ?


Une responsabilité découlant du contrat de déménagement

Un principe. Le contrat de déménagement doit prévoir ses modalités d’exécution. Cela signifie qu’il doit mentionner les conditions d'enlèvement, de transport et de livraison des biens de votre client (les délais, notamment), le prix de la prestation et les obligations respectives des parties.

Un modèle de contrat ? A défaut de stipulations particulières, vos relations commerciales seront soumises aux clauses d’un contrat type.

     => Vous pouvez consulter notre annexe : contrat type de commission de transport.

Pendant combien de temps ? Votre responsabilité peut, en principe, être engagée pendant un délai d’un an pour les actions concernant un retard, la perte de marchandises ou des avaries. Ce délai se décompte à partir de la date de livraison des biens de votre client (ou de la date à laquelle elle devait être remise, en cas de perte totale). Il peut être interrompu en cas de reconnaissance non équivoque par le transporteur de son obligation d’indemniser son client (ce qui peut permettre au client d’agir en justice au-delà du délai d’un an). Le délai de recours est toutefois porté à 5 ans si vous vous rendez coupable de fraude ou d’infidélité (cas qui implique une volonté malveillante ou de déloyauté de votre part).

Délai de prescription : attention aux détails ! Le juge a récemment rappelé que le délai de prescription d’un an ne concerne que les seuls contrats ayant pour objet des prestations de transport de marchandises. Ainsi, l’entreprise sous-traitante qui n’a été mandatée que pour la manutention d’un transformateur électrique ne peut se prévaloir de ce délai.

Le saviez-vous ?

Vous pouvez engager la responsabilité de votre client, si les marchandises transportées pour son compte ont causé des dommages à votre véhicule de transport. Dans ce cas, vous êtes également tenu d’agir dans le délai d’un an à compter de la date de livraison prévue au contrat, ou celle à laquelle la marchandise a pu être livrée.

Des formalités ? Pour bénéficier du délai d’un an pour agir en responsabilité, il faut que votre cocontractant mécontent accomplisse certaines formalités. Il s’agit ici de compléter la lettre de voiture au moment de la livraison de la marchandise. Une réception sans réserve de la marchandise vous exonère de toute responsabilité quant aux dommages qui ont pu être causés à la marchandise.

Un court délai. Le contrat de déménagement conclu entre un professionnel et un particulier obéit à un régime spécifique : le consommateur dispose d’un délai de 10 jours à compter de la réception de ses biens pour émettre ses réserves, par lettre recommandée. Il peut aussi émettre ses réserves au moment même de la réception. Dans ce cas, il n’a pas besoin de confirmer les réserves par LRAR.


Une responsabilité résultant du retard de livraison

Une indemnisation. Par principe, tout retard préjudiciable dans l’exécution d’un contrat, s’il n’est pas justifié par un cas de force majeure, doit donner lieu à une indemnisation. En matière de transport de marchandises, ce principe est quelque peu adapté.

Une indemnisation limitée ? Le contrat type de commission de transport prévoit que tout retard occasionnant un préjudice donne lieu à indemnisation, celle-ci se limitant toutefois au prix de la prestation de transport (hors droits, taxes et frais divers).

Un complément d’indemnisation ? Si vous avez signé un contrat déterminant les modalités de son exécution, en fixant un délai ferme de livraison, ce délai s’impose à vous. Dès lors, tout retard occasionnant un préjudice donne lieu à réparation de l’entier préjudice subi par votre cocontractant.

Sauf… si vous justifiez d’un cas de force majeure ou si le contrat de commission de transport prévoit une clause limitative de responsabilité.

Pas d’indemnisation ? La clause qui exonère le transporteur de toute responsabilité pour retard est nulle.

Le saviez-vous ?

La clause limitative de responsabilité n’est pas valable en cas de faute inexcusable de votre part. C’est-à-dire si vous avez commis une faute délibérée (sans raison valable) avec la pleine conscience qu’il puisse en résulter un dommage pour votre client.


Responsabilité du transporteur en cas de pertes ou d’avaries

Qu’est-ce que la perte ? La perte résulte de l’impossibilité de livrer la marchandise prise en charge. Elle est partielle lorsqu’une partie de la marchandise mentionnée dans le document de prise en charge est livrée à destination. Elle est totale lorsque vous êtes dans l’impossibilité matérielle de livrer le bien mentionné dans le document de prise en charge.

Qu’est-ce qu’une avarie ? Une avarie est un dommage causé à la marchandise entre son chargement et son déchargement du véhicule.

Quelle responsabilité ? Vous ne pouvez pas vous exonérer de cette responsabilité par une clause spécifique dans le contrat de commission de transport : il s’agit d’une obligation de résultat qui pèse sur vous. Cela signifie que la marchandise doit arriver conformément à ce qu’elle était d’après le document de prise en charge. Ce principe est toutefois atténué si le dommage résulte d’un vice inhérent à la marchandise.

Le saviez-vous ?

Si votre donneur d’ordre participe au chargement du véhicule, il a alors la qualité d’expéditeur. Aussi, en cas de réserves émises par le destinataire, c’est lui-même qui pourra être mis en cause.

Client professionnel : quelle indemnisation ? L’indemnisation peut être plafonnée en application du contrat, lorsqu’il le prévoit. Par ailleurs, le contrat type fixe la réparation due par le transporteur à 20 € par kilogramme de poids brut de marchandise manquante ou avariée, sans pouvoir excéder une somme supérieure au produit du poids brut de la marchandise de l'envoi exprimé en tonnes multiplié par 5 000 €.

Mais… Il est possible de faire remplir une déclaration de valeur ou une déclaration d’intérêt spécial à la livraison. Dans ces cas, en cas de perte ou d’avarie, vous serez redevable d’une indemnité égale à la valeur déclarée. Ces options peuvent, bien entendu, donner lieu à un coût supplémentaire pour le donneur d’ordre.

Client particulier : quelle indemnisation ? L’indemnisation peut être plafonnée en application du contrat, lorsqu’il le prévoit. Toutefois, la clause qui a pour objet de supprimer ou de réduire le droit à réparation du client en cas de manquement du déménageur à ses obligations est abusive.

Vol de marchandises. En cas de vol de marchandises, vous devez effectuer toutes les diligences nécessaires pour faire constater précisément l’existence et l’étendue des pertes.

Pour la petite histoire. Une société dont la marchandise a été volée a réclamé l’indemnisation totale de son préjudice, le transporteur n’ayant pas respecté le contrat. Ce dernier interdisait, en effet, le recours à la sous-traitance, ce qu’a pourtant fait le transporteur. Peine perdue, cependant, le juge rappelant que le seul fait de ne pas respecter l’interdiction de sous-traitance n’implique pas, en lui-même, la réalisation du vol.

Pour la petite histoire (bis). Une société dont la marchandise a été endommagée a également réclamée l’indemnisation totale de son préjudice, le transporteur ayant tenté de passer, sans succès, sous un pont trop petit pour le camion. Pour la société, il s’agissait là d’une faute délibérée du transporteur. A tort, pour le juge : le pont n’était pas aux normes départementales, ce qu’aucun panneau ne signalait.

Pour la petite histoire (ter). Une société de déménagement a émis une offre d’indemnité à une cliente dont les meubles avaient été abimés. Celle-ci a refusé l’offre et a par la suite saisit la justice plus d’un an après le déménagement. Pour justifier ce dépassement du délai d’un an, la cliente a expliqué que l’offre d’indemnité valait reconnaissance de responsabilité, cette reconnaissance interrompant le délai de pour agir. A tort, pour le juge qui a rappelé qu’en l’absence de reconnaissance de responsabilité expressément mentionnée dans l’offre, celle-ci n’avait pas pour effet d’interrompre le délai pour agir.

Pour la petite histoire (quater). Une société de transport n’a pas pu faire valoir la clause limitative de responsabilité insérée dans un contrat à son client, suite au vol de sa marchandise (des téléviseurs). Le juge a, en effet, considéré que la société avait commis une faute inexcusable : le transporteur s’était garé, de nuit, sur un site isolé en pleine campagne, sans aucune surveillance effective. En outre, Les téléviseurs se trouvaient dans une remorque non cadenassée, ce qui était en contradiction avec les instructions qui lui avaient été données.

Pour la petite histoire (quinquies). Un transporteur a été chargé de transporter par navire des palmiers, dont 9 sont arrivés morts, à destination. Sa responsabilité n’a pas été retenue par le juge car le transporteur n’avait pas reçu d’instruction particulière, de la société qui les avait achetés, pour les soins à apporter aux palmiers ; et un rapport d’expertise a révélé que c’est l’entreprise qui avait chargé les palmiers dans le navire qui était fautive.

Pour la petite histoire (sexies). Un transporteur a vu sa responsabilité engagée, sans qu’il puisse se prévaloir de la clause limitative de responsabilité, suite au vol des photocopieurs transportés durant un week-end, car il avait commis une faute inexcusable (entrepôt non surveillé le week-end et attelage laissé portes ouvertes).

Pour la petite histoire (septies). Un juge a considéré qu’un transporteur n’avait pas commis de faute inexcusable en obéissant à l’injonction de voleurs déguisés en policiers.

Pour la petite histoire (octies). Il a été jugé qu’un transporteur n’ayant pas sanglé les marchandises transportées, qui ont chuté pendant le transport, n’avait pas commis de faute inexcusable dans la mesure où il ne lui avait été donné aucune instruction quant à l’arrimage des caisses. A défaut d’avoir eu conscience de la probabilité du dommage, il ne peut pas lui être reprochée une faute délibérée.

Pour la petite histoire (nonies A). Il a été jugé qu’un transporteur qui laisse une remorque de marchandises sur un parking sans surveillance après avoir désolidarisé la remorque du véhicule qui la tracte est responsable de son vol.

Pour la petite histoire (nonies B). Il a été jugé qu’un transporteur terrestre qui n’a pas émis de réserves à la réception de la marchandise peut toutefois s’exonérer de sa responsabilité s’il prouve que les pertes et avaries sont survenues pendant le transport maritime. Dans cette affaire, le transport de la marchandise s’est fait en 2 temps : transport maritime, puis transport terrestre. A la suite du constat de la disparition et de la casse d’une partie de la marchandise à la livraison finale, le transporteur maritime contestait l’engagement de sa responsabilité, en indiquant que le transporteur terrestre, qui était intervenu en dernier lieu, n’avait pas émis de réserves à la réception de la marchandise. Sauf, a retenu le juge, que les éléments de preuve apportés par le transporteur terrestre prouvent que les avaries sont arrivées pendant le transport maritime. Le transporteur maritime est donc seul responsable.

Pour la petite histoire (nonies C). Il a été jugé qu’un transporteur n’est pas tenu de rembourser l’intégralité d’une marchandise volée au moment de la livraison, lorsqu’il existe un contrat de transport entre elle est la société expéditrice plafonnant cette indemnité. Selon le juge, le remboursement intégral n’est dû que lorsque le transporteur a commis une faute délibérée entrainant le vol. Or, s’il n’a pas connaissance de la valeur et de l’importance de la marchandise, il ne peut savoir que des précautions particulières sont à prendre. Dans ces conditions, il ne peut donc pas avoir conscience de la probabilité du dommage.

A retenir

Lorsque vous êtes chargé de réaliser un déménagement, vous êtes tenu d’une obligation de résultat dans la livraison, c’est-à-dire que vous devez livrer les biens de votre client, conformément à l’état dans lesquels ils étaient lorsque vous les avez pris en charge. Cela signifie que si le résultat n’est pas atteint, votre responsabilité peut être engagée. Néanmoins, les indemnisations auxquelles vous pouvez être tenu sont susceptibles d’être plafonnées, en fonction de ce que votre contrat prévoit. D’où l’intérêt de sécuriser vos contrats !

Pour un contenu personnalisé, inscrivez-vous gratuitement !
Déjà inscrit ? Connectez-vous
Sources
  • Article 1231-1 du Code Civil (indemnisation en cas d’inexécution du contrat)
  • Articles L 133-1 et suivants du Code de Commerce (responsabilité des transporteurs)
  • Article L 224-63 du Code de la consommation (délai du consommateur pour les réserves)
  • Articles L1432-1 et suivants du Code des Transports
  • Arrêt de la Cour de cassation, chambre commerciale, du 12 juillet 2016, n° 14-20906 (une faute non intentionnelle n’est pas une faute inexcusable)
  • Arrêt de la Cour de cassation, chambre commerciale, du 13 septembre 2016, n° 14-23137 (pas de responsabilité du transporteur pour avarie si l’expéditeur a chargé les marchandises dans le véhicule)
  • Arrêt de la Cour de cassation, 1ère chambre civile, du 12 octobre 2016, n° 15-21194 (contrat de déménagement avec prestation de transport-prescription d’un an)
  • Arrêt de la Cour de Cassation, chambre commerciale, du 8 mars 2017, n° 15-13384 (négligence fautive du transporteur)
  • Arrêt de la Cour de cassation, chambre commerciale, du 10 janvier 2018, n° 16-21227 (marchandises volées-constatations insuffisantes)
  • Arrêt de la Cour de cassation, chambre commerciale, du 24 janvier 2018, n° 16-21284 (le voiturier est celui a effectué personnellement le transport)
  • Arrêt de la Cour de cassation, chambre commerciale, du 13 septembre 2017, n° 16-10596 (pas d’indemnisation totale-recours à la sous-traitance interdite par le contrat)
  • Arrêt de la Cour de cassation, chambre commerciale, du 11 avril 2018, n° 17-12975 (absence de faute délibérée du transporteur)
  • Arrêt de la Cour de cassation, chambre commerciale, du 9 mai 2018, n° 17-13030 (nullité de la clause qui exonère le transporteur de toute responsabilité pour retard)
  • Arrêt de la Cour de cassation, chambre commerciale, du 20 juin 2018, n° 17-15164 (chauffeur qui roule trop vite-client non responsable)
  • Arrêt de la Cour de cassation, 1ère chambre civile, du 19 septembre 2018, n° 17-21483 (déménagement-offre d’indemnité qui ne vaut pas reconnaissance de responsabilité)
  • Arrêt de la Cour de cassation, chambre commerciale, du 21 novembre 2018, n° 17-17468 (téléviseurs volés-faute inexcusable)
  • Arrêt de la Cour de cassation, chambre commerciale, du 16 janvier 2019, n° 17-17314 (palmiers morts-faute du chargeur et non du transporteur)
  • Arrêt de la Cour de cassation, chambre commerciale, du 16 janvier 2019, n° 17-26299 (photocopieurs volés-faute du transporteur)
  • Arrêt de la Cour de cassation, chambre commerciale, du 16 janvier 2019, n° 17-31683 (mobil-home qui heurte un pont-action hors délai du client)
  • Arrêt de la Cour de cassation, chambre commerciale, du 30 janvier 2019, n° 17-16604 (vol commis par des voleurs déguisés en policiers)
  • Arrêt de la Cour de cassation, 1ère chambre civile, du 11 décembre 2019, n° 18-21164 (clause abusive et contrat de déménagement)
  • Arrêt de la Cour de Cassation, chambre commerciale, du 11 mars 2020, n° 18-25552 (NP - délai de prescription applicable en cas de fraude au contrat de transport)
  • Arrêt de la Cour de Cassation, chambre commerciale, du 11 mars 2020, n° 17-31612 (NP - le transporteur qui n'a pas reçu d'instruction d'arrimage des caisses transportées n'a pas commis de faute inexcusable, car il ne pouvait pas avoir conscience de la probabilité du dommage)
  • Arrêt de la Cour de Cassation, chambre commerciale, du 11 mars 2020, n° 17-31612 (problème de sangles)
  • Arrêt de la Cour de cassation, chambre commerciale, du 21 octobre 2020, n° 19-16206 (NP)(un transporteur qui laisse une remorque de marchandises sur un parking sans surveillance après avoir désolidarisé la remorque du véhicule qui la tracte est responsable de son vol)
  • Arrêt de la Cour de cassation, chambre commerciale, du 6 janvier 2021, n° 18-22782 (NP) (le transporteur terrestre qui n’a pas émis de réserves à la réception des marchandises peut s’exonérer de sa responsabilité s’il prouve que les pertes et avaries sont survenues pendant le transport maritime)
  • Arrêt de la Cour de cassation, chambre commerciale du 25 novembre 2020, n°18-26387 (la société qui n’informe pas le transporteur de la valeur importante des colis transportés ne peut réclamer, en cas de vol de ceux-ci, une indemnisation intégrale de son préjudice)
  • Arrêt de la Cour de cassation, chambre commerciale, du 19 mai 2021, n° 19-22706 (NP) (un contrat de sous-traitance qui ne porte que sur la manutention d’un transformateur électrique n’a pas à être soumis au délai de prescription d’un an prévu en matière de transport)
Voir plus Voir moins
Voir les sources
Une paie juste et optimisée avec l'intégration Lucca et Silae
Abonnez vous à la newsletter
Accéder à WebLexPro
Accéder à WeblexPro